Chapitre 12 : Réalité


Cité Céleste d'Athéna, Maison des Gémeaux :

Et pourtant les astres l'avaient, prédits. Il suffisait de jeter un œil dans les reflets insondables des constellations, et voir à travers elles ce que le temps voulait nous dire. Mais non. C'était bien trop simple. Trop facile. Alors, on prend les armes, on aiguise les couteaux, on arbore des armures, de slogans et d'éloquences vengeresses. Partir tout détruire, pour mieux reconstruire. S'en aller tout dévaster, pour mieux repartir, s'envoler. Qui sont-ils ? Qui sont-ils donc ? L'avenir serait-il écrit dans les étoiles ? Il suffisait de lever la tête pour y voir plus clair. Il suffisait de prévoir, de prévenir l'attendu… ou l'inattendu. Mais non. On n'avait pas que ça à faire. Tant mieux. C'est toujours plus distrayant dans une effusion de sang. C'est ainsi fait. C'est ainsi écrit. Donc tout sera, peut-être, à nouveau détruit. Mais tout sera-t-il reconstruit ? Est-ce que la réponse scintille parmi les étoiles ? Pensez-vous ! Décidément non. La seule vérité est celle de la Maison Céleste des Gémeaux. Celle qui est en train de créer sa propre réalité.

L'annonce de la Liste, tel un discours gravé dans le marbre, telle une évidence trop souvent sous-entendue entre les lignes qu'oubliée, ébranla d'une énième secousse le Sanctuaire de la Déesse de la Sagesse. Que voulait donc cet infâme sans pudeur, ni morale, planté aux pieds du Sanctuaire, son épée dirigée vers le sommet du Domaine ? Immobile, il avait le regard froid. Mais si fébrile que sa foi s'enlisait. Et que cherchait-il ? Après s'être donné en spectacle, en montrant du doigt, ou du glaive, les coupables désignés. Gagner l'intérêt ? Prendre possession de la Terre ? de l'Olympe ? de l'Univers ? Mais non, voyons ! Quelles idées obsolètes ! Il portait donc bien son nom, Ixion de l'Eclair de la Destruction. Ah ! Encore un qui en voulait à la vie, à la toute puissance, à l'omniscience des Dieux ! Pourtant on s'en était débarrassé dans le Tartare, et avec lui le reste de la troupe d'effrontés dans son genre ! Et pourtant… les astres l'avaient prédits.

Tityos se déguisait toujours avec les ombres des colonnes de la Maison des Gémeaux. Mais Shaka n'avait guère de leçons à recevoir en matière de perception, même les yeux fermés, il voyait plus clair que le commun des mortels. Leur dialogue se poursuivait alors, comme si le Titan revenu du Tartare était à découvert. C'était bien artificiel de se cacher derrière la pierre. Mais bon c'est vrai, on ne sait jamais…

_Je compte sur toi pour me dévoiler le but véritable de cette ridicule mascarade… soupira Shaka en quittant la position du lotus dans laquelle il s'était installé.
_Si tu veux, je peux te donner la preuve de ma sincérité, asséna Tityos avec toutefois une certaine retenue.
_Alors notre affrontement n'aura pas plus de sens que celui qui vient de s'achever ici même.
_Kanon est mort à nouveau, mais toi non plus Shaka, ne fais pas semblant, tu sais très bien quel est le sens profond derrière ce sacrifice…
_Certainement…
_Ne te méprends pas Shaka, poursuivit le Titan, il est vrai que j'estime la valeur de chacun d'entre vous, les Ô combien inestimables Saints d'Athéna… Car je sais qu'il va falloir passer par vous avant d'arriver dans la Maison du Cancer, avant d'arriver aux portes de la chambre sacrée où repose la déité de toutes les convoitises… Combien ont osé la défier, lui dérober ses biens : la Terre et l'Humanité ? Toutes les raisons des guerres saintes ne sont que des prétextes… Mais nous autres… Nous ne voulons plus cela. Pour cette raison l'ordre de la chevalerie doit disparaître !
_Je ne comprends pas… Vous êtes revenus jusqu'ici… dans le seul but de faire cesser l'activité de la chevalerie ? Parce que tu sais… si ce n'est que cela, il suffisait de demander.
_Encore une fois, tu essaies de contourner l'essentiel. Dois-je te rappeler que les entendements des dieux dépassent tout. Tout ce que tu peux imaginer ! Ce que nous autres, entreprenons ici, a déjà été entamé il y a des millénaires ! Actéon l'avait tout de suite compris, il n'a manifesté aucune hostilité à notre égard et s'est joint à notre cause, sûrement au détriment de sa déesse, mais il n'en avait cure ! Car il connaissant enfin la Vérité ! Melkor avait été plus dur à convaincre… Mais je dois t'avouer qu'il n'a jamais été possédé ! Ni par moi, ni par Ixion ! Il agissait délibérément !
_Je ne te crois pas, j'ai très bien ressenti qu'un cosmos étranger entourait le Gardien Lunaire de la Force ! contredit vivement Shaka, mais le doute envahissait le Saint de la Vierge au plus profond de son être.
_Ecoute, tout ceci se tient dans une parfaite logique, mais je n'ai pas le temps de t'expliciter tout ce qui s'est passé entre le moment où Melkor a quitté son frère, Sindar, et le moment où il s'est retrouvé à combattre Mû et Auron, ce serait trop long et inutile. Bien que le Temps ait une valeur très abstraite dorénavant, il m'est pour l'instant précieux, et je dois à tout prix atteindre la Maison du Cancer, pour ensuite me diriger vers le Cœur du Sanctuaire d'Athéna ! Tu entends ! ? Rien ne pourra m'empêcher de passer ! Pas même la puissance d'un Chevalier d'or qui frôle celle d'un demi-dieu !
_Je regrette, Tityos, tu ne m'as pas convaincu, d'ailleurs je doute que tu puisses convaincre qui que ce soit. Alors, je crains que tu ne sois dans l'obligation de te découvrir.
_Comme tu voudras…

Une âpre odeur s'empara de la salle entourée de colonnes. Il faisait froid. Très froid. C'était l'odeur de la mort. Une lueur opaline dansa et dévoila ses premières lucioles dissipant à la fois le sombre dans lequel baignait l'endroit, et apportant une clarté maussade, semblable à la brume. Bientôt une étrange silhouette se dessina dans cette ambiance nauséabonde. C'était bien lui. L'armure du Titan de la Malédiction ! Un visage pâle, des traits marqués, une chevelure blanchâtre à la fois sale et blanche pure, disons grise pour ne pas dire purifiée. Un détail intrigua le Virgo Saint : la protection portée par Tityos rappelait les armures des Gardiens Lunaires. Sauf que celle du Titan présentait un aspect spectral. Shaka n'eut pas le temps de s'attarder dessus. Immédiatement il créa autour de lui un halo de lumière en guise de protection.L'adversaire du Saint d'Athéna répliqua par un sourire, qui se traça comme un fossé sur son visage morbide.

_Tu me forces à me montrer, mais tu ne fais pas preuve d'hospitalité, cher Chevalier de sa déesse, dit Tityos.
_Si tu tiens à tester mes aptitudes, volontiers, répondit Shaka. Tu as sans doute entendu parler du Tenbu Horin… ?
_Ton attaque a déjà été déjouée par de nombreux combattants, je suppose que tu en as déjà entendu parler toi aussi… Enfin bref, avant toute chose je voudrais que tu me répondes sur un sujet qui m'intrigue : lorsque toi et les autres Chevaliers d'or vous vous êtes retrouvés projetés hors de Giudecca, qui vous a donné les directives ? Et qui vous a montré la voie jusqu'à l'Olympe, jusqu'au Sanctuaire Sacré Céleste d'Athéna qui n'a jamais été foulé par aucun autre humain avant vous ! ?
_J'allais te le dire, avant que ton acolyte en bas des marches ne m'interrompe, c'est Héraclès qui nous a montré la voie et nous a tout appris sur notre véritable rôle, sur le véritable but de la chevalerie !
_Très bien, tout ceci me rassure, donc vous ne savez rien. Merci, en tout cas. Je ne sais même pas s'il sera utile de te combattre, Shaka…
_Pourquoi dis-tu ça ?
_Car il suffira de te révéler la Vérité et la véritable identité de ta déesse pour que tu me laisses franchir cette Maison…
_Ce ne sera pas nécessaire… Je lis tes pensées comme dans un livre ouvert, Tityos.
_Vraiment ?
_Oui. Sache que je ne suis pas un pion sur un échiquier. Sache que je me bats, et je me suis toujours battu avec et pour mes propres idées, je ne suis pas Athéna, je suis un Saint au service d'Athéna, je donnerai ma vie pour elle, cela signifie que j'adhère totalement à son idéologie, je ne suis pas de ceux qui obéissent aveuglément. Car ceux-là sont les vrais dangers, ils pourraient obéir à n'importe qui, il suffirait d'un maniement adroit de sophisme pour les convaincre, pour les corrompre. Non je ne suis pas de ceux dévoués ! Je suis de ceux en dévotion, car ma pensée est pure et transparente comme celle d'Athéna !
_Alors le prochain à mourir sera toi, Shaka !


Sanctuaire Céleste d'Athéna Maison du Bélier :

Auron n'était pas seul. Il ne l'avait jamais été. Mû, Chevalier d'or du Bélier, l'avait rejoint. Il stoppa son avancée à quelques mètres du Chevalier d'or du Serpentaire, celui qui n'était connu que des Olympiens. Ils se tenaient là, devant la Maison Sacrée, la Première du Sanctuaire Céleste d'Athéna qui ne trouvait plus la paix depuis quelques heures. Des guerriers de toutes castes s'invitaient à la traverser, oubliant que c'était le Premier Rempart de la Cité d'Athéna. Mais désormais, Mû et Auron se jurèrent que plus personne, non personne, ne foulerait le sol de ce Temple, sans la permission d'Athéna. Et s'ils devaient passer, ils ne le feraient que sur leurs cadavres.

Cela faisait un moment que Auron du Serpentaire contemplait Ixion et ses sbires. Il nota quelques détails frappant de ressemblance avec quelqu'un qu'il avait aperçu maintes et maintes fois sur le Domaine de l'Olympe. Il lui rappelait cet être, pourtant connu de tous. Auron peinait à croire à l'incroyable. Tout comme il entendit l'inaudible : le blasphème des Douze Dieux, par celui qui est assez ostensible pour dire l'indicible.

Combien étaient-ils l'accompagnant dans ses paroles effroyables, et ses gestes invraisemblables ? Il ne put les distinguer clairement. Mais le Serpentaire Saint les identifia aussitôt de par leurs protections : les individus accompagnant Ixion étaient tous des Gardiens Lunaires. Aucun doute là-dessus. Mais pourquoi ne bougeaient-ils pas ? Ils pourraient venir facilement à bout de lui, et même avec l'aide de Mû, il était envisageable, inévitable qu'ils laissent la vie dans ce combat inégal, déloyal. Cette lutte… avait-elle au moins un sens ? Pourquoi Ixion enverrait-il un Melkor possédé aller affronter seul tous les Chevaliers d'or restants ? De plus il sentait non une, mais deux cosmo-énergies néfastes et incommensurables dans le Temple des Gémeaux. A la fois terriblement hostiles et atrocement proches… Se pourrait-il que leurs souffrances endurées dans le Tartare ressortent tant de leurs âmes meurtries que tout être ressente une infime compassion envers eux ?

Mû reprit son avancée et dépassa Auron, en posant sa main sur son épaule encore endolorie par les frappes de Melkor.

_Ton Maître est au moins aussi entêté que toi, dit Mû sans regarder son interlocuteur.
_Seigneur Milo… a affronté ce monstre de Melkor ?
_C'est même lui qui a fini par l'achever avec l'aide propice de Kanon, mais son initiative était, à la base, de te venir en aide, à toi, son disciple.
_Non… je ne peux le croire, Milo le Chevalier d'or du Scorpion… qui… me viendrait en aide… ?
_Même s'il a été dur avec toi pendant toutes ces années, il tenait à toi, dit Mû. Jamais il ne t'aurait laissé te sacrifier inutilement, il aurait préféré mourir à ta place. Par respect pour mon frère d'armes, je te laisse donc encore le choix de te retirer.
_Jamais ! La véritable bataille vient de commencer ! Même si je ne possède pas encore tout votre savoir, je suis tout de même un Saint au service d'Athéna !
_Bien… Pour tout te dire, c'est la réponse que j'attendais… Veux-tu mourir avec moi, Auron ?
_C'est un grand honneur, Maître Mû… Je n'oublierai pas toutes ces années passées, je n'oublierai pas toute cette sagesse et tout ce savoir que vous m'avez tous transmis.
_Je suis content que tu t'en souviennes, il est dorénavant temps de l'appliquer.

Et ils descendirent les marches qui les séparaient des envahisseurs. Le Serpentaire et le Bélier s'allièrent, aussi bien dans la démarche que dans la préparation de leur future offensive.


Temple Céleste de Phénicie :

Horus voyait à ses pieds un Phénix quasi-dévêtu de son armure et agonisant sous l'ultime coup porté par son adversaire, Akh du Héron. Le Gardien Lunaire de la Divination ne tarda guère à se saisir de la quasi-dépouille d'Ikki, enfin de ce qui restait du Chevalier de Bronze d'Athéna.

_Excuse-moi, Ikki mais avant de t'embaumer vivant dans l'un de mes Sarcophages, il faut que je procède… à quelques procédures au préalable… Alors, en premier… je crois qu'il me faudra te couper la langue, es-tu d'accord ?
_Argh… Mmmh…

Ikki ne pouvait articuler tant la douleur et la paralysie s'emparaient de son corps inerte. Tant la couleur pourpre, qui ressemblait fortement à la couleur de l'enfer, peignait son corps jusqu'à le recouvrir entièrement de la tête aux pieds.

_Ah ? Non ? Tu veux que je découpe tes membres d'abord… ? Aucun problème !

Horus souleva par le cou le corps tremblant et gigotant du Chevalier de Bronze. Il serra très fort. Ses griffes se plantèrent dans la chair du malheureux. Du sang pourpre dégoulina sur les mains du Gardien du Temple qui se mêla à la bave ressortant de la bouche de la victime. Le Gardien de Prison prit de faux airs offensés.

_Oh ! Mais ! Dégoûtant ! Pour la peine, je vais directement te trancher la tête !

Il arma sa main telle une lame aiguisée. Ikki émettait des couinements, le Saint ne pouvait même plus respirer. Horus poursuivit.

_J'espère que tu ne me seras reconnaissant par la suite ! Te rends-tu compte de la clémence que je t'accorde ! ? Je vais abréger tes souffrances car tu m'es insupportable et en plus tu empestes ! Tu as déjà la fragrance d'un cadavre en décomposition ! C'est donc cela la " Mort Pourpre "… le sang maudit accélère la détérioration corporelle pendant que le sujet se trouve en vie… Amusant ! Mais peu ragoûtant ! Allez, adieu Phénix !

Et la main droite de Horus trancha la tête de Ikki. Cette dernière roula un ou deux mètres, mais le coup provoqua un giclement incessant du liquide qui pourrissait le corps du Chevalier, le sang décora, à présent, toute l'armure du Gardien Lunaire de la Divination. Horus jeta la dépouille mortelle à terre.

_Ce n'est pas vrai ! Tu ne t'avoues donc jamais vaincu ! Même mort et décapité tu continues à souiller ce Temple et m'affligeant le désolant spectacle de ta fontaine sanguinaire !

Le Gardien de Phénicie fit brûler son aura pour se débarrasser de l'hémoglobine infecte parcourant son armure.

_Quelle poisse ! dit Horus. Bon maintenant, faut que je le foute dans un Sarcophage. J'ai quand même besoin de son énergie… Enfin de ce qu'il en reste.

Il ramassa la dépouille mortelle, la jeta dans un des cercueils ouverts. Il alla lentement chercher la tête manquante et la ramassa sans la regarder. Le Gardien Céleste la déposa sur le corps. Mais le moment où il vit le Chevalier recomposé dans son intégralité, une sordide vision le troubla. Comme un flash. Il ne cessa de cligner des yeux, la vue se brouilla de plus en plus, tel un écran en mal de réception.

_Mais qu'est-ce que… ?

Le Gardien Céleste n'accorda pas plus d'importance à ce trouble qu'il attribua à la fatigue. Il referma le cercueil. Il s'apprêta ensuite à mettre le sarcophage à l'endroit adéquat, quand cette vision du corps reconstitué l'intrigua. Il décida d'aller vérifier une nouvelle fois. Il souleva doucement le couvercle du tombeau. Ce qu'il vit à cet instant le terrifia tellement qu'il se mordit sa propre langue jusqu'au sang qu'il racla, de suite, dans sa bouche. Il recula de quelques mètres, de peur, s'essuyant les yeux pour être bien sûr qu'il ne s'agissait pas d'une vision.

Il revint à l'endroit où Akh du Héron avait péri sous le coup du Phénix et la dépouille mortelle de son serviteur avait également disparu ! Il essaya de se remémorer l'enchaînement des événements dans l'ordre chronologique. Non, non, non ! Comment était-ce possible ! ? Horus retourna immédiatement à l'endroit du sarcophage et… il revit l'invraisemblable ! Ce n'était pas Phénix qui était dans le tombeau ! C'était Akh ! C'était le corps du Héron qui reposait, la tête tranchée, dans son sarcophage ! Mais alors…

" Horus, Gardien Lunaire de la Divination… Fils d'Isis et Osiris… Gardien de la Prison Céleste de Phénicie… mais surtout : Traître de la pire espèce ! "
_Qui ! ? Qui a parlé ?
" Traître… Traître… Traître… Traître… Traître… "

Une ambiance des plus maussades envahit le lieu et le rendit encore plus morbide qu'il ne l'était déjà. Horus regardait partout et de tous les hiéroglyphes émanait un seul mot : Traître. Les frasques sur les murs prirent vie et les différents Dieux dont Anubis et Thot se tenaient prêts à lui arracher les boyaux. Mâat plongea sa main dans sa poitrine et en sortit son cœur. Sous les hurlements assourdissants qu'il ne contrôlait plus, Horus trébucha et tomba en fixant les yeux sur son cœur d'une couleur plus noire que la nuit. Etonné de rester toujours en vie, Horus tenta de s'enfuir, mais il trébucha de nouveau et se cogna la tête sur le sol dallé.

Lorsqu'il revint à ses esprits, il était étalé par terre, mais il vit Ikki le Chevalier du Phénix les bras croisés devant lui.

_Non, c'est un cauchemar ! Je vais me réveiller ! Je viens de te tuer ! Je t'ai tranché la tête ! Tu n'es tout de même pas, immortel, Ikki… ! ?
_Je ne pensais pas le faire, mais je dois te remercier Horus, grâce à toi, je suis au courant de la situation, bien plus que la plupart de la garde d'Athéna, et personnellement, j'aime beaucoup me trouver dans cette position. De cette façon, je peux prendre mes distances avec le troupeau.
_Etais-je victime de l'Illusion du Phénix… ?
_Pire que ça, tu as été victime de tes pires cauchemars, de ce que tu cachais au plus profond de ton âme…
_Mais comment… ? Je croyais que Akh était venu à bout de toi !
_C'est ce qu'il croyait aussi, et sa surprise ne fut que plus belle lorsque tu as porté la main sur lui pour lui trancher la tête…
_Non, ce n'est pas possible…
_Il te suppliait de toutes ses forces pour que tu t'arrêtes, il gisait à tes pieds agonisant et tu l'étrangla de tes mains pour ensuite l'achever en tranchant sa tête, et le mettre dans ton sarcophage.
_J'ai été victime de ton illusion… mais quand ? Quand as-tu pu me frapper ! ? Je n'ai rien vu !
_Parce que tu n'as rien voulu voir, lorsque je suis arrivé et que Akh s'est présenté face à moi, j'ai tout de suite compris que le véritable adversaire était toi. Alors je lui ai demandé de quitter les lieux, chose qu'il a refusée en m'attaquant. Après lui avoir cassé sa main droite, je lui ai tout de suite infligé l'Illusion, donc l'attaque qu'il était censé me porter, il se l'est portée lui-même. Je n'ai même pas bougé…
_Je comprends… Alors lorsque j'ai cru que tu étais sorti indemne du Crépuscule Incandescent en vérité tu n'avais pas porté l'Illusion contre Akh…
_Exact, à ce moment là le coup était dirigé contre toi, Horus. Ensuite je n'avais plus qu'à vous regarder vous entretuer.
_Phénix… Tu as donc acquis le don de pouvoir manipuler les Dieux…
_Je ne manipule personne. J'évite juste que des êtres, comme toi, plantent leur venin dans le dos de ceux que je dois protéger…
_Qu'est-ce que tu dis, Ikki ! ? fit Horus effrayé.
_Je te l'ai dit, Gardien Céleste, je suis au courant de tout, et même plus que tu ne le crois !

L'homme au statut Divin portant sur ses épaules les habits sacrés du Faucon en lapis-lazuli se mit sur ses deux jambes et arbora une position offensive. Paré au combat. Mais avant, il se prononça.

_Tu ne peux pas rivaliser avec moi, Chevalier de Bronze, tu n'as fait qu'apercevoir la voie des sens qui permettent de rivaliser avec les Dieux… De plus tu ne connais rien des règles de ce monde ! Tu ne connais pas ton véritable statut !
_Tu veux sans doute parler de ce que tu appelles le " sens de l'existence ", ou alors ce qu'on s'entête à appeler ici " Le véritable but de la chevalerie " !
_Comment… ! ?
_Tu savais parfaitement ce que tu faisais en libérant Kanon et Rhadamanthe du sommeil dans lequel ils étaient plongés. Tu savais qu'ils avaient l'habitude de travailler seuls, de ne recevoir d'ordres de personne ! Alors tout s'était déroulé selon ton plan : tu leur as révélé l'existence des Clés Divines, ou ce que l'on appelle les Joyaux de l'Olympe. Tu as envoyé le Spectre du Wyvern à Delphes, où il servirait d'appât aux éventuels serviteurs d'Hadès, rescapés de la précédente Guerre Sainte… Tu as envoyé Kanon exécuter Actéon, tu savais quelle serait l'unique issue de cet affrontement ! Mais tu vois, le frère de Saga avait déjoué ton stratagème depuis le début ! Et il était même prêt à mourir pour accomplir son Ultime Devoir !
_Alors tu saurais vraiment toute la vérité, Ikki… Je n'ai plus rien à t'apprendre.
_Avant que tu ne disparaisses je vais te confier une chose, que seuls les Chevaliers d'Athéna sont disposés à savoir : lorsqu'un Chevalier d'Or affronte un autre Chevalier d'Or, ils engagent un combat de mille jours et mille nuits, et lorsqu'un l'un d'eux péri par la main de l'un de ses pairs… Sais-tu ce qu'il advient ?
_Je ne comprends pas, s'écria Horus, c'est Melkor qui a tué Kanon !
_C'est là que tu fais erreur ! Kanon s'est laissé tuer par Milo ! Et de cette façon Melkor reçut assez de dommages pour que Tityos cesse son envoûtement sur lui !
_Tant pis, alors… Tityos, seul, ne pourra jamais vaincre Shaka… Et Melkor se joindra sans doute à la troupe des Saints d'Athéna… Mais de toute manière personne ne sera assez puissant pour me barrer la route, une fois que j'aurais accompli mon Plan ! Les deux camps vont s'affaiblir peu à peu et la Déesse Isis pourra enfin régner sur les Douze Cités !
_Il y a une chose qui semble t'échapper, ou que tu fais semblant d'ignorer… soupira Ikki.
_Parle !
_Souviens-toi de la bataille du Sanctuaire, lorsque Seiya, Hyoga, Shiryu, Shun et moi essayions de traverser les Douze Maisons du Zodiaque sur Terre… Nous dûmes envisager de payer cette bataille de nos vies, mais nous avions pris les vies de certains Chevaliers Dorés. Lorsque Shaka sentit qu'il serait défait, il avait tout de suite commencé la procédure… Mais elle fut interrompue, car il reconnut son erreur de me barrer le chemin et se ravisa, me sauvant même d'une errance certaine dans les limbes… Ensuite, lorsque Shura périt par l'Ultime Dragon de Shiryu, il lui transmit son épée, son armure et son âme. Lorsque Camus périt par l'Ultime Attaque de Hyoga il lui donna son Ultime Leçon de glace, il lui transmit tout son savoir… Lorsque Aphrodite trouva la mort face à Shun, il lui administra également un coup mortel, certes, par la Rose Blanche, mais dans cette Rose vivait aussi son âme. Et si les Bronzes survivaient à l'épreuve des Douze Maisons, alors ils auraient acquis la puissance et la connaissance de leurs victimes… C'est un phénomène tout à fait naturel et actif depuis des millénaires : Le Transfert !
_Je ne peux le croire ! Milo aurait acquis assez de puissance pour terrasser les Dieux !
_Je ne sais pas s'il va terrasser les Dieux, mais en tout cas, Kanon vit désormais en lui, tout comme Camus qui vit en Hyoga, comme Shura vit en Shiryu et Aioros qui…
_Silence ! Ce n'est pas possible ! C'est Athéna qui m'a eu ! Elle est encore plus perfide que les pires vermines qui pourrissent au Tartare !
_Tu iras méditer sur tes insultes dans les Limbes, Horus !
_Je cracherai sur ton cadavre, Ikki !

L'aura de Ikki dominait largement celle de son opposant. A croire que même les Dieux n'acceptaient la présence d'un sournois sur leurs Terres Sacrées. L'armure de la Divination, représentant le Faucon, quitta Horus. Ce dernier dut passer à l'offensive sans protection corporelle.

_Momification ! hurla Horus.

Mais les bandelettes qu'il envoya sur le Phénix se dissipèrent et brûlèrent comme du papier au contact des flammes ardentes dégagées par le Bronze. Et le corps mi-homme, mi-spectre de Horus se fit bientôt dévorer.

_Par les Ailes du Phénix ! hurla Ikki.

Le tourbillon de feu projeté par le Saint d'Athéna fut fatal au Gardien Céleste qui s'écrasa à terre, après avoir heurté le plafond du Temple. Trop facile. Aucun doute pour le Bronze : une présence divine l'accompagnait durant son combat. Il était pertinemment au courant de la puissance que pouvaient atteindre les Gardes Célestes de Zeus. On disait qu'ils étaient au-dessus des Chevaliers d'Or d'Athéna. En particulier, Melkor, Gardien Céleste de la Force. Il fallait qu'il rencontre ce Guerrier, au moins une fois.

Soudain les habits de lapis-lazuli recouvrant le Gardien Céleste de la Divination vinrent se fondre avec l'armure du Phénix. Ikki n'en croyait pas ses yeux. Comment deux armures différentes pouvaient elles s'unifier ? Et pourtant l'incroyable faisait bien partie de la réalité. Il était désormais, Ikki, Gardien Céleste de la Cité d'Athéna de l'Immortalité ! Le Quatorzième Gardien était arrivé, le Treizième n'était autre que son frère Shun… Shun !


Aux abords de la Cité Céleste d'Athéna :

Le Treizième Gardien Lunaire, anciennement Shun d'Andromède, se dirigeait prestement vers le lieu de toutes les rencontres heureuses, et moins heureuses : le Sanctuaire Céleste d'Athéna ! Il sentait les cosmos s'entrechoquer à cet endroit. Mais récemment une aura particulière attira son attention, elle provenait de la Lune d'Artémis. Des rumeurs couraient qu'un Temple Egyptien, faisant office de cachot, s'y tenait non loin…

Le Saint du Verseau accompagnait son frère d'armes de toujours. Il avait le regard déterminé et fixe, comme si la tournure des événements était certaine, comme si l'avenir était déjà écrit. Sa récente épreuve face à ses péchés capitaux grava en lui la direction à prendre, un fois sur place, en face de… lui.

Lorsqu'ils arrivèrent pratiquement aux pieds du Domaine Sacré, parmi les débris des colonnes de pierre et de la végétation dévastée par des luttes récentes, ils virent sous un éclat solaire éblouissant la lueur d'une armure d'or. Interloqués, ils se dirigèrent vers elle. La lueur de l'armure se changea vite en une personne qu'ils connaissaient parfaitement. Shiryu de la Balance gisait à terre, inconscient. Ses boucliers étaient encore fumants des assauts subis. Shun tenta de le réveiller en relevant légèrement sa tête, car le Libra Saint était couché sur le dos. L'héritier de Dokho finit par ouvrir les yeux. Et lorsqu'il vit la couleur et les reliures de l'armure de Shun, il sursauta d'un bond.

_Arrière, démon ! cria-t-il épouvanté.
_Shiryu… ? marmonna Shun, étonné.
_Que t'arrive-t-il, Chevalier de la Balance ? dit Hyoga sur un ton ferme.

Shiryu reprit ses esprits et baissa sa garde. Haletant, il posa un genou à terre. Il en profita pour examiner l'habit en lapis-lazuli de Shun.

_Shun… je n'arrive pas à croire que ce soit toi, dit Shiryu, tu portes exactement la même couleur d'armure que les lâches qui nous ont attaqué…
_Oui, je comprends que tu fasses la confusion, dit Shun, c'est l'armure du Gardien Lunaire de l'Innocence que je porte sur moi, elle va me permettre de faire face à l'Ombre. Certains des Gardiens Lunaires se sont laissés corrompre par le vil… Mais Hypnos, autrefois au service d'Hadès, m'a permis d'endosser ces habits sacrés des Cinquante Guerriers de Zeus…
_Il est connu sous le nom de Xénios, désormais, rajouta Hyoga, il est un Gardien Lunaire, celui de la Lune du Sommeil. Il nous fit passer des épreuves où nous eûmes accès à la connaissance… Maintenant, nous sommes censés être prêts…
_Je croyais que vous étiez avec le Grand Pope en direction d'Héraclite ? dit Shiryu.
_Il nous ordonna de nous rendre vers Athéna… répondit Hyoga.
_Nous avions senti ton cosmos dégager des ondes très basses… reprit Shun. Aurais-tu livré combat à plusieurs combattants vêtus de lapis-lazuli de l'arène d'Héraclite jusqu'ici ?
_J'ai du combattre Stella de Cassiopée, l'armure censée demeurer sur l'île d'Andromède restait introuvable pendant 250 ans car sa propriétaire s'était réfugiée ici, en Olympe. A la fin de notre affrontement elle a choisi de se donner la mort… Ensuite Fenrir d'Epsilon m'avait rejoint et me confia que j'étais attendu ici, à la Cité d'Athéna et qu'il me servirait d'escorte, mais…
_Shiryu… ? dit Shun en essayant de capter le regarde son ami.
_Mais des forces obscures nous sont tombées dessus et il disparut pendant que j'affrontais des Guerriers vêtus de lapis-lazuli… Tous ceux que je rencontre meurent… amis ou ennemis, mais je ferais tout pour que ça ne se reproduise plus ! dit Shiryu en se relevant.

Hyoga lui tourna le dos et commença à se diriger vers les marches du Sanctuaire menant à la Première Maison du Zodiaque de la Cité Céleste d'Athéna. Une fois parcourus une dizaine de mètres, il s'arrêta et après une longue inspiration d'air et un hochement de la tête, il se confia à ses frères d'armes.

_Vous n'êtes pas encore prêts, je le regrette…
_Comment ? Hyoga ! Que dis-tu ? cria Shun stupéfait.
_Je n'arrive pas à croire ce que j'entends ! dit Shiryu sur un ton sévère.
_N'essayez pas de me suivre, votre devoir est de rester ici, ne vous en mêlez pas…

Sur cet avertissement, le Chevalier du Verseau réitéra sa marche. Mais ses deux compagnons n'écoutèrent pas ses conseils et tentèrent de le rattraper.

_Qu'est-ce que tu racontes, Hyoga ? reprit Shiryu, es-tu devenu fou ! ?
_Tu plaisantes… ? fit Shun loin d'être rassuré.
_Je suis désolé… dit Hyoga.

Un cosmos se manifesta. Il émanait du Chevalier du Verseau. Le Gardien Céleste de l'Innocence et le Libra Saint se mirent sur leurs gardes. Mais la surprise ne fut que plus belle lorsqu'ils découvrirent qu'ils ne pouvaient plus bouger leurs membres inférieurs. Une couche de glace commençait à recouvrir leurs jambes et les fixer au sol gelé. Très vite, le froid intense gagna les autres parties du leurs corps avant qu'ils ne purent prononcer un mot de surprise, ou de stupéfaction. Shun et Shiryu se virent enfermés dans une glace cristalline, réputée indestructible tels les glaciers millénaires de Sibérie. Même le Soleil de l'Olympe, qui parcourait des ses rayons les statues de glace, ne pouvait les faire fondre, sinon se contenter de se refléter en elles.

_Je suis désolé de décider ainsi pour vous, mes frères… Je suis désolé de vous sauver la vie… termina Hyoga.

La froideur se projetait dans les miroirs de glace humains. Car l'hériter de Camus gravissait les marches menant au Premier Rempart du Sanctuaire.

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Cette fiction est copyright Eldar Fattakhov.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.