Chapitre 3 : Une belle journée


Hermia sourit. Voir Ikki et Hyoga, deux des plus puissants chevaliers de tous les temps avec chacun un bébé sur les genoux, en train de donner le biberon était un spectacle incroyable. Heureusement que Seiya n'était pas là, sinon, il était probable qu'il ne puisse plus jamais s'arrêter de rire ! Car Hermia avait accouché de jumeaux, faux bien sûr. Ikki avait actuellement Miho - Hermia avait beaucoup insisté sur ce point - et Hyoga s'occupait de Dorios, du nom du père de l'ancienne Prêtresse. Les deux chevaliers avaient eu beaucoup de mal à admettre leur paternité. De longues disputes avaient eu lieu, au cours desquelles ni l'un ni l'autre ne parvenaient à se mettre d'accord, sous l'œil moqueur de leurs trois frères.

Dohko ne savait pas quelle attitude adopter, pas plus que le reste des chevaliers d'Or du reste. Le Conseil débattait sans fin ; le pire était que personne ne savait ce sur quoi l'on débattait ! Après tout, les principaux concernés étaient Hermia et les deux chevaliers de Bronze. Ces deux derniers ne se réconcilièrent que le jour de l'accouchement. Ils avaient fini par admettre qu'aucun des deux n'aurait Hermia pour lui seul ; il valait mieux dans ce cas-là faire bonne figure. Et puis, même si aucun des deux ne l'aurait avoué sous la torture, ils étaient totalement gâteux de leurs enfants. Du moins au début. Parce que ce soir-là, comme depuis plusieurs jours, Hyoga était au bord de la crise de nerfs. Son fils refusait catégoriquement de boire son biberon et ne cessait d'hurler. Dans ces cas-là, sa sœur, pourtant si sage d'ordinaire, ne manquait pas de lui emboîter le pas.

- Je vais craquer, hurla le chevalier du Cygne !

Il se réveilla alors, assis sur son lit, le visage en sueur. Hermia avait annoncé sa grossesse la veille et il allait être père. Ou Ikki. Mais par pitié, pas des jumeaux !

***

Masque de Mort

Après quelques instants, Dohko adressa un signe à Hermia, Ikki et Hyoga, leur intimant de le suivre. En se dirigeant vers la maison de la Balance, il s'arrêta à hauteur de Mû et lui glissa quelques mots. Ce dernier se tourna alors vers les autres chevaliers de Bronze et les crétoises. Il confia Shiriu et Shunrei à Shaka ; Procris et Ariane allèrent avec Shina, la Princesse semblait-il avec beaucoup de réticences. Aiolia prit Seiya par les épaules et l'emmena avec lui, Seika suivant Marine. Je rentrai quant à moi dans ma maison. Les chevaliers qui continuaient leur route m'adressèrent un bref hochement de tête. Seul Aphrodite me sourit et me fit un petit signe de la main : j'étais toujours une brebis galeuse. Certes aucun des chevaliers ne me témoignait une quelconque hostilité, mais aucune bienveillance non plus.

Je jetai un coup d'œil vers le ciel. Bleu. Une belle journée s'annonçait. Mais pour moi, Masque de Mort, elle était pareille à toutes les autres. Une journée de plus où je resterai à l'intérieur de ma maison. Je passai ma main, presque amoureusement, sur les murs à présent complètement lisses de ma maison. Cela m'avait fait un choc, lorsque j'avais pénétré pour la première fois dans ma demeure, quelques deux semaines auparavant, à notre retour des Enfers. Sur le moment, j'étais bien trop épuisé pour y penser, mais dès le lendemain, j'en avais fait le tour, tentant de me persuader que mes yeux me disaient la vérité. Car je ne parvenais pas y croire : le poids de mes fautes effacé ! C'était comme si une nouvelle vie s'offrait à moi. Mais n'était-ce pas la conséquence de mon revirement, de mon serment à Athéna ? Après tout Saga et Kanon s'étaient vus également offrir cette seconde chance, alors pourquoi pas moi ? Un nom remonta alors du plus profond de mes entrailles ; un nom que je n'avais pas entendu, ou que j'avais refusé d'entendre, depuis de très longues années. Le mien.

- Paolo…

Un frisson me parcourut le dos. Je n'osai bouger, alors que je savais parfaitement qui venait de parler. Deux personnes seulement au Sanctuaire connaissaient mon véritable nom. Pas mon surnom, celui que j'avais avant d'être appelé Masque de Mort, mais mon nom de baptême, celui que mes parents m'avaient donné et celui ma sœur prononçait toujours avec amour. L'une d'entre elles était Saga. L'autre…

- Je te croyais remonté vers ta maison, Aphrodite. Que fais-tu là ?
- Je viens essayer de soulager ta peine. Je viens essayer de t'expliquer qu'il est temps d'abandonner ton surnom de Masque de Mort qui n'a plus lieu d'être, les âmes de ceux que tu as tué ayant retrouvé le repos.
- Tu ne peux pas comprendre.
- En effet. Si je connais ton prénom, c'est uniquement parce que je me trouvais dans la Grande Salle, lorsque tu t'es présenté à Saga. Mais je ne connais effectivement rien d'autre sur toi. Mais je veux t'aider. Tu dois parler, pour pouvoir exorciser ta peine.
- De quelle peine parles-tu ?
- Voyons, Paolo, tu sais bien qu'aucun homme ne peut obtenir une armure d'Or si son cœur n'est pas pur au départ. Shura, toi et moi avons été pervertis plus tard, ce qui a causé notre perte. A présent que nous sommes, par un miracle, vivants à nouveau, il est temps de laisser derrière ce qui avait fait de nous des monstres.

Les larmes commencèrent à me monter aux yeux pour la première fois depuis si longtemps. Peut-être oui. Peut-être était-il temps de lâcher cette vieille haine que j'avais en moi. Je me laissai tomber à terre.

- Soit, Aphrodite. Puisque tu le désires, écoute mon histoire…

" Je suis né à Paterne, en Sicile. Paterne est un petit village, sans grand intérêt ; sa seule particularité est de se trouver aux pieds de l'Etna. Ce qui fait qu'à chaque éruption, c'est la panique. Le sol est aride et il est difficile d'y faire pousser quoi que ce soit. Pourtant, c'est beau la Sicile, Aphrodite, si tu savais… Evidemment, l'été, c'est presque invivable. Entre les émanations du volcan et la chaleur dégagée par le soleil, il est impossible de rester dehors l'après-midi. La plupart des gens sont pauvres, tels que l'étaient mes parents. Mon père était le seul à travailler, comme guide pour les touristes. Ma mère avait suffisamment à faire avec ma sœur et moi. Ma sœur s'appelait Marguerita et était un ange tombé du ciel. Toujours le sourire aux lèvres, les yeux rieurs et l'air espiègle. Elle était brune et de peau mat, telle que l'étaient la plupart des femmes de la région. Mais il émanait d'elle une telle douceur… Marguerita avait deux ans de moins que moi. Elle en avait donc quatre lorsque mes parents ont été emportés par une éruption. Je n'oublierai jamais cette journée. Nous étions en septembre ; l'été touchait à sa fin et j'allais reprendre l'école, du moins si l'on pouvait appeler comme cela les quelques leçons que j'apprenais. Rien n'annonçait une pareille tragédie. Bien sûr, l'Etna grondait, mais comme il le faisait régulièrement et que rien ne se passait, personne n'y prêtait plus la moindre attention. Le bruit était presque devenu partie intégrante du paysage, si j'ose dire. Lorsqu'il a craché pour la première fois, il était déjà trop tard. La lave a dévalé la pente à une vitesse effrayante.

Tous ceux qui ont essayé de s'enfuir ont été rattrapés et brûlés vifs. Mes parents faisaient partie de ceux-là. Quant à Marguerita et moi, nous y avons échappé par miracle, ou par la grâce des dieux, je ne sais pas. Nous étions tapis dans un espèce de réduit, ma sœur blottie dans le creux de mes bras. Lorsque la lave arriva vers nous, à une cinquantaine de mètres, elle me souffla dans l'oreille " Je t'aime ". Et là… Un miracle se produisit. Chaque fibre, chaque particule de mon être hurla la même chose " Je refuse qu'elle meure ! ". Je sentis une énergie colossale monter en moi, se développer. Il fallait que je la laisse s'échapper. Lorsque je le fis, la lave arrivait sur nous. Mais elle ne nous toucha pas. Elle dévia par la gauche, la droite et au-dessus de ma tête. Bien sûr, aujourd'hui je sais que c'est ma cosmo-énergie qui s'est manifestée pour la première fois ce jour-là ; mais à l'époque, je croyais que c'était un miracle divin.

***

Death Queen Island

Néa, Jen et Calios se matérialisèrent. Les voyages dimensionnels ne posaient aucun problème au chevalier de l'Autel qui l'avait appris de son maître, le chevalier du Sextant. L'armure que portait Néa était belle, comme sa détentrice, mais en même temps très sobre et épurée dans ses formes. Elle était d'une couleur mate qui tranchait avec le teint plutôt laiteux de la jeune femme. Son casque, non content de protéger son crâne, encadrait également son visage en deux bandes qui descendaient sur ses joues. Le reste de sa protection lui enserrait parfaitement son corps, épousant au mieux ses formes généreuses.

L'armure de Cassiopée était en revanche très originale dans sa forme. Elle ne comportait pas de casque, laissant la tête sans protection excepté un mince bandeau d'argent qui tenait les cheveux de Jen. Il était probable que ce bandeau, dans l'antiquité, fut celui qui retenait les cheveux de la reine Ethiopienne. Les épaulettes étaient également assez fines, soulignant la silhouette nerveuse de son porteur. Le plastron et la jupe donnaient plus une impression de solidité, tout comme les protections des jambes du reste. Sur le plastron, une image gravée : celle d'une femme levant les bras vers le ciel. La constellation de Cassiopée.

Enfin la protection de Calios était elle toutes en formes harmonieuses ; on eut dit que chaque morceau était un demi-cercle issu de la forme totem de la protection. Sur le plastron était dessiné un bouclier brillant, nimbé de lumière, qui reflétait sans aucun doute la puissance du porteur. Sur ses avant-bras, deux boucliers ; la défense et l'attaque semblait-il…

Le vent soufflait sans discontinuer sur l'île. Le paysage était aride, comme le savaient les trois chevaliers, et l'on distinguait au loin le volcan qui crachait son soufre. Partout, des rochers à perte de vue. Calios regarda ses compagnons. Leur air calme ne le trompa pas un seul instant. Un examen un peu approfondi permettait aisément de s'apercevoir que les deux chevaliers étaient solidement campés sur leurs jambes, les bras légèrement repliés, prêts à faire face à n'importe quelle attaque. Leurs regards avaient analysé les alentours en un instant et savaient manifestement à quoi s'en tenir.

- Vous comptez rester cachés derrière ces rochers jusqu'à la fin des temps, demanda Calios d'une voix tranquille ?

Pendant une poignée de secondes, seul le vent lui répondit. Puis une ombre quitta l'abri rocailleux pour venir se mettre en face des envoyés du Sanctuaire.

- Je suis le chevalier Noir de l'Horloge, dit-il d'une voix dure et peu amène, ainsi que le maître de cette île. Qui êtes-vous et que voulez-vous ?
- Nous débarrasser définitivement de vous, répondit Calios.

Le chevalier Noir ricana. Il porta ses doigts à sa bouche et siffla. Aussitôt, une trentaine de guerriers surgirent et vinrent entourer leur chef.

- Nous sommes exactement trente-deux ici et vous êtes trois. Même si vous êtes des chevaliers d'Argent, vous n'avez pas la moindre chance.

Un léger sourire s'échappa des lèvres de Calios. Une aura rouge vif l'entoura tandis qu'il croisait ses bras devant lui en s'inclinant légèrement. Les deux boucliers qui ornaient ses avant-bras s'entrechoquèrent avant de s'illuminer.

- Rafale.

Le ton de Calios n'avait pas varié. Aucune émotion, aucune rage n'avait filtré des lèvres du chevalier du Bouclier. C'est probablement pour cela que les chevaliers Noirs ne se méfièrent pas. Ce fut leur dernière, mais coûteuse erreur. Les boucliers se détachèrent puis s'envolèrent à une vitesse incroyable en se démultipliant. Ils frappèrent les trente-deux chevaliers Noirs presque en même temps. Leur tâche accomplie, ils revinrent se placer sur les bras de Calios, qui n'avait pas bougé.

- Comment récupère-t-on les armures, interrogea Néa ?
- On brûle les corps, répondit Jen.

Néa se tourna vers Calios, l'air incrédule. Celui-ci parvint à se contenir quelques instants avant d'éclater de rire.

- Regarde, fit-il en montrant Jen du doigt.

Celui-ci ferma les yeux et tendit son bras droit. Les armures commencèrent à vibrer sur les corps avant de s'arracher et de se reformer devant les trois chevaliers.

- Je maîtrise les métaux, tu devrais le savoir, fit Jen en haussant les épaules devant le regard interrogateur de Néa.
- Bon, coupa Calios, on va faire un tour de l'île. on se retrouve ici après.
- Pourquoi ? Ils sont tous morts.
- Le seul moyen d'en être certain, c'est de vérifier.

Ils se séparèrent. Vu leur puissance, il ne leur fallut que quelques secondes pour mener une fouille approfondie de l'île. Ils revinrent à leur point de départ au même instant. Jen et Néa secouèrent la tête.

- Parfait. Il ne nous reste plus qu'à ramener ces armures au Grand Pope pour qu'il les détruise.
- Pas si vite, coupa Jen. Tu nous dois des explications, avant.
- Oui, renchérit Néa, lorsque tu nous dit il y a dix ans, alors que nous venions de recevoir nos armures, qu'il nous fallait quitter le Sanctuaire parce que nous étions menacés, nous t'avons cru et suivi sans un mot. Nous nous sommes cachés mais avons du tout de même tué trois chevaliers dépêchés par Saga. Il y a peu de temps, tu nous as annoncé que nous pouvions retourner en Grèce, nous n'avons rien dit non plus. Pourtant tu n'avais aucun moyen d'être sûr que le bien régnait à nouveau au Sanctuaire. Tu es un personnage très secret, Calios. Mais aujourd'hui tu dois nous répondre.

Le vent continuait de souffler et c'était le seul bruit qu'entendaient les chevaliers. Calios fixa intensément ses compagnons avant de hausser les épaules.

- Ce n'est pas un bien grand secret, finit-il par répondre. J'ai été le disciple de Dohko de la Balance. J'ai terminé mon entraînement et obtenu mon armure la veille du jour où le futur chevalier du Dragon arrivait aux Cinq Pics. Lorsque je lui ai fait part de mes soupçons concernant le Grand Pope, il s'est contenté de sourire et de me rappeler que j'étais maître de ma destinée. Mais il a insisté sur une chose : je ne devais pas rester seul. Alors je vous ai choisi, parce que vos entraînements s'étaient déroulés au Sanctuaire et que j'avais donc une chance de vous convaincre. Il était fort possible que vos observations vous aient mené au même point que moi.
- Pourquoi ne nous avoir jamais rien dit, interrogea Jen ?
- Pourquoi n'avoir jamais rien demandé, contra Calios, un large sourire aux lèvres ?

Néa éclata de rire, secouant ses boucles blondes. Calios fit de même et l'air maussade de Jen ne résista pas plus de quelques secondes. Puis le chevalier de l'Autel fit appel à son cosmos.

- Allez, il est temps de rentrer.

Leurs corps se mirent à scintiller, tout comme les armures noires et ils disparurent.

***

Masque de Mort

Nous sommes restés prostrés là pendant plusieurs dizaines de minutes, peut-être même une heure. Je ne parvenais pas à comprendre comment la lave avait pu ne pas nous toucher. Peut-être aurait-il mieux valu, me suis-je dit à ce moment-là. Comment deux orphelins de quatre et six ans allaient-ils pouvoir s'en sortir ? Nous avions faim, soif et peu de chance de trouver de quoi nous sustenter… De plus, même si la lave nous avait évité, créant un point sécurisé de quelques mètres, elle se trouvait tout autour de nous et je ne savais pas comment en sortir. Je commençai à désespérer quand une lumière, douce et accueillante, m'obligea à fermer les yeux quelques instants. Lorsque je les rouvris, un homme se tenait devant moi souriant. Il avait fait sauter toutes les couches de lave. Il portait une sorte de carapace dorée que je devais découvrir plus tard comme étant l'armure d'Or du Cancer.

- Cela fait plusieurs heures que je suis à ta recherche, mon garçon.

Sa voix était grave, mais agréable. Toutefois, savoir que cet homme me recherchait n'était pas pour me rassurer.

- Comment t'appelles-tu ?
- Paolo.
- C'est ta sœur ?
- Oui… Oui, monsieur.
- Alors, emmène-là. Nous partons.
- Où ?
- Tu le sauras bien assez tôt. Donne-moi la main et surtout ne la lâche pas.

Je fis comme il l'ordonnait. Sans que je comprenne comment, en un instant, nous nous retrouvâmes dans un endroit différent, mais toujours en Sicile. Un autre garçon se trouvait là, un peu plus âgé que moi.

- Théo, voici Paolo. Il va s'entraîner avec toi.

J'essayai de sourire, mais il me renvoya une telle impression d'agressivité et même de haine, que je sus dès cet instant que nous serions rivaux, si ce n'était ennemis.

- Quant à toi, jeune demoiselle, tu iras vivre dans le village voisin. Paolo ira te voir quand il le pourra.
- Non, intervins-je, je ne veux pas…

Une gifle à m'en décrocher la mâchoire accueillit ma protestation. Toute bienveillance avait à présent disparu du visage de l'homme.

- Tu ne discuteras plus jamais mes ordres, tu entends ?
- Mais, monsieur…
- Maître, tonna-t-il, appelle-moi maître !
- Oui, maître, finis-je par capituler.

Le sourire de Théo fut douloureux à subir pendant que mon maître emmenait ma sœur. Les années passèrent. Je te passe les détails de mon entraînement, Aphrodite, je me doute que tu as subi le même. Sache juste que je m'arrangeais pour voir Marguerita une fois par mois et que mes relations avec Théo ne firent que se dégrader. Il me haïssait d'autant plus que j'étais incontestablement plus puissant que lui. Non seulement j'avais très rapidement rattrapé mon retard sur lui mais à chaque fois que nous nous affrontions, je prenais le dessus. Finalement, au bout de quatre longues années, mon maître décida que j'étais apte à tenter l'ultime épreuve. Je la réussis et il me donna son armure. Je dus alors me rendre au Sanctuaire pour recevoir l'adoubement de Saga. C'est alors que je te rencontrai. Puis je sollicitai quelques jours avant de prendre possession de ma demeure. Saga me l'accorda et je retournai en Sicile, bien décidé à emmener Marguerita avec moi en Grèce. C'est là que ma vie bascula.

Lorsque j'arrivai au camp, je trouvai mon maître, mort, une profonde blessure dans le dos. Le coup était signé ; je l'avais trop affronté pour ne pas reconnaître la technique de Théo. Je me penchai et fermai les yeux de mon maître. Un ricanement m'obligea alors à me retourner.

Théo me faisait face, un corps négligemment posé sur son épaule. Je sus immédiatement de qui il s'agissait. Cette brute épaisse avait profité de mon absence pour tuer mon maître et surtout ma sœur !

- Elle a crié ton long durant de longues minutes, pendant qu'elle se vidait lentement de son sang. C'était très touchant, je dois dire.

Je sentis la rage monter en moi ; elle m'envahissait inexorablement. Mon cosmos m'entoura, presque malgré moi. J'avais oublié tous les préceptes de chevalerie que mon maître m'avait inculqué et déclenchai une formidable décharge d'énergie.

- Tu vas payer pour tes crimes, Théo ! Par les Vagues d'Hadès !

Je crois qu'il ne savait pas à quel point j'étais puissant. Moi-même je l'ignorais, jusqu'à ce terrible moment. Le coup avait été fatal, mais il ne me suffit pas. Lorsque j'en eus fini avec lui, il n'avait plus rien d'humain. Je n'enterrai même pas ma sœur. Je partis sans me retourner. De ce jour, la haine ne m'a pas quitté. Je me suis mis à tuer pour oublier ma peine. Chaque meurtre me procurait une ivresse qui permettait, pour quelques instants, de faire abstraction de ma douleur. Et puis, un jour, son visage, plein de souffrance, apparut sur un des murs de ma maison. Il fut suivi par tous les autres… "

Les larmes coulaient à présent de mon visage sans discontinuer. Aphrodite, dans un élan de douceur dont je ne l'aurais jamais cru capable, me prit dans ses bras. Mes sanglots redoublèrent.

- J'aurais du être là, parvins-je à articuler entre deux crises de larmes, j'aurais du la protéger !
- Je suis certain qu'elle t'a pardonné. Tu dois lui dire au revoir à présent, Paolo. Et toute cette histoire sera terminée.

Lui dire au revoir ? Après treize ans ? Quel intérêt ? Brusquement, je compris. L'image de ma sœur se forma dans mon esprit et je lui dis adieu. Les mots ne franchirent pas ma bouche, mais Aphrodite les entendit. Il s'écarta alors de moi et me sourit.

- Bienvenue parmi nous, Paolo, chevalier d'Or du Cancer.

Je lui rendis son sourire. Je jetai à nouveau un coup d'œil vers le ciel. Oui, après tout, c'était vraiment une belle journée.

Je quittai la maison du Cancer.

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Cette fiction est copyright Emmanuel Axelrad.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.