Chapitre 4 : Renaissances


Irak

La nuit tombe. Il y a plusieurs jours que l'homme n'a pas croisé âme qui vive. Le désert irakien est comme tous les autres : d'une chaleur insoutenable le jour et glacial la nuit. Pourtant on peut lire sur le visage de l'homme une détermination sans faille, comme si les éléments extérieurs n'avaient aucune prise sur lui. Il arrive enfin près d'une oasis. Il ramasse quelques morceaux de bois et allume un feu. La chaleur des flammes a tôt fait de l'assoupir. Il commence à rêver.

Toujours le même rêve depuis trois mois. C'est ce rêve qui l'a conduit à entreprendre ce périple. Toujours la même voix qui répète sans cesse " Viens à moi, il est temps pour toi de renaître et de me rejoindre ". L'homme est d'une taille plutôt moyenne, basané, et vient vraisemblablement du Moyen-Orient. Après s'être reposé quelques instants, il reprend sa marche.

Après plusieurs heures de marche, il s'arrête enfin en haut d'une colline. Devant lui s'étend une plaine gigantesque.
" J'y suis enfin, murmure-t-il, je suis enfin arrivé à destination. C'est là que jadis se trouvait l'une des villes les plus puissantes du monde ; c'est là que se trouvait Babylone… " La terre se met soudain à trembler et une lumière apparaît. Au centre de la plaine, l'homme voit se matérialiser une forme qu'il ne peut identifier. Il s'en approche tout d'abord mais s'arrête au moment de la toucher.

- Qu'est-ce c'est que ça ? On dirait la tenue de combat que portait…
- C'est exact.
- Qui a parlé ?

L'homme scrute attentivement les alentours avant de se rendre à l'évidence : il n'y a personne sur les lieux.

- C'est curieux, j'aurais juré entendre une voix.
- Tu as entendu une voix. Ecoutes-moi, c'est l'armure légendaire de Cyrus le Grand. Tu es sa réincarnation. Si tu acceptes de me servir, tu pourras la revêtir et poursuivre tes rêves de gloire qui se sont achevés si brutalement.
- Qui êtes-vous ?
- Tu le seras en temps utile. Alors, ta réponse ?
- J'accepte.

***

Mongolie

Au plus profond des steppes mongoles, là où le vent souffle avec une vigueur peu commune, s'avance un homme. Il ne s'est pas lavé depuis plusieurs jours, sa barbe lui recouvre tout le visage et ses longs cheveux noirs sont hirsutes. Il n'est couvert que de haillons et sa gourde d'eau est presque vide. Ses jambes menacent de le lâcher d'un instant à l'autre et pourtant il continue à avancer. Une volonté farouche anime son visage. Depuis plusieurs nuits, il dort mal et entend la même voix lui dire sans cesse " Viens à moi, il est temps pour toi de renaître et de me rejoindre ".

Le voilà enfin arrivé : Caracorum, la capitale de la puissance des Mongols se trouve enfin face à lui. Jadis, cette cité a dominé l'Asie, soumettant même la Chine et ses rois ont été les maîtres du monde. Une lumière jaillit au milieu des immeubles en ruine et l'attire à lui. Il pénètre dans la maison et aperçoit le sabre en forme de demi-lune qui jaillit la lumière. Poussé par une force incroyable, il s'en saisit et ressent alors un frisson lui parcourir le corps.

- Je te souhaite la bienvenue en ces lieux.
- Qui… Qui est là ?
- Je suis celle qui t'a ramené à la vie et qui te promets bien plus si tu acceptes de rejoindre mon armée.
- Ordonnez et j'obéirai.
- Je n'en attendais pas moins de toi, Gengis Khan.

***

Rome

La Ville Eternelle dort. Seules quelques lumières éclairent le chemin que suit l'homme vers le Mont Jupiter. L'ascension est rude, mais il n'en a cure. Voilà plusieurs nuits qu'il fait le même rêve et qu'il refuse de suivre la voix. Finalement, il s'est décidé, il ira. Il est vêtu avec beaucoup de soin et rasé de près. C'est un homme riche, sans doute l'un des plus fortunés d'Italie. Mais en ce moment, il l'avoue sans détours, il donnerait bien sa fortune entière pour comprendre ce qui se passe.

Le voilà enfin arrivé. Il se trouve face à la statue de Jupiter, Dieu de la Foudre. Elle tombe en ruine, il y a bien longtemps que son culte est terminé. Le Dieu des Chrétiens a chassé les Anciens Dieux. Il s'aperçoit tout à coup que le bras de la statue est tendu vers lui, lui offrant un objet qu'il n'arrive pas à identifier dans le noir. Il s'approche et lorsqu'il reconnaît l'objet, son cœur s'arrête de battre : il s'agit d'une couronne de lauriers, semblables en tous points à celle que portait César.

- Qu'est-ce cela veut dire ? Qu'est-ce cette couronne vient faire ici ?
- Je peux répondre à ta question.
- Quoi ? Qui est là ?

A ce moment-là, la statue de Jupiter commence à briller, puis disparaît pour laisser place à une silhouette encapuchonnée.

- Qui es-tu ?
- Mon nom importe peu, du moins pour l'instant.
- Réponds-moi alors. Que vient faire cette couronne ici ?
- C'est la tienne, César !

***
Abou Simbel, Egypte

L'ancien royaume des Deux-Terres, - c'est ainsi que l'on appelait l'Egypte au temps des pharaons qui comprenait la Haute et Basse Egypte - lieu de la plus grande civilisation que le monde ait jamais connu. Devant le Ramesseum se tient un homme. Assez grand, il a le teint mat, buriné presque par toutes les journées qu'il passe sous le soleil dispensé par le grand Râ. Il reste quelques instants immobiles à l'entrée du temple puis se décide à y entrer.

Il se dirige tout droit vers la Salle Sacrée, là où se trouve la statue du grand pharaon Ramsès II, qui régna sur l'Egypte pendant près de 80 ans. Il s'agenouille devant puis redresse la tête. Une voix se fait alors entendre ; pourtant il n'y a personne dans le temple, laissé à l'abandon depuis des siècles. Elle semble provenir de la statue elle-même.

- Je te salue, mon fils.
- Mes respects, ô Lumière de l'Egypte.
- Le moment est venu, la déesse me l'a annoncé. Tu vas revêtir l'armure des pharaons, mon fils. Tu vas pouvoir accomplir mes rêves…
- Je ferais selon tes désirs, pharaon.
- Tu dois obéir à la déesse. Le jures-tu ?
- Oui, Majesté.
- Que Maât soit toujours avec toi, mon fils.

Un pan du mur s'ouvre alors et laisse place à l'armure de Ramsès II…

***

Grèce

La région de Thessalie est l'une des plus belles au monde. Des plaines se succèdent entourées de montagnes aux lignes harmonieuses. C'est dans cette contrée qu'ont vu le jour les plus grands combattants de l'antiquité. L'homme a effectué un long voyage pour parvenir jusqu'à cette région. Guidé par la voix, il n'a jamais baissé les bras. Même s'il est aujourd'hui à bout de forces, il sait que son destin va bientôt se jouer en ces lieux.

Tout à coup, au détour d'un bosquet, il aperçoit un char attelé à deux chevaux blancs. Sur le char se trouvent un arc et un carquois rempli de flèches. Il voit également une épée ainsi qu'un bouclier rouge sang.

- Réveilles-toi, vaillant Achille. Le moment est venu de reprendre ta place parmi les vivants et d'accomplir tes rêves de conquête.
- Qui êtes-vous ?
- Que t'importe ? Je suis celle qui va te permettre de réaliser tes rêves si tu acceptes de la servir.
- Commandez et j'obéirai.
- Tu dois pour commencer rejoindre tes compagnons d'arme.
- Où ?
- Suis la voix, elle te guidera.

***

Détroit des Dardanelles

Le détroit des Dardanelles est situé entre l'Asie et l'Europe. Non loin de ce détroit se tenait, il y a bien longtemps, l'une des cités les plus puissantes de l'Antiquité : Troie. C'est sur ce site qu'a eu lieu la célèbre bataille qui a opposé Grecs et Troyens. Cette guerre a duré dix ans et a vu la victoire des Grecs grâce à la ruse d'Ulysse. Tout ceci, l'homme le sait parfaitement. Cela fait partie de son héritage, tel qu'il le tient de son père qui lui-même le tenait de son père et ainsi depuis des siècles. Il n'a que mépris pour la race grecque qu'il considère comme lâche pour ne pas avoir fini la bataille par un véritable combat. Il ne rêve que d'une chose, c'est de pouvoir venger ses ancêtres.

C'est pourquoi, lorsque la voix lui a ordonné de se rendre sur les ruines de la cité mythique, il s'y est rendu sans tarder. Bien sûr, on ne peut plus rien reconnaître, mais l'homme imagine sans peine le palais du roi Priam, le temple dédié à Apollon et surtout l'imposante muraille qui a tenu en respect tous ceux qui ont tenté une attaque frontale contre elle. Il regarde autour de lui et ne voyant personne, il décide de s'asseoir. Combien de temps il reste ici, les yeux dans le vague, il ne le sait pas et n'en a cure. La voix lui a dit de venir alors il attend qu'elle se manifeste à nouveau. C'est pourquoi lorsqu'elle le fait enfin, il n'est pas surpris.

- Ainsi, tu es venu ?
- Pourquoi, vous en doutiez ?
- Non, je dois le reconnaître. J'avais plus d'inquiétudes concernant certains de tes compagnons, mais pas pour toi.
- Mes compagnons ?
- Tu les rencontreras plus tard. Pour l'heure, tu dois prêter serment. Jures-tu de me servir fidèlement, si je m'engage en retour à t'offrir la vengeance que tu désires ?
- Oui.
- Alors, à partir de cet instant, tu fais partie de mon armée, Hector de Troie !

***

Alexandrie

Le phare d'Alexandrie ne brille plus depuis longtemps. L'une des sept merveilles du monde n'est plus qu'un souvenir. Pourtant il fut un temps où l'on venait de fort loin pour l'admirer. L'homme a les yeux brillants, comme s'il retenait ses larmes. Il y avait si longtemps… Il n'a plus de sandales et est couvert de guenilles. Une fois de plus, il est seul face à son destin. Il n'aurait pas du mourir si jeune ; il avait tant à faire. Bien sûr, on pourrait arguer qu'il avait déjà fait tellement, mais s'arrêter en si bon chemin. Il veillerait à ce que cela n'arrive pas cette fois.

- Que viens-tu faire en ce lieu ?
- Ce que vous m'avez ordonné. C'est vous qui m'avez convoqué, je vous le rappelle.
- C'est exact. Si tu es venu, c'est que tu as accepté ma proposition, n'est-ce pas ?
- Oui.
- Tu avais refusé de répondre à ma question la première fois que nous nous étions parlé. Le feras-tu à présent ?
- Oui.
- Alors réponds-moi ; qui es-tu ?
- Je suis Alexandre le Conquérant !

***

Quelque part dans le monde

Sept hommes sont debout. Certains sont là depuis des heures, voire des jours. Le dernier d'entre eux vient juste d'arriver. A ce moment-là, une silhouette encapuchonnée apparaît. Immédiatement, ils s'agenouillent devant elle.

- Mes guerriers, vous avez exprimé le désir de savoir qui j'étais et ce que nous allions faire. Je vous ai tous dit que cela attendrait. Le moment est à présent de vous révéler mon identité et mon but. Je suis une déesse, vous l'avez déjà deviné, et mon but est de m'emparer de la Terre. Pour cela, il me faut détruire le Sanctuaire d'Athéna et c'est à cela que vous allez m'aider. Une fois ses chevaliers décimés, je serais la maîtresse du monde !
- Mais qui êtes-vous, demande Achille ?
- Vous ne l'avez toujours pas deviné ? Je pensais pourtant que cela tombait sous le sens ! Je suis Némésis, déesse de la Vengeance !

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Cette fiction est copyright Emmanuel Axelrad.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.