Chapitre 4


Sibérie de l'Est…

Assis au milieu d'une étendue de neige blanche, à peine troublée çà et là par quelques rochers et plans d'eau, deux chevaliers parmi les plus puissants de l'ordre d'Athéna étaient en train de discuter. A l'horizon, le millénaire mur des glaces éternelles semblait veiller sur cette contrée si belle, encore vierge et sauvage... Le vent était tombé, la température était fraîche, mais pas vraiment froide... Vivifiante plutôt. Le lieu aurait en temps normal inspiré aux deux chevaliers un profond sentiment de calme, de paix et de sérénité. En temps normal...

- Maman les p'tits bateaux...

Nageant dans l'eau glaciale d'un petit lac, l'unique disciple du Chevalier d'Or de la Vierge s'amusait avec une bouée improvisée (un morceau de glace) tandis que son ami Albi essayait tant bien que mal de survivre à la température de l'eau, claquant des dents et tremblant comme de la gélatine.
A deux pas de là, leurs maîtres tenaient une conversation animée :

Camus : Increvables... Mais comment va-t-on réussir à s'en débarrasser ?

Le Chevalier du Verseau jeta un coup d'œil du côté du lac où Albi était enfin parvenu à surmonter le froid, et tentait de rejoindre Peg, lequel continuait de s'amuser.

Shaka : Il faut pourtant agir maintenant... L'occasion est trop belle, jamais personne ne nous soupçonnera s'ils meurent en même temps.
Camus : Mais si nous les ratons encore, ils vont peut-être finir par se douter de quelque chose... Et imagine qu'ils racontent tout ce qui leur est arrivé à quelqu'un du Sanctuaire ?

Le terme "Sanctuaire" sembla subitement lui donner une idée.

Albi : Touché ! C'est toi qui va au milieu !
Shaka : Qu'est-ce qu'il y a ? Tu sembles pris d'une inspiration soudaine.
Camus : Je viens de penser à quelque chose. Si jamais ils survivent encore (prononcer cette phrase lui coûta un immense effort), ça semblera effectivement étrange qu'ils aient frôlé la mort autant de fois. Mais ça le paraîtra moins si c'est en ayant subi deux entraînements différents.

Le Chevalier de la Vierge comprit immédiatement où son frère d'arme voulait en venir.

Peg : Aaah !!! Albi, ma main, ma main !
Shaka : Tu veux les amener au Sanctuaire ?
Camus : Oui. Ecoute, je te propose ceci : tu retournes là-bas, et je vais tenter une dernière fois de me débarrasser de nos disciples. Si par malheur, mais c'est absolument impensable, ça devait rater, je te rejoindrais avec ces deux parasites et on se chargerait de les occire là-bas.

A la prononciation du mot "occire", les deux chevaliers eurent un regard empli d'un sadisme qui aurait terrifié Masque de Mort lui-même...


Même endroit, quelques instants plus tard...

Alors que leurs maîtres s'en étaient retourné vers la cabane de Camus en leur ordonnant d'attendre ce dernier, Peg et Albi étaient sortis de l'eau, et s'étaient assis en admirant au loin le mur de glace qui dominait l'horizon...

Peg : Dis Albi... Tu as déjà eu un co-disciple, toi ?

La question sembla surprendre son ami.

Albi : Eh bien... En fait oui, et toi ?
Peg : Ben non, jamais. Pourtant j'aurais bien aimé.
Albi : Moi j'en ai eu deux, Andrea - tu te souviens, on l'avait rencontrée à Paris - mais elle ne s'entraîne pas en Sibérie. Et l'autre il s'appelait Isaak, et il voulait obtenir l'Armure du Cygne. Camus me disait qu'il avait encore un an avant de réussir l'épreuve qui lui permettrait d'obtenir cette dernière, mais bizarrement quand je suis arrivé, il a brûlé toutes les étapes et il y est arrivé en un mois ! Camus paraissait surpris, mais il était ravi.
Peg : Vous parliez souvent ensemble ? Et qu'est-ce qu'il est devenu ?
Albi : Moi j'allais le voir dès que j'avais du temps libre, mais à la fin il devenait vraiment très difficile à trouver. Et en plus il n'arrêtait pas de s'entraîner, même pendant les pauses, alors je le voyais moins souvent.
" Un jour il a obtenu l'Armure du Cygne, en brisant le mur des glaces éternelles. Le lendemain, il a disparu. Camus était désespéré. On ne l'a jamais retrouvé, et personne ne sait où il est parti.
Peg : Bah, peut-être qu'un jour on le reverra...


Quelque part, entre la Sibérie et le Sanctuaire...

- Pauvre Camus...

Shaka trouvait à cet instant le Chevalier du Verseau bien à plaindre...
Ils s'étaient tous les deux mis d'accord une fois revenus dans la cabane en bois. Camus lui avait exposé son plan : soumettre Peg et Albi à l'épreuve du mur des glaces éternelles. Même si l'idée semblait bonne, l'instinct du Chevalier de la Vierge lui disait qu'il ne tarderait pas à revoir le disciple qu'il détestait...

-Pauvre Camus...


Mur des glaces éternelles...

Albi : Mais... Maître, vous êtes sûr ? Notre apprentissage est encore loin d'être terminé !

Camus faillit s'évanouir à ces mots, mais il tint bon.

Camus : Ne discutez pas, vous en êtes tout à fait capables !

Peg regarda son co-disciple d'un jour, incrédule :

Peg : Euh... Vous en êtes vraiment sûr ?
Camus : Parfaitement !
Albi : Bon allez, d'accord !
Camus : A la bonne heure !
Albi : Je vais chercher la dynamite !
Peg : Et moi je m'occupe du détonateur !

Ils commencèrent alors à s'éloigner, mais le regard assassin de Camus les cloua sur place.

Camus : On ne bouge plus... C'est à la force de votre Cosmos que vous y arriverez, et pas autrement ! Maintenant je vous laisse, tâchez de réduire ce mur en un tas de neige !

Sur ces mots, le Chevalier du Verseau s'éloigna. Du moins il sembla s'éloigner, car en réalité, il comptait se rendre derrière la montagne de glace, là où Peg et Albi ne pourraient pas le voir. La silhouette de Camus disparut et ces derniers étaient perplexes.

Peg : Euh... Tu sais comment on doit faire ?
Albi : Ben... Je crois qu'il faut donner un coup de poing très fort... A toi l'honneur.
Peg : Non non, je t'en prie.
Albi : Mais non, après toi.
Peg : Je n'en ferai rien voyons.
Albi : J'insiste.
Peg : Moi aussi.

Leurs maîtres auraient été désespérés.
Les deux garçons continuèrent à se chamailler un moment, puis ils résolurent finalement de frapper ensemble.
Prenant une grande inspiration... :

Peg & Albi : Yaaaaaaaaaa... Aaaaaaaaaaaïe !!!!!!!

De toute leur force, les deux compères avaient frappé la glace, mais ils n'avaient même pas ébréché le mur et leur main était en sang.

Peg & Albi : Ouiiiiiiiin !!! Bobo !

Derrière, Camus s'affairait...

Albi : Bon... Je crois qu'en fait seul l'un d'entre nous peut y arriver. Alors…
Peg : Alors vas-y !
Albi : Mais pourquoi moi ?
Peg : Parce que c'est toi le disciple de Camus, parce que c'est toi qui t'entraîne ici, parce que c'est toi qui sais comment on détruit ce fichu mur, parce que...
Albi : D'accord d'accord ! C'est bon, je m'en occupe... Bouh...

Craintif, l'apprenti chevalier du froid s'approcha du mur. Se souvenant alors de l'instant ou Isaak avait passé cette épreuve, il tenta de l'imiter.

Albi : PAR LA... Eh ?

Avant même qu'il n'ait touché le mur, celui-ci s'était fissuré !

Peg : Bravo Albi ! Tu as réussi !
Albi : Mais je n'ai rien fait ! Eh, ATTENTION !!!

Alors, dans un fracas apocalyptique, glace et neige engloutirent les deux infortunés disciples...


Sortant de derrière le tas de neige fumant, Camus regarda l'endroit ou les deux apprentis venaient de trouver leur tombe. Il esquissa un sourire...

Camus : Enfin... Enfin ! ENFIN !!!

Et le cœur et l'esprit soudainement plus légers, il se dirigea vers sa demeure, le visage barré d'un sourire béat... Heureux comme il l'avait rarement été.
Plus au ciel qu'il était trop loin pour entendre les gémissements qui provenaient des entrailles de la terre...
Sous l'immense amoncellement de glace, les deux malheureux disciples étaient légèrement commotionnés, mais indemnes ! Toutefois leur situation d'enterrés vivants était des plus précaires... Ils faisaient des efforts aussi désespérés que vain pour s'en sortir, mais le temps leur était compté.
Alors que l'affolement commençait à les gagner, un rayon de lumière transperça l'épaisse couche de neige… Un bruit de respiration animale se fit entendre, et une truffe familière pointa...

Albi & Peg : GEKI !!!


Demeure de Camus…

Shaka : Tu as réussi ? Tu t'en es débarassé ?


Un sourire d'intense satisfaction commençait à se dessiner sur le visage du Chevalier de la Vierge, qui n'osait y croire. A plusieurs milliers de kilomètres de là, Camus arborait la même expression mêlée de soulagement et de jubilation, malgré l'extrême concentration qui était la leur en cet instant, car ils communiquaient via leur Cosmos.
Pendant quelques instants, aucun des deux n'osa plus rien dire, savourant en fermant les yeux - ce qui ne changeait guère de d'habitude pour Shaka - ce moment béni qu'ils avaient attendu si longtemps.
Puis la conversation reprit, le Cosmos des deux Chevaliers était tellement puissant que les paroles de l'un n'atteignaient pas seulement l'esprit de l'autre, mais résonnaient également dans sa maison.
Soudain quelque chose perturba le Chevalier de la Vierge. On aurait dit que Camus avait cessé de vivre... Le cœur de Shaka s'arrêta de battre à son tour lorsqu'il entendit les coups répétés qui semblaient frapper à la porte de la demeure du Chevalier du Verseau...
C'était comme s'ils avaient tous les deux partagé le même corps. Le gardien de la sixième maison sentait Camus trembler de tous ses membres, tandis qu'il se dirigeait lentement, très lentement vers la porte...
A travers le Cosmos de son frère d'arme, Shaka entendit alors deux voix.

Albi (juché avec Peg sur Geki) : Coucou maître !
Peg : On a réussi ! On a brisé le mur et Geki nous a sauvés !

***

De mémoire de Chevalier, jamais une telle chose n'était arrivée.
Mais l'étrangeté de l'événement n'était rien comparée à la terreur qu'il provoqua chez tous les habitants du domaine sacré.
Tous tremblaient encore quand le cri inhumain, empli de désespoir, eut cessé de résonner...
Tous sauf un.

Shaka : Pauvre Camus...

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Cette fiction est copyright Jean-Baptiste Landy et David Judenne.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.