Chapitre 5 : La visite d'un vieil ami


Yénéa

Le Sanctuaire paraît bien vide depuis le départ de mes parents et du reste de ma famille. J'ai bien obtenu l'armure du Capricorne avant le départ de Shina mais les armures du Poisson et des Gémeaux trônent toujours dans les arènes aux côtés des armures d'Argent et de Bronze restant encore à distribuer. Celles de Pégase, du Dragon, d'Andromède et du Phénix ont été finalement placées dans la maison de Kiki, endroit accessible à tous. Nous savons tous qu'elles sont bien différentes des nôtres, qu'elles l'étaient même avant que Zeus et son fils ne s'en mêlent. J'ai pourtant demandé une fois à Kiki s'il pouvait tenter de les imiter. Il a secoué doucement la tête.

- Même si je le voulais, j'en serais bien incapable. Héphaïstos a une technique que je suis loin de posséder et je suis prêt à parier que Mû aurait été dans le même cas que moi.
- Tu ne veux pas essayer ?
- A quoi bon ? Je suis sûr d'échouer.
- Il n'empêche que tu pourrais essayer !
- Tu ressembles vraiment à ton père, Yénéa ! La même moue lorsque qu'on refuse de se plier à ses caprices, la même volonté… Tout vous rapproche. Je me demande bien d'où Aioros tire son caractère, lui qui est si calme.
- Est-ce qu'ils te manquent ?

Kiki ne m'a pas répondu tout de suite. Son regard paraissait perdu dans le vague.

- Bien sûr qu'ils me manquent. J'ai vécu près de vingt-cinq ans avec eux. Un quart de siècle, c'est énorme, Yénéa. J'ai combattu avec eux, d'abord avec mes modestes moyens, contre Poséidon, Hadès et puis Cronos.
- Pourquoi n'es-tu pas devenu Grand Pope ? Après tout, tu es le plus vieux d'entre nous.
- C'est vrai. Mais l'âge n'est pas un critère et Shiriu a pensé qu'Aioros ferait un meilleur Grand Pope que moi et sans doute a-t-il raison.
- Pourquoi ?
- Parce que Shiriu est le plus sage d'entre nous.
- Et alors ? La sagesse ne permet pas d'éviter de faire des erreurs !
- Qu'as-tu Yénéa ? Pourquoi cette agressivité ?
- Je ne sais pas. C'est juste que je trouve mon frère un peu jeune pour cette charge.
- Shiriu était beaucoup plus jeune quand il a pris en charge le Sanctuaire. Il avait à peine dix-huit ans.
- C'est vrai, tu as raison.

Cette discussion entre Kiki et moi m'a laissé un goût d'inachevé. Toutefois ce n'est pas avec lui que je dois la terminer. Je gravis donc les marches qui vont de ma demeure, celle du Capricorne à la grande Salle d'Audience. Arrivée au cœur du Sanctuaire, je me trouve face aux gardes.

- Veuillez aller prévenir le Grand Pope que le chevalier du Capricorne requiert une audience.
- Bien, chevalier. Un instant, s'il vous plaît.

Le garde frappe à la porte puis pénètre dans la pièce. Il en ressort quelques instants pour m'annoncer que mon frère accepte de me recevoir. Je m'avance vers le trône et à quelques mètres je m'agenouille. J'ai, je ne le cache pas, un peu de mal à me faire à ces marques de déférence que je dois à mon frère, mais il faut bien sacrifier aux rituels.

- Et bien ma sœur, que puis-je pour toi ?
- J'ai une question à te poser.
- Laquelle ?
- Pourquoi as-tu été nommé Grand Pope ?
- J'attendais le moment où tu viendrais me poser cette question, me répond-il après un temps de réflexion. Je ne sais pas bien ce qui a conduit Shiriu à me demander de lui succéder. Tout au plus puis-je imaginer que s'il l'a estimé bon, c'est qu'il devait avoir ses raisons.
- Oui, mais quelles sont-elles ?
- Tu m'en demandes trop, petite sœur ! Je ne suis pas dans l'esprit de notre oncle ! Tout ce que je sais, c'est qu'il m'a confié une charge et que je dois l'accomplir du mieux possible, c'est tout.

Dailados fait alors interruption, le souffle presque coupé. Dailados a été nommé Maître des Apprentis et travaille de ce fait dans les Arènes d'où il peut voir quiconque s'approcher du Sanctuaire. Il s'agenouille rapidement et dit.

- Que votre Majesté veuille bien pardonner mon intrusion, mais il y a aux portes du Sanctuaire un homme qui demande à vous voir.
- Et alors, chevalier du Taureau, pourquoi ne me l'amènes-tu pas ?
- C'est que… Cet homme dégage un cosmos très puissant et je n'ai pas osé…
- Où se trouve-t-il ?
- Devant la maison du Bélier, Votre Majesté. Mais je vous rappelle que Kiki est pour le moment absent.
- Je le sais bien, c'est moi qui l'aie envoyé en mission diplomatique à Asgard. Bien, dans ce cas, allons-y.

Qui diable peut être cet homme ? Dailados a parlé d'un cosmos très puissant. Pour qu'il en parle de la sorte, il faut que l'homme ait au moins une énergie digne des chevaliers d'Or ! Pourtant cela est impossible… Nous arrivons enfin au bas des Douze Maisons. Là nous attend un homme d'environ un mètre quatre-vingt dix.
Il a les cheveux poivre et sel, assez longs et un regard bleu d'une intensité incroyable.
On sent très vite un homme habitué à commander, avec un port de tête altier. En voyant le Grand Pope, il s'incline à peine, ce dont curieusement mon frère ne semble pas se formaliser.

- Tu as demandé à me voir, étranger. Que puis-je pour toi ?
- Tu es le Grand Pope ?
- En effet.
- Enlèves ton masque.
- Comment oses-tu parler ainsi à Sa Majesté, s'insurge Dailados? Qui que tu sois, saches que ton impertinence pourrait te valoir une bonne punition.
- Ah, répond l'inconnu d'air amusé, et c'est toi qui va me la donner ?
- Parfaitement.
- Très bien, alors fais-moi voir ce que tu sais faire, chevalier du Taureau.
- Tu l'auras voulu. Par la Corne du Taureau !

L'inconnu n'a pas esquissé pas le moindre geste de défense. L'attaque a semblé le traverser comme s'il s'agissait d'un fantôme. Mon cousin s'est préparé à attaquer de nouveau mais mon frère l'en a empêché d'un geste de la main. Dans la foulée, il enlève son masque et montre son visage à l'inconnu.

- Etranger, seul un chevalier très puissant peut résister sans bouger à cette attaque. J'en conclue que tu es un chevalier. Mais es-tu un ami ou un ennemi ?
- Je suis un ami, Grand Pope, même si je doute que le chevalier du Taureau accepte mon amitié.
- Qui es-tu et que veux-tu alors ?
- Je répondrai d'abord à ta deuxième question. J'étais venu rendre visite à de vieux amis, mais il semble qu'apparemment ils ne soient plus là.
- Qui étaient tes amis, étranger ?
- Les chevaliers de Pégase, du Dragon, du Cygne, d'Andromède et du Phénix.
- Les chevaliers divins d'Athéna ??? Mais qui es-tu ?
- Cela a-t-il tellement d'importance ?

J'examine attentivement l'homme. Il me rappelle bien quelqu'un que j'ai vu quelque part, mais qui et où ? Soudain une image se fait en moi : un portrait que j'ai vu accroché dans la maison des Gémeaux, deux adolescents… Je comprends alors et hurle :

- Kanon !

Surpris, il se tourne vers moi et je sais à ce moment-là que j'ai vu juste.
- Je ne crois pas que nous nous connaissions, jeune demoiselle. Comment savez-vous mon nom ?
- Ton portrait, ainsi que celui de ton frère, se trouve dans la maison des Gémeaux.
- Qui es-tu et que faisais-tu dans ma maison, me demande-t-il d'un ton dur et le visage fermé ?
- Je suis le chevalier du Capricorne et je ne faisais que passer dans ta maison et je te ferais remarquer que c'est peut-être la tienne mais je ne t'y ai jamais vu depuis ma naissance voilà vingt ans !

Alors que je m'attends à une explosion de la part d'un personnage aussi irascible, je vois un sourire se dessiner sur ses lèvres.

- Je suis ravi de te rencontrer, chevalier. Pardonnes mon ton quelque peu agressif, mais je dois reconnaître que savoir que ce portrait existe toujours m'a fait un choc.
- Tu es pardonné, Kanon.
- Je suis navré que mon père et mes oncles ne soient pas là pour te recevoir, Kanon, mais j'espère que tu nous feras l'honneur d'accepter notre hospitalité.
- Ton frère ? Tes oncles ?
- Oui, en effet. Le chevalier Pégase est mon père.
- Mais c'est pourtant vrai, fait Kanon après avoir examiné mon frère. Comment n'ai-je pas vu la ressemblance plus tôt ? C'est à croire que je vieillis vraiment !

A mon tour, je n'ai pas pu réprimer un sourire : il a l'air tellement jeune !

- J'accepte avec joie ton hospitalité, Grand Pope, ainsi tu pourras me raconter tout ce que j'ai manqué au cours des vingt dernières années.
- Soit, mais à la condition que tu fasses de même. Après tout, selon mon père, tu es mort dans ses bras sur l'Olympe !
- C'est vrai, mais tu ne sais pas que je suis censé être mort un bon nombre de fois !!!

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Cette fiction est copyright Emmanuel Axelrad.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.