Chapitre 3 : D'adaptation en décisions


Cela faisait maintenant sept mois que Shun et Shaka vivaient au Village. Ils s'étaient très vite intégrés. Ils effectuaient leurs tâches avec entrain (forcé au début mais de plus en plus réel au fil des jours) et s'étaient vite rendus indispensables pour les gros travaux. (Un peu à la surprise des villageois qui ne les imaginaient pas si costauds). Ils commençaient à nouer des liens solides avec quelques hommes et quasiment toutes les jeunes filles leurs couraient après.
Ces sept mois leurs avaient aussi permis de mieux se connaître. Shaka n'était pas si sérieux que l'on pouvait l'imaginer. Il avait notamment eu deux ou trois fous rires mémorables. Shun, lui, se montrait beaucoup plus résistant que prévu. S'il traversait de grand moment de tristesse, il trouvait toujours le courage de se reprendre.
Une nuit trop étoilée ou une question anodine sur leur passé les faisait encore souffrir, forcément. Mais peu à peu ils prenaient pied dans cette réalité qui n'aurait jamais dû être la leur.
A vrai dire plus l'échéance de leur décision définitive approchait plus ils se sentaient enclins à rester au Village.

C'était une soirée comme les autres et ils s'apprêtaient à joindre une veillée lorsque Cybèle déboula dans la petite maison que le conseil leur avait attribuée.
Au fil des mois Cybèle était devenue une amie. Elle avait décidé de les prendre pour confidents, passant des heures à leur raconter ses menus problèmes, ses aspirations et ses joies. Elle semblait avoir compris qu'ils avaient besoin de se concentrer sur d'autres vies que la leur. La jeune fille éprouvait toujours un immense plaisir à discuter avec eux. Même si le sujet paraissait banal, ils avaient souvent des points de vue originaux qui la poussait à réfléchir. L'un des ses sujets favoris était Yorgos. Et si elle ne partageait toujours pas les idées de son frère, elle le comprenait un peu mieux et avait réussi à se rapprocher de lui. C'est comme cela qu'elle fut au courant de ses projets

-Venez vite, dit-elle aux chevaliers, Yorgos va encore s'attirer des ennuis.

Cybèle semblait vraiment paniquée, ce qui ne lui ressemblait pas

-Qu'est-ce qui se passe ? demanda Shun.
-Yorgos va s'enfuir. C'est peut-être déjà fait. Je ne l'ai pas trouvé et il m'a laissé une lettre d'adieux.
-Cybèle, commença Shaka, c'est peut-être mieux ainsi. Tu sais qu'il n'est pas très heureux ici.
-Tu oublie la malédiction. Il va mourir.
-Tu sais je ne suis pas sûr que cette malédiction…
-Qui était Vassili ? interrompit Shun.

Au fond de lui, Shun savait qu'il aurait du poser cette question des semaines plus tôt. Mais il n'en avait jamais trouvé le courage.

-Comment avez-vous entendu parler de lui ? Il est mort deux ans avant que vous n'arriviez.
-Yorgos nous en a parlé.
-Oh, bien sûr. Ils étaient très amis. Et puis il y a eu un éboulement, enfin je crois parce que ça n'a jamais été très clair, et il est mort. Ca a été très dur pour le conseiller Basile. C'était son seul fils.

Les regards de Shun et de Shaka se croisèrent.

-A ton avis, Cybèle, vers où Yorgos a-t-il pu partir ? interrogea ce dernier.
-Il a beaucoup parlé de Paris ces derniers temps. Il a peut-être emprunté la route qui va vers le nord.

Les chevaliers se précipitèrent dehors, suivi de Cybèle, surprise par la réaction des ses amis.
Ils coururent pendant trois quart d'heure avant de retrouver Yorgos (les chevaliers auraient été beaucoup plus vite s'il n'y avait pas eu Cybèle) et ils faillirent arriver trop tard.
Shun et Shaka virent en même temps l'arme pointée sur Yorgos le coup de feu qui allait partir. Shaka intercepta la balle et Shun projeta Yorgos à terre.
Lorsqu'ils se relevèrent ils furent tous les deux choqués par l'apparence de l'agresseur.
L'homme portait une armure de bronze ! Et l'arme à feu qu'il avait à la main n'en paraissait que plus déplacée.

-Mais c'est quoi cette mascarade ! s'exclama Shaka
-Comment avez-vous fait ? demanda l'agresseur, surpris de la tournure des événements.
-Tu ne le sais pas malgré l'armure que tu portes ? dit Shun. Et tu n'as pas de cosmos. Où as-tu trouvé cette armure ?
-Mon prédécesseur me l'a transmise. Elle passe d'Exécuteur en Exécuteur depuis la création du village il y a plus de 130 ans.
-C'est toi qui a tué Vassili, murmura Yorgos. Je te reconnais.
-Il avait enfreint les règles. C'était mon devoir de le tuer.

Si Shun n'avait pas été là pour le retenir, Yorgos se serait rué sur l'Exécuteur.

-Lâche-moi, dit Yorgos. Il va payer pour Vassili.

Shaka pris alors la parole :

-Je suis sûr que Shun a très envie de te convaincre que la vengeance ne t'apportera rien, qu'elle pourrait te blesser plus que t'aider et je suis sûr que s'il disposait d'assez de temps il arriverait à te persuader. Mais comme on a tout intérêt à ce que la situation ne s'éternise pas je vais être plus pragmatique. Il est armé et son armure le protège de tout ce que tu pourras lui faire. Si tu l'attaques, tu meurs et en plus tu ne le blesses pas. Donc tu perds sur toute la ligne.
-Shun ou toi pourriez le tuer, réalisa soudain Yorgos.
-Exact mais je ne souhaite pas en arriver là.

L'Exécuteur éclata de rire.

-Ce n'est que de la fanfaronnade. Je suis invulnérable avec cette armure.
-Ecoute, dit Shun, aucun villageois ne peut certainement te battre mais tu n'est pas invulnérable. Le mieux serait que tu nous laisse partir.
-Je n'ai jamais vu un tel culot.

Sans prévenir l'Exécuteur fit feu une deuxième fois. De nouveau Shaka intercepta la balle, puis dans un mouvement trop rapide pour être vue, il désarma l'homme.
C'est ce moment là que les conseillers choisirent pour arriver.

-Que se passe-t-il, Exécuteur ? demanda le conseiller Basile. Pourquoi Yorgos est encore en vie ?
-Je… Je n'en sais rien. Les étrangers sont arrivés et ils ont intercepté la première balle. Quand j'ai voulu tirer une deuxième fois le blond m'a désarmé mais…

L'Exécuteur leva les bras en signe d'impuissance.

-Conseillers, dit alors Shun, aucun de vous n'est en mesure de nous tuer et nous ne vous laisserons pas faire de mal à Yorgos. Le mieux est de nous laisser partir.
-C'est impossible. Ca va à l'encontre de toutes les lois du village, dit Basile. Si nous vous laissons partir la communauté se désagrégera. Tout le monde voudra faire comme vous.
-Je ne pense pas, dit Shun. Les gens sont vraiment heureux dans ce village.
-Oui, bien sûr. Mais vous croyez que les premiers conseillers ont instauré cette malédiction pour le plaisir ? Ils y ont été forcés lorsqu'ils ont vu que trop de jeunes partaient parce qu'ils ne voulaient pas donner 10 ans de leurs vies. Ils ne voyaient pas l'intérêt de travailler pour les autres
-Mais il doit y avoir d'autres moyens pour les faire rester. Vous savez, la parole peut aussi être très persuasive si elle est censée et juste.
-Vous êtes trop naïf, Shun. L'homme a besoin de limites et les seules qu'il comprenne sont celles instaurées par la peur et la violence
-C'est faux ! s'écria Shun
-Malheureusement, non.
-On va pas s'en sortir, murmura Shaka pour lui-même. Ecoutez, dit-il à haute voix, je pense comme Shun que cette malédiction n'est pas la bonne solution. Mais malgré ses imperfections votre communauté fonctionne plutôt bien. Je pense donc qu'on peut trouver un compromis. Nous partons sur-le-champ et vous organisez un mensonge similaire que celui que vous avez crée pour Vassili.

Basile soupesa ses options. Aux dires de l'Exécuteur (leur meilleur et en fait leur unique combattant) les tuer était impossible. Donc feindre leur disparition semblait la meilleure des solutions. Mais comment mettre en place ce simulacre ? Et puis ils n'auraient pas de corps à montrer. Il resterait toujours un doute qui pourrait se révéler très dangereux si le village traversait une période de crise. Cela avait déjà été difficile de faire admettre la fausse version de la mort de Vassili. Mais c'était son fils. Il avait accepté qu'il meure mais pas qu'il soit déshonoré et son souvenir sali.
Finalement Shun eut une idée.

-Une tempête, dit-il. Nous pouvons disparaître lors d'une tempête.
-Par ce que vous pouvez créer une tempête peut-être ? Je vous signale qu'il n'y en a presque jamais par ici, seulement quelques gros orages.
-Faites-moi confiance.

Les conseillers n'avaient pas l'air emballé.

-Fais leur une démonstration Shun, dit Shaka

Sous les yeux médusés des conseillers mais aussi de Cybèle et de Yorgos, Shun intensifia son cosmos et créa un courant nébulaire. Le vent souffla aux oreilles des villageois présents. Puis Shun dirigea ce courant sur une grosse roche tout en augmentant sa puissance. La roche valsa dans les airs et atterrit plusieurs mètres plus loin.

-Mais qui êtes-vous ? demanda l'un des conseillés. Comment…
-Cela n'a pas d'importance, le coupa Basile sur un ton enjoué. C'est exactement ce qu'il nous faut. Cette tempête sera la nouvelle forme de la malédiction. Avec un tel phénomène personne ne voudra partir avant un moment.
-Mais…, voulu protester Shun
-Cela nous convient, l'interrompit Shaka. Mais je voudrais poser une condition supplémentaire.
-Quelle est-elle ? demanda Basile après avoir essayer de soutenir le regard de Shaka.
-Nous emportons l'armure de l'Exécuteur.
-Je refuse, dit l'Exécuteur
-C'est impossible, firent échos les conseillers
-Je vous rappelle que Shun peut très bien diriger sa tempête sur vous. Vous ne connaissez même pas la signification de l'armure. Vous vous êtes montrés indignes de l'utiliser en l'employant contre des hommes sans défense. De plus elle nous revient de droit. Nous sommes les derniers représentants de la chevalerie à laquelle elle appartient.

Basile comprit qu'il n'arriverait pas à faire changer Shaka d'avis et honnêtement il savait qu'il n'était pas en position de négocier.

-C'est d'accord.

L'Exécuteur obéit de mauvaise grâce à l'ordre du conseiller et remis l'armure aux deux chevaliers qui se partagèrent les morceaux.

-Nous allons récupérer quelques affaires, dit Shaka, puis nous partirons. Attendez-nous ici.
-Non, dit Basile, nous allons nous rapprocher du village pour que tout le monde puisse voir la tempête.
-Bien, dit Basile, lorsque les chevaliers furent revenus avec leur amure sur le dos et des sacs dans les mains, il est temps de se dire au revoir. Yorgos, tu as été très chanceux. J'espère que tu n'auras pas à souffrir des conséquences de tes actes. Shun, Shaka, ce fut un plaisir de vous rencontrer malgré les circonstances fâcheuses de votre départ. Cybèle veille bien sur eux. Ils vont avoir besoin que quelqu'un leur mette du plomb dans la tête.
-Eh ! s'exclama Cybèle. Je ne veux pas partir moi ! Pourquoi devrais-je être punie pour les fautes de mon frère ? J'ai toujours montré que le Village pouvait compter sur moi.
-Nous sommes désolés Cybèle mais il n'y a aucun moyen que tu restes. Tu aurais pu faire parti du conseil un jour mais tu en as trop vu alors que tu n'étais pas encore prête. Nous ne pouvons pas prendre le risque que tu rentres au village.
-Je n'aurais jamais du m'inquiéter pour toi Yorgos, lança Cybèle, des larmes de rage coulant sur son visage.

Yorgos eu le bon sens de ne pas répondre.
Après avoir fait ses adieux silencieux au village Shun déclencha la tempête. Elle ravagea tout sur une centaine de mètres carrés et les habitants qui avait entendu un bruit énorme sortirent à temps pour en voir les dernières émanations. Lorsque les plus courageux osèrent enfin s'approcher Shun, Shaka, Cybèle et Yorgos n'étaient plus en vue.

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Cette fiction est copyright Elise Moreau.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.