Chapitre 1 : Rencontres


Quelque part dans les montagnes de l'Himalaya, une nuit d'orage. Le tonnerre gronde, des éclairs zèbrent le ciel étoilé, la pluie s'abat avec fracas. L'eau ruisselle sur le visage et le corps tout entier de Valkhan, fatigué de courir depuis tant d'années. Il fixe son adversaire. Quelques mètres devant lui, ce dernier est immobile : on ne saurait dire si la chasse l'a épuisé ou si le mauvais temps l'affecte d'une quelconque manière. L'eau coule sur son masque, ce masque qui n'a jamais changé d'expression depuis toutes ces années, ce masque noir aux lèvres carmin et satisfaites du sang dont elles semblent s'abreuver, ce masque au regard inquiétant et rougeoyant, le masque du diable. Le Chasseur fait un pas en direction de Valkhan, qui recule, hésitant, envahi par la peur de cet adversaire dont il ne sait rien mais qui pourtant devrait lui être si familier à présent. Il avance encore d'un pas, laissant échapper un soupir de satisfaction à peine perceptible. La vision du démon qui s'approche est déstabilisante, ce masque au rictus démoniaque, ce casque d'argent aux cornes de bouc, ce grand manteau gris et usé qui ne laisse s'échapper de ses manches trop longues que les impressionnantes griffes terminant ses doigts de démon. A présent, sa voix caverneuse résonne.

- On dirait bien que tout est fini, dit-il sans laisser passer la moindre expression, cette fois tu ne t'enfuiras plus, notre jeu est terminé. Tu sais maintenant que tu vas mourir. Echec au Roi !

Aussi vif que les éclairs qui déchirent le ciel, le Chasseur bondit, déterminé à planter ses griffes dans le corps de sa proie, comme il l'a déjà fait pour de nombreuses autres victimes. Valkhan ne bouge pas, comme paralysé par la terreur. Quand l'image d'une enfant s'impose à son esprit.

- Je n'ai pas le droit de l'abandonner, elle ne doit pas tomber entre les mains de ce monstre.

Aussi rapidement que le Chasseur a bondit, Valkhan réagit à la vitesse de la lumière, il charge son adversaire tout en ravivant une foi qui ne doit pas faillir. Le choc est cataclysmique, le Cosmos s'embrase alors et la montagne tout entière se met à trembler… Le combat entre les deux hommes vient d'entamer son ultime étape. Un seul en sortira vivant…





Janvier 2193, sur le sol humide d'une geôle sombre. Un petit garçon de sept ans, couvert de bleus, pieds nus, vêtus de haillons déchirés. Il ouvre un œil péniblement. Son corps tout entier est meurtri, il a mal. Il se relève au prix d'un immense effort, grimaçant de douleur en s'appuyant sur son pied blessé. Il observe tout autour de lui mais ne perçoit rien d'autre que le noir absolu et le silence. Il est seul à présent, ses bourreaux l'ont jeté dans ce qui semble être un cachot. L'obscurité ne l'effraie pas : il s'est toujours considéré comme un dur qui ne craint rien ni personne et cela s'était révélé juste jusqu'à présent. A l'orphelinat où il avait passé ses premières années, il avait toujours fait régner sa loi sur les autres enfants de son âge, il avait même souvent impressionné les plus grands par son obstination à revenir dans la bagarre… même couvert de bleus, de bosses, de pansements, ou encore avec un bras dans le plâtre…C'était avant. Avant que trois individus étranges ne s'introduisent dans sa chambre, trois adultes à en croire leur taille et leur carrure… Curieusement vêtus. Les trois hommes portaient une étrange tenue noire ainsi qu'un curieux masque rappelant la forme d'une chauve-souris. Ils l'avaient tiré de son lit après l'avoir bâillonné. Pourtant Néo ne s'était pas laissé faire ! Bien que privé de la possibilité de crier, il s'était débattu tandis que deux de ses ravisseurs essayaient de le ligoter. Il avait même réussi à libérer un de ses bras et à asséner un coup de poing au premier de ses adversaires, lui faisant relâcher son étreinte. Surpris, le second n'avait pas vu venir le coup de pied qui l'avait fait tomber à terre. Le vacarme produit par les gesticulations du garçon, la chute et les jurons de ses adversaires avaient attiré l'attention, et la lumière du couloir adjacent à la chambre s'était allumée. Le troisième homme s'était alors rué sur lui et lui avait flanqué une gifle magistrale, avant de le saisir et de foncer sur la fenêtre, laquelle avait volé en éclats. Néo n'avait pas eu le temps de penser qu'il était en train de franchir la fenêtre du troisième étage que l'homme était déjà retombé à terre… sur ses pieds… et qu'il se mettait à courir, le gamin sous un bras, s'enfonçant dans les ténèbres de la nuit, suivi de ses deux acolytes qui avaient visiblement emprunté le même chemin. Comme il se débattait rageusement, le ravisseur lui avait asséné plusieurs coups de poing dont les marques allaient s'ajouter aux conséquences des morceaux de verre qui l'avait couvert d'égratignures et déchiré son pyjama en de nombreux endroits.
Dans sa cellule, Néo se souvient. Il passe sa main dans sa chevelure blonde ébouriffée, laisse échapper un "aïe ! " en rencontrant une grosse bosse, sans doute responsable de sa perte de conscience. Petit à petit, alors qu'il arpente l'espace réduit de sa prison, il s'interroge. Pourquoi se trouve-t-il ici ? Et quel sort l'attend désormais ?
Un bruit de cadenas, un rayon de lumière. La porte s'ouvre. Deux ombres se tiennent dans l'encadrement, portant quelque chose qu'elles jettent à terre au milieu de la cellule… un autre enfant. Néo se met à courir vers l'issue mais celle-ci s'est déjà refermée. Un mince filet de lumière passe sous le seuil désormais, les geôliers n'ayant pas éteint ce qui doit être le couloir menant au cachot. Néo se penche au-dessus du nouveau venu : un compagnon de cellule. L'enfant étendu est en pyjama mais celui-ci n'a pas souffert, contrairement au sien. Il a une belle chevelure noire tirée en arrière et coiffée en une longue tresse, sa peau est blanche et pure, sa beauté est presque troublante ; il doit avoir à peu près le même âge que lui. Le nouveau venu se relève et plonge son regard d'un bleu profond dans les yeux marrons de Néo. Puis il s'assied le long d'une paroi, rapprochant ses jambes pliées contre son corps, les entourant de ses bras puis saisissant ses pieds dans ses mains comme pour les réchauffer, sans mot dire. Néo le regarde. Le premier, il brise l'ambiance étrange et inquiétante de la situation par une question des plus banales.

- Comment… Comment tu t'appelles ?

Le garçon au visage angélique relève la tête à nouveau pour regarder son interlocuteur, qui visiblement impatient, réitère sa question.

- Je t'ai demandé comment tu t'appelles, t'as pas de langue ? Moi c'est Néo !

Un frisson parcourt l'enfant à la tresse, comme effrayé par cette soudaine agressivité. Se rendant compte des conséquences de son attitude, Néo agite ses bras et ses jambes frénétiquement avant de reprendre précipitamment.

- Eh ! Calme-toi, n'aie pas peur, je vais pas te manger, j'ai pas voulu t'impressionner, je disais ça comme ça, pour faire connaissance, je me suis dit qu'on devait être dans la même galère, alors que si on se parlait, on pourrait peut-être trouver un moyen de s'évader ensemble parce que tu vois, j'ai pas l'intention de moisir ici. Moi ils me font pas peur, les trois tarés dans leur costume de Batman…
- Ils ne sont pas que trois, l'interrompt timidement le garçon à la tresse.
- Hé, mais tu parles ! Génial ! Et tu dis qu'ils sont pas que trois, tu vois notre collaboration a déjà commencé parce que tu viens de me donner une précieuse information pour notre évasion. Alors ils sont combien ? Et toi t'as peut-être pu observer la disposition des lieux - as-tu remarqué que je m'exprimais vachement bien pour mon âge ? - parce que moi en fait, ils ont été obligés de me mettre KO pour m'amener ici. Tu comprends, je suis pas du genre à me laisser faire et ils ont eu du fil à retordre avec moi, ça je peux te le dire… Bon sinon, tu sais peut-être ce qu'ils veulent faire de nous, est-ce qu'ils veulent nous vendre, nous manger - non ça c'est dans les histoires - nous voiler… euh non c'est violer mais je sais pas ce que ça veut dire, seulement que c'est un crime… ou même nous tuer ou demander une rançon, peut-être que eux connaissent mes vrais parents, qu'ils sont riches parce que tu vois, je connais pas mes parents, je viens de l'orphelinat…
- Moi aussi, je suis orphelin…
- Waoh ! Toi aussi, alors c'est sûrement des trafiquants d'orphelins, ils ont dû se dire que personne ne nous réclamerait !
- Euh dis…
- Alors attends un peu, mais t'as pas répondu à mes questions ? Combien ils sont ? Comment c'est fichu ?
- Ben disons que…
- Que quoi ?
- STOP ! crie alors le garçon aux cheveux noirs. Si tu me laissais parler, je pourrais te répondre !

Surpris, Néo recule d'un pas, gêné, baissant la tête, regardant ses pieds, puis son pantalon de pyjama, alors il redresse vivement la tête avec un large sourire avant de reprendre la parole.

- Avant que tu me dises que j'ai mis mon pantalon à l'envers, je te rassure, je l'ai fait exprès parce qu'il était déchiré au niveau du zizi alors je l'ai changé de sens, je préfère qu'on voit mes fesses, tu comprends… euh bon d'accord tu t'en fiches, t'as sûrement raison, je te laisse parler.

Visiblement soulagé de l'arrêt de son moulin à paroles de compagnon, et après avoir constaté que le pantalon de pyjama déchiré de Néo est effectivement à l'envers, le garçon à la tresse prend timidement la parole.

- Je m'appelle Issa… Hier, deux hommes en noir…
- Ca y est j'ai pigé, des hommes en noir, c'est des martiens, reprend-il tandis qu'Issa affiche une certaine lassitude dans son regard. Euh… pardon… je t'interromps plus.
- Euh oui, deux hommes en noir m'ont attaché pendant que je dormais. Après, ils m'ont emmené dans une voiture. On a roulé longtemps. On a pris un avion. Puis encore une voiture… Je crois qu'on a voyagé pendant toute une journée…
- Toute une journée, mais tu viens de drôlement loin alors ! Eh ! Mais si ça se trouve moi aussi ils m'ont trimbalé toute une journée…

A ce moment précis, l'estomac de Néo se manifeste bruyamment, et le garçon prend alors une mine déconfite puis un air indigné.

- Et ils nous ont rien donner à bouffer ! Les salauds ! J'ai faim !
- Euh… moi ils m'ont donné à manger, l'interrompt Issa.
- Quoi, mais c'est dégueulasse, pourquoi ils m'ont rien donné, à moi. J'AI FAIM ! VOUS ENTENDEZ ! DONNEZ-MOI A MANGER !

Néo frappe la porte de la cellule de ses deux poings, en vain, personne ne venant lui apporter à manger, puis il se tourne à nouveau vers Issa, qui esquisse un sourire. Néo lui lance un regard outré tandis qu'il reprend la parole.

- Tu avais raison… On voit tes fesses.
- Oui bon pas de quoi en faire un plat ! Hum… Tu disais ?
- On est dans un vieux bâtiment. C'est dans la forêt. Il y a des montagnes autour. Je connais pas cet endroit. Quand on est rentré il y avait plein d'autres hommes en noir, au moins dix. Il y en avait un qui était différent, il était pas en noir. Il avait une drôle d'armure qui brillait. J'ai vu sa figure, il avait l'air jeune : peut-être dix-huit ans. Il faisait moins peur, mais pourtant…
- Mais pourtant quoi ? C'est sûrement le chef…
- Je sais pas… Il me plaisait pas.
- Pourquoi ? Il est moche ? C'est pas très important, tu sais !
- Non, il était même assez beau, mais c'était bizarre. Après ils m'ont amené au sous-sol. J'ai vu qu'il y avait une autre cellule. Ils ont dit qu'il y avait d'autres enfants dedans.
- Intéressant, ça fait des alliés, mais il faudrait qu'on réussisse à communiquer avec eux.

Affichant un sourire de satisfaction, Néo scrute la pièce attentivement puis se dirige vers un pan de mur, il lève la tête. Puis il se tourne vers Issa, bombant le torse, l'air triomphant

- Regarde, une grille d'aération, si je monte sur tes épaules, je peux l'atteindre, et je peux essayer de leur parler par-là !
- Non, ça marchera pas, leur cellule est de l'autre côté.

La mine de Néo passe du triomphe à la déconfiture. Déçu que son plan ne puisse pas fonctionner, il traverse le cachot jusqu'au pan de mur opposé, constatant désespérément l'absence de grille d'aération dans celui-ci. C'est à ce moment que le bruit du cadenas se fait à nouveau entendre. La porte s'ouvre, un homme en noir jette trois morceaux de pain rassis, tandis qu'un autre fait signe à un jeune garçon debout devant lui d'entrer. Visiblement, un troisième occupant était prévu au programme. Le garçon s'avance, baissant la tête, les cheveux clairs très courts, presque rasés, vêtu d'un sari et chaussé de sandales. Derrière lui, la porte se referme. Il lève la tête, révélant ainsi une origine asiatique peu prononcée, observant les silhouettes de ses deux compagnons de cellule dans la pénombre. Ses yeux verts sont remplis de l'expression du désespoir, il retient ses larmes. Néo s'approche de lui, serrant son poing.

- T'en fais pas petit gars, je vais nous sortir de là, je te le garantis, foi de Néo. Mais avant… faut que je mange !

Néo ramasse les morceaux de pain et tout en manquant de se casser les dents en mordant l'un d'eux, il en jette un aux pieds d'Issa, puis tend le dernier au nouveau venu.

- Tiens, c'est pas bon et c'est dur, mais c'est mieux que rien, ça te redonnera des forces, on en aura besoin. Je m'appelle Néo, le beau gosse derrière c'est Issa, et toi, c'est quoi ton nom ?

Le jeune garçon prend délicatement le pain, l'observe un moment avant de le porter délicatement à sa bouche, puis après avoir mangé un morceau de mie, il regarde Néo, reconnaissant.

- Merci, je m'appelle Shin.




Quatre hommes rassemblés autour d'une table, des verres et une bouteille d'alcool vides. Une porte s'ouvre. Un personnage de belle stature au physique agréable s'introduit dans la pièce. Une armure étincelante resplendit de mille feux sur son corps. Il écarte sa cape blanche d'un bras tout en s'approchant de ses subalternes. Les hommes en noir se sont levés à l'approche de celui dont le rang impose qu'ils fassent preuve du plus grand respect : on ne peut pas se permettre de déplaire au fidèle représentant du maître. Le Chevalier balaie la pièce d'un regard, un regard qui se pose ensuite sur chacun des hommes.

- Le dernier groupe est sur le point de rentrer. J'ai averti le maître du bon déroulement de notre mission. Tenez-vous prêts à le recevoir, il m'a fait savoir qu'il comptait s'assurer que tout s'est effectivement passé comme il le voulait. Montrez-vous dignes devant lui. Yod ! Tu étais chargé de la mise en place de l'opération, c'est toi qui feras le rapport au maître.

Le dénommé Yod déglutit discrètement à l'annonce de sa délicate mission, la pensée de devoir faire son rapport au maître l'effraie… le terrifie même. Tout le monde le craint et lui plus que les autres car il le connaît sous un jour dont peu se doutent. S'il le décevait d'une quelconque manière… il n'ose encore imaginer ce qui lui arriverait. Tremblant de tous ses membres, Yod regarde le Chevalier s'éloigner et sortir de la pièce, puis il se laisse retomber sur sa chaise, sous le regard soulagé de ses compagnons.




Une cellule sombre où trois garçons font connaissance. Apparemment Shin vient lui aussi d'un orphelinat situé assez loin de ceux d'Issa et de Néo. Tous les trois sont assez surpris de voir qu'ils viennent d'horizons très différents. Shin vient du Japon mais pense que son père (qu'il n'a jamais connu) était européen, ce qui explique que ses traits orientaux ne sont pas plus prononcés. Issa est quant à lui originaire d'Italie et Néo vient du Danemark. Ce dernier tourne en rond, Issa toujours assis se tenant les pieds, Shin ne quittant pas la porte des yeux, espérant la voir s'ouvrir et en surgir quelqu'un qui viendrait les sauver. La police peut-être ? Du bruit dans le couloir, des cris animés d'une colère indescriptible.

- Lâchez-moi, je veux rester avec ma sœur ! Non !

Puis les cris se font plus lointains et inaudibles. La porte s'ouvre à nouveau. Deux hommes en noir poussent un autre enfant. Stupéfaction ! Néo précipite ses mains devant son sexe puis soupire. " Ouf ! Heureusement que j'ai mis mon pyjama à l'envers. " C'est une fille ! Ne s'attendant pas à telle compagnie, le trio ne remarque même pas la porte se refermer derrière elle. Malgré ses cheveux châtains coupés très courts, il n'y a aucun doute quant à son appartenance à l'étrange caste des représentants du sexe féminin. Un visage angélique, de beaux yeux pers pétillants. Elle est curieusement vêtue, une tunique et un pantalon de toile fourré de couleur brune, ainsi que des bottes noires sales et éprouvées. Elle regarde alors les trois garçons puis s'adresse à eux solennellement.

- Il n'est pas question qu'on reste ici. Rassurez-vous, mon frère dans la cellule d'à côté va nous faire évader… si vous êtes d'accord pour ne pas rester ici.
- C'est bien beau tout ça, réplique Néo tout en tournant autour de la nouvelle venue, mais on n'a pas attendu ton frère pour penser à notre évasion. Et pourquoi il serait plus malin que nous ? Mademoiselle vient d'arriver et déjà elle veut faire sa " commandeuse ".
- Ton pantalon est à l'envers, et même s'il fait sombre, laisse-moi te dire qu'on voit tes fesses. Désolée de te décevoir, mais tu m'as l'air plutôt ridicule et si je dois attendre qu'un preux chevalier les fesses à l'air me tire de ce mauvais pas… je risque d'attendre longtemps.

Rougissant comme une tomate en une fraction de seconde, Néo précipite ses mains sur son postérieur afin de dissimuler la déchirure de son pantalon. Puis, réfrénant un grognement, il s'adosse au mur.

- Je n'ai pas voulu paraître désagréable, reprend-elle, or je sais qu'il n'est pas donné à tout le monde de s'échapper d'une prison. Mais j'ai confiance en mon frère, il s'appelle Vicky et il est très débrouillard. Vous verrez qu'il va nous sortir de là. Et si je peux te donner un conseil d'ami, fait-elle remarquer à Néo, tu as une vilaine plaie sur le pied, et crois-moi, tu devrais la soigner avant qu'elle ne s'infecte.
- Quoi ? Mais je fais comment ?
- Mon père m'a appris à soigner les gens, je peux le faire si tu veux.

Incrédule, Néo scrute la petite fille, puis après un instant d'hésitation, il se rapproche, mettant en avant son pied blessé.

- Bon d'accord, même si ça fait mal, j'ai pas peur.
- T'en fais pas, ça ne fera pas mal.

La petite fille fait un signe à Néo pour qu'il s'asseye, puis prend son pied dans sa main. Eberlué, Néo ne distingue pas clairement ce qu'elle est en train de faire, on dirait qu'elle suce sa plaie. Puis elle verse de l'eau d'une petite flasque qu'elle devait porter dans une poche avant de finir de panser la plaie avec un mouchoir. A la fin de l'opération, elle lève la tête en souriant.

- C'est fini, ça ne craint plus rien à présent, mais je demanderai à mon père de te faire un meilleur pansement quand Vicky nous aura fait évader et que nous l'aurons retrouvé.
- Ton père ! s'exclament les trois garçons. Tu n'es pas orpheline ?
- Orpheline ? reprend-elle étonnée. Bien sûr que non. Mon père est vivant. Vous semblez surpris. Vous êtes tous orphelins ?

Les trois garçons hochent la tête en signe d'approbation.

- Désolée, je ne savais pas, se tournant vers Néo, et aussi pardon pour tout à l'heure.
- C'est rien, merci pour le pansement. Au fait, comment tu t'appelles ?
- Sandra, mon nom est Sandra.




Une nuit étoilée, une forêt au milieu des montagnes. Au sommet d'une petite colline, il scrute l'horizon. Son regard s'arrête enfin sur un bâtiment ancien perdu parmi les arbres avant de revenir se poser sur les montagnes lointaines.

- Tu es là, quelque part dans ces montagnes, je le sais, je suis sur le point de te trouver. Depuis combien de temps suis-je à tes trousses ? Six ans… oui six longues années… Peu importe tout cela sera bientôt fini. La partie sera achevée. En attendant, j'ai à faire, il me faut préparer la suite.

L'inquiétant personnage s'enfonce alors dans la forêt, se rapprochant inexorablement de la lugubre bâtisse où son premier rendez-vous de la journée l'attend. Alors qu'il progresse sous les arbres, d'étranges phénomènes se produisent au fur et à mesure qu'il avance, comme si à chacun de ses pas, la nature environnante reculait, comme si elle livrait un étrange combat contre cet être indésirable. Le chant des oiseaux cesse, les petits animaux se terrent immobiles comme frappés par une indicible frayeur, et même le vent semble craindre le visiteur. Une ombre traverse lentement le bois, son grand manteau gris ne laissant rien entrevoir de son corps si ce n'est ses longs doigts effilés dépassant de ses manches usées. Derrière lui, la nature reprend ses droits.
Lorsqu'il atteint enfin sa destination, l'homme lève la tête, baignant un étrange sourire figé à la lumière du soleil. Un sourire qui ne trahit aucune de ses émotions réelles. Son visage est couvert d'un masque noir, un masque au sourire inquiétant, les lèvres peintes d'un rouge dégoulinant comme si elles venaient de s'abreuver du sang frais d'une proie fraîchement dévorée. Un vampire ? Non. Sa chevelure aussi est cachée sous un casque argenté serti de deux cornes de bouc. Un diable ? Peut-être… ou peut-être pas. Lui se dit simplement être un chasseur en quête de proies judicieusement choisies pour satisfaire un goût inégalé pour le jeu… son jeu. Un chasseur ? Non… LE Chasseur !
Un murmure, un ricanement. Puis plus rien. Il n'est plus là, envolé, disparu. La nature reprend ses droits.




Les hypothèses de Néo se révèlent inexactes, car si lui et les autres garçons de la cellule sont orphelins, ce n'est pas le cas de Sandra. Certes, elle dit être orpheline de mère, mais son père est bien vivant et est certainement à la recherche de ses deux enfants, récemment enlevés par ces mystérieux hommes en noir. A moins que les ravisseurs n'aient commis une erreur, pensant que Sandra et Vicky n'avaient pas de père. Possible, pense Néo, parce que les méchants commettent souvent des erreurs.
Shin s'est assis à côté d'Issa, plongeant dans une intense rêverie. Il s'évade vers un paradis onirique, seule issue vraisemblable pour lui. Il ne partage ni l'optimisme de Sandra, à ses yeux infondé, ni les chimères de Néo, qu'il juge dérisoires. Il est intelligent et même pour son jeune âge il sait déjà faire preuve de réflexion associée à une certaine forme de sagesse et d'un étonnant sens de l'analyse. Et rien ne lui laisse ne serait-ce qu'entrevoir un dénouement positif. Maintenant qu'il n'est plus seul, il arrive à retenir ses larmes qui avaient trahi son désespoir lors de son arrivée, mais son état d'esprit n'a pas changé : il se sait condamné à un sort qu'il ignore, mais il craint qu'il soit terrible, fatal.
Assis à sa gauche, Issa paraît également plongé dans une profonde méditation. En fait, l'enfant ne pense même plus, le désespoir semble avoir laissé place à l'apathie. Lui non plus n'a pas vu d'issue favorable à la crise qu'il est en train de vivre. Pendant quelques instants, il a voulu croire aux espoirs de Néo, puis aux paroles de Sandra. Mais Néo ne trouve pas de moyen, et le frère de Sandra ne se manifeste pas… Une lueur surgit à nouveau, redonnant à ses yeux un éclat pétillant, il y a peut-être une chance… Sandra a un père. Il se rappelle les paroles de la petite fille à ce propos.

- Mon père sait faire plein de choses, c'est un voyageur, on a fait le tour du monde avec lui, c'est un véritable aventurier. Il n'a pas peur de traverser des endroits dangereux, des déserts, des marais, la jungle ou la banquise. Il peut faire peur aux animaux dangereux pour les mettre en fuite, et il a même déjà combattu des bêtes féroces, des ours et des lions. Il sait soigner les blessures, et même les maladies. Et il est capable de bien d'autres exploits, je n'ai jamais vu d'homme aussi fort que lui…

La petite fille en rajoute sûrement, pense Issa, mais après tout, peut-être que leur seul espoir réside en cet homme. L'idée fait son chemin, Issa se met à y croire vraiment. Il espère… à présent il prie même. Le regard de Shin se pose alors sur lui qui a joint ses mains en prière et fermé les yeux, affichant un visage serein. Néo, qui s'était remis à faire les cents pas dans la cellule, s'arrête stupéfait devant Issa. Sandra, assise en face des garçons, affiche alors un léger sourire.

- Il prie, dit-elle, il a raison et je sais que sa prière sera entendue.

A ce moment là, un bruit de craquement sourd se fait entendre dans la cellule, suivi de peu par celui d'un morceau de métal qui se fracasse sur le sol. La grille d'aération est tombée. Les quatre enfants dirigent aussitôt leur regard sur le mur où elle était auparavant fixée. Dans le conduit, il y a une silhouette qui a dû ramper pour s'y introduire. Cette ombre dégage son bras droit vers l'intérieur de la pièce, et la lumière d'un briquet éclaire celle-ci. Le bras est celui d'un petit garçon qui doit avoir à peu près le même âge qu'eux. Une bouille sympathique, un large sourire agréable, quelques tâches de rousseur. La lumière du briquet se reflète dans ses yeux gris bleu et dans ses cheveux en bataille blond cendré. Sandra se lève et répond à son sourire.

- Je savais que tu viendrais, Vicky.
- J'allais tout de même pas moisir ici, et il était pas question que je t'abandonne. Je vois que t'es pas toute seule, moi non plus, je suis pas seul : il y a deux autres copains derrière moi. On fera les présentations plus tard, il y a un endroit dans une salle qui n'est pas fermée d'où on peut sortir de ce trou à rats, les deux autres y sont déjà. Suivez-moi !

Néo reste un instant interdit : pourquoi n'a-t-il pas pensé plus tôt à s'échapper par le conduit d'aération qui semble en effet juste assez large pour permettre au corps d'un enfant de s'y glisser. Sandra est déjà au pied du mur de l'accès tandis que Vicky s'enfonce à reculons dans le conduit. Issa se relève, sa prière n'a pas eu l'effet escompté mais après tout c'est mieux que rien, et puis cela prouve que la petite fille avait raison, désormais il lui fait confiance. Shin ne sait que penser, ses larmes le trahissent encore. Y a-t-il vraiment une chance de s'en sortir par ce chemin ? Il n'y croit pas, mais la perspective de rester seul dans cette cellule ne lui plaît pas, aussi fait-il son choix : suivre.
Le passage est haut dans le mur. Il va falloir monter sur les épaules de l'un d'entre eux pour y accéder, mais comment fera le dernier pour grimper ?

- Ne vous inquiétez pas, dit faiblement le bel Issa, je suis plutôt doué pour l'escalade, je passerai le dernier.
- Tu es sûr ? demande Néo qui poursuit sans laisser le temps à Issa de lui répondre. Bon ! Il est pas question qu'on passe avant une fille. Tu vas monter sur mes épaules Sandra, tu passeras en premier.

Grimpant sur les épaules de Néo, Sandra pénètre dans le passage. Puis c'est au tour de Shin de monter. Issa s'avance ensuite contre le mur pour permettre à Néo d'y aller.

- Je t'attends en haut, lui dit Néo, accroche-toi à mes jambes si tu as besoin.
- Merci, mais tu crois pas que je risque plutôt d'arracher ce qui reste de ton pantalon ?
- Pas grave.

Bien que doué pour l'escalade, Issa a quelques difficultés pour progresser sur un mur lisse, et alors qu'il manque de tomber, il porte son regard sur les jambes de Néo. Il hésite un instant puis saisit son pied, celui qui n'était pas blessé, pour ne pas raviver la blessure de son camarade… et pour ne pas risquer de finir de déchirer son pyjama.
Quelques minutes plus tard, tous suivent Vicky dans ce passage étroit et puant, avant de déboucher dans une autre pièce, apparemment une réserve pleine de caisses, tonneaux ou empilements divers. Au milieu de la pièce, deux autres garçons sont debout.




Ce matin-là, un homme se réveille en sursaut, le visage couvert de sueur, tiré de son sommeil par un mauvais rêve ou plutôt par un mauvais présage. Autour de lui, les parois de la grotte où il a installé son campement renvoient les échos d'un rire lointain, irréel et de toute façon illusoire. Le rêve se poursuit alors qu'il est éveillé, c'est d'ailleurs un cauchemar. Valkhan rêve de son ennemi : il voit le Chasseur riant de son triomphe. Il se précipite à l'extérieur. Le soleil est levé depuis longtemps déjà, comment se fait-il qu'il ait pu dormir aussi longtemps, lui qui ne dort pratiquement plus depuis tant d'années. Il retourne vers l'intérieur de la grotte, son regard se pose sur deux sacs déjà prêts pour le départ. Les enfants se sont déjà levés et ont préparé leurs affaires, mais pourquoi l'ont-ils laissé dormir ? Il sort à nouveau précipitamment. Où sont-ils ? Ils ont dû aller jusqu'au cours d'eau pour faire leur toilette. Oui. Il repère leurs traces de pas. Cependant il est inquiet et d'étranges paroles entendues il y a quelques années, énoncées d'une voix de femme reviennent à son esprit : " Sept âmes dans la tourmente, sept âmes confrontées à la folie de celui qui est né le mauvais jour au mauvais endroit, sept âmes dans le feu de la désolation des hommes qui attendront leur père, sept âmes, enfants du destin et des étoiles attendront la venue du sauveur prophétique. Ce seront les premières retrouvailles avec l'ennemi, des retrouvailles manquées avant la suivante, la dernière… si toutefois tu en as compris le sens et l'essence même de ton existence. "
Valkhan se précipite vers le petit cours d'eau où les traces des enfants se mêlent aux empreintes plus grandes d'autres hommes qui se perdent ensuite vers les bois en bas de la montagne. Les paroles de la prophétesse revêtent alors un sens nouveau et dramatique. Le moment fatidique de la réunion est venu, il ne faut pas le manquer, il n'a pas le droit de le manquer… L'avenir en dépend. Le sort des enfants en dépend… de ses enfants !

- Oh Déesse Athéna, guide ton serviteur, la prophétie de Cassandra est sur le point de s'accomplir. Elle doit s'accomplir.

Et il s'élance à travers les bois, conscient que son destin est peut-être en train de se jouer en ce jour où il risque de rencontrer son ennemi, celui qu'il ne connaît que sous un seul nom : le Chasseur !




Sept enfants réunis dans une même pièce. Une fille et six garçons. Ils s'appellent Sandra, Néo, Issa, Shin, Vicky, Sven et Kemri. Visiblement plus à l'aise, Sandra et Vicky se chargent des présentations, plutôt expédiées : le temps n'est pas propice aux politesses. Néo prend le temps de dévisager davantage cet étonnant sauveur qu'est Vicky, vêtu d'une tunique et d'un pantalon de toile fourré de couleur brune, comme sa sœur, et chaussé d'épaisses sandales de cuir. Apparemment débrouillard comme elle l'avait dit, et plutôt assez habile pour avoir réussi à subtiliser un briquet et un canif à un de ses ravisseurs pendant qu'il se débattait. L'homme en noir ne s'était rendu compte de rien. Vicky s'était servi du canif pour retirer les grilles d'aération qui bouchaient l'entrée des conduits, et du briquet pour faire de la lumière.
Les deux autres garçons sont les plus grands du groupe par leur taille. Kemri dépasse bien Néo d'une tête ; ses longs cheveux roux et lisses ainsi que son regard de braise orangé lui confèrent un aspect presque inquiétant en dépit d'une chétivité évidente tant il est maigre. Il a le teint hâlé, et on apprendra plus tard qu'il vient d'Egypte. Pieds nus, Kemri est vêtu d'une djellaba rongée par les mites. Sven, un grand garçon originaire de Norvège, bien que plus petit que Kemri, est au contraire d'une blancheur de peau remarquable, il a de courts cheveux argentés bouclés et de grands yeux bleus. Egalement pieds nus, il est en pyjama.
Vicky ouvre une caisse, puis une autre, cherchant des choses qui pourraient leur être utiles. Des tonneaux remplis de curieuses poudres noires ou grises, des caisses contenant d'étranges mécanismes, d'autres du plastique… rien d'utile jusqu'à ce qu'il sorte des tiges métalliques, apparemment des pièces détachées pour construire un objet inconnu.

- Prenez-en un chacun, on pourra utiliser ces bâtons en fer comme armes si jamais on nous repérait. Il ne faudra pas hésiter à nous en servir.

Néo, Sven et Kemri sont les premiers à se saisir d'une arme, après Vicky, et sont bientôt imités par Sandra et Issa. Shin hésite un instant à saisir l'objet, effrayé à l'idée de devoir s'en servir. Puis Vicky colle son oreille contre la porte. Il l'ouvre en murmurant que la voie est libre. Les sept enfants s'engagent alors furtivement dans un couloir faiblement éclairé. D'un signe de la main, Vicky leur indique le chemin à suivre : un escalier de pierre montant vers le rez-de-chaussée. Vicky en tête, les enfants s'engagent dans l'escalier. Presque arrivé en haut, le meneur s'arrête, porte son doigt devant sa bouche pour indiquer à ses camarades de ne pas faire de bruit, puis il saisit son bâton de ses deux mains. Juste derrière lui, Néo fait de même, comprenant qu'un obstacle vient d'apparaître. Il lève la tête au-dessus de Vicky qui progresse désormais courbé, il voit un homme, un seul, leur tournant le dos, quelques mètres plus loin dans le couloir. Kemri empoigne à son tour son bâton de ses deux mains, il n'a pas de mal à distinguer l'ennemi au-dessus de la tête de Néo.
Alors tout va très vite, Vicky s'élance, bondit en l'air en brandissant son bâton pour essayer de l'abattre sur le crâne de l'homme en noir. Néo veut le suivre, Kemri l'a déjà dépassé et s'apprête à frapper sa cible dans les jambes. Néo n'hésite plus, il charge. L'exiguïté des lieux ne permet pas aux autres enfants de participer au combat ; certains, comme Shin, s'en trouvent plutôt soulagés. Successivement, trois coups de bâton s'abattent sur l'individu, qui ne réagit pas, pris par surprise. Le coup sur la tête que lui assène Vicky n'est pas le plus violent et ne réussit pas à l'assommer comme l'aurait espéré le garçon, l'homme chancelle et se courbe en avant tandis qu'un coup d'une rare violence lui balaie les jambes. Kemri est peut-être chétif, il ne semble pas pour autant manquer de force ni de combativité, il l'a fait tomber à terre. Et c'est sur une cible étendue que Néo fracasse et tord son bâton en l'abattant sur le crâne de l'homme, visiblement sonné. Mais dans le même temps, celui-ci a hurlé.

- Courez droit devant vous, crie Vicky, la porte qui nous mènera dehors est dans le hall à l'autre bout du couloir !

Kemri n'a pas attendu que Vicky termine sa phrase et s'élance dans le long couloir. Déjà il entend du bruit provenant certainement de l'endroit que son compagnon a mentionné. Néo et Vicky le suivent de près, les autres leur emboîtant le pas. Atteignant le hall, Kemri s'arrête net, serrant dans ses poings son bâton de métal : un nouvel adversaire, imposant, lui barre la route.

- Les gosses se sont échappés, hurle-t-il en direction d'une porte latérale entrouverte, venez m'aider à les maîtriser !
- Pas question ! lui hurle Kemri d'une voix résonnante et tonitruante, impressionnante pour un enfant de sept ans.

Kemri se jette sur son adversaire, il lui assène un coup de bâton qui semble ne pas avoir le moindre effet. Apparemment, les vêtements noirs de son opposant sont suffisamment épais pour absorber la violence du coup. Alors qu'il tente de lui en porter un nouveau, le scélérat esquive et saisit le jeune garçon. Une clé de bras. Kemri lâche son arme en hurlant de douleur. Le regard de braise du garçon s'enflamme et aussitôt il mord le poignet de son ennemi, là où sa tenue ne le protège pas. A son tour de hurler. Lâchant sa prise, il recule, saisissant son poignet avec son autre main, le gamin l'a mordu au sang. C'est à ce moment que Néo et Vicky entrent en scène, frappant le triste sire chacun d'un côté. Bien que ne le blessant pas, les deux coups déséquilibrent l'individu qui pour ne pas s'effondrer est contraint de se rattraper avec sa main valide. Arrivant à son tour, le bâton faisant face au masque de l'adversaire, Sven, sans réfléchir et en fermant les yeux, porte un coup hors de tout contrôle. Le masque noir vole, le bâton érafle sa joue. Il saigne.
De la porte entrouverte, trois hommes surgissent tandis que Shin qui ferme la marche perçoit distinctement des bruits de course dans le couloir derrière eux, d'autres ont surgi par des portes latérales.
Pris de rage, Kemri assène un coup de poing en pleine figure de l'homme en noir blessé. Vicky bondit en direction du premier des trois qui viennent d'arriver, espérant les surprendre. Il crie à l'intention de ses camarades.

- Courez vers la porte de sortie. Faut l'ouvrir et se tirer, vite !

Néo hésite un instant, il voudrait donner un coup de main à Vicky qui ne s'en sortira pas face à trois adversaires, mais c'est lui qui est maintenant le plus près de la porte, et il faut l'ouvrir. Il balance son bâton tordu dans les airs au-dessus de Vicky, puis se précipite vers cette porte. Le bâton heurte le visage du premier des adversaires de Vicky, ce qui a pour effet de stopper l'élan de l'individu et de gêner ses deux acolytes. Vicky frappe. Sven a rouvert les yeux, ne sachant plus trop où frapper. Issa et Sandra se sont retournés et ensemble font rouler leur bâton dans le couloir, ils ont eu la même idée au même moment, espérant que les bâtons feraient tomber les poursuivants. Le premier les évite, mais le second ne les voient pas arriver, chutant de tout son poids dans le couloir, entraînant avec lui les trois autres qui le suivaient. Au milieu de la bataille, Shin tremble. Ne pouvant plus retenir ses larmes, il hurle puis fonce tête baissée dans le couloir, percutant de plein fouet le poursuivant qui était trop concentré à éviter les bâtons de Sandra et Issa pour le voir arriver. Shin lui tombe dessus. Issa et Sandra courent vers lui pour l'aider à se relever.
Il y est presque, la porte n'est plus qu'à quelques mètres de lui. Néo tend le bras vers la poignée… Et puis c'est le choc ! Il vient de heurter un obstacle imprévu, il tombe sur ses fesses, il relève la tête : tout est gris. Un voile gris se dresse devant lui. L'instant d'avant il n'y avait rien, cela il en est sûr, il l'aurait forcément vu.
Ce voile gris, c'est en fait un manteau. Il y a là un homme surgi de nulle part, comme par magie. Néo lève les yeux pour scruter ce nouvel arrivant, prêt à lui rentrer dedans… quand son ardeur cesse aussitôt. Son regard se pose sur un masque noir aux lèvres sanguines, il sent le regard de l'homme masqué pénétrer le sien, pénétrer sa conscience. Il ne peut plus bouger. Il ne peut plus parler. Il ne peut plus crier. Il ne peut plus… il ne peut plus rien faire. Il a peur. La terreur s'empare de lui, il est tétanisé par le regard invisible de cet être qu'il ressent au plus profond de lui. Que se passe-t-il alentour ? Il n'en sait rien. Il ne voit plus rien d'autre.

- Tu as peur, petit homme, dit la voix rauque et caverneuse émanant de derrière le masque, et tu as raison d'avoir peur. Tu es courageux pour avoir défié tous ces imbéciles, mais tu n'es pas téméraire au point de me défier, moi.

Bien que ne pouvant toujours pas bouger le moindre muscle et toujours terrifié, Néo reprend ses esprits. Il voit autour de lui. Ses compagnons aussi semblent ne plus pouvoir bouger, tous semblent être victimes de la même terreur, la peur qu'inspire un prédateur avant qu'il ne dévore ses proies.
Du fond du couloir, un autre homme vient d'arriver, vêtu d'une étrange armure, sans doute celui qu'avait dû voir Issa. Celui qui inspire la terreur relève sa tête et s'adresse au nouveau venu.

- Darius, il semblerait que tout ne se passe pas comme nous… comme JE l'avais prévu. Raconte ! Je veux tout savoir !
- Pardonnez-moi, maître, répond le Chevalier, mais j'ai eu la faiblesse de penser qu'on pouvait faire confiance à ce troupeau d'imbéciles. Yod ! Ton rapport !

L'homme qui avait reçu le bâton de Néo en pleine figure se redresse, tremblant de tout son corps. Il semble envahi par la même terreur que chacun des enfants. Dans un effort surhumain, il prend la parole.

- Nous avons capturé les sept gamins que vous nous aviez décrits aux endroits que vous nous aviez indiqués. Tout c'est passé comme vous l'avez souhaité, je vous le jure, maître. Ce n'est qu'une fois prisonniers qu'ils ont essayé de s'évader, mais nous allions les maîtriser, je vous le jure. Nous étions…
- Non ! interrompt l'homme masqué. Tu mens !

Néo a eu l'impression que celui qui lui inspire tant de peur n'a pas prêté la moindre attention aux propos de l'homme répondant au nom de Yod. Il n'a cessé de le regarder, lui, de le scruter de la tête aux pieds, il a passé sa main glaciale sur son visage, sur son cou, sur sa poitrine. Des frissons parcourent son corps. Alors il comprend que ce sont ses blessures qu'il regardait.

- Celui-ci est couvert de blessures, j'avais demandé à ce que tous soient intacts. Tu as menti, car tout ne s'est pas passé comme je l'ai voulu. Tu connais le sort que je réserve à ceux qui me désobéissent et à ceux qui me mentent.
- Non ! Je vous en supplie, pardonnez-moi, maître, accordez-moi une autre chance, je ne vous décevrai pas, je vous le promets.

Celui que Yod appelle son maître se relève, lui faisant face. Pris par la panique, Yod voudrait s'échapper, disparaître, fuir aussi loin que possible, mais il en est incapable. Ses muscles ne répondent plus à ses ordres. Le maître tend alors son bras droit devant lui, le bout de ses doigts effilés effleure la gorge de Yod. Au même moment, tous les autres hommes en noir reculent, le visage de Darius se fige : eux savent ce qui va se passer. Néo est aux premières loges d'un spectacle qu'il n'oubliera jamais et qui longtemps hantera ses nuits. Tout se déroule très vite. Le maître hurle quelques mots, les ongles de sa main droite s'allongent brusquement et dans un éclat de lumière vive, transpercent la gorge de l'infortuné. Alors le Chasseur est gagné par la folie. Retirant ses griffes couvertes de sang de la gorge de Yod, il lacère son corps, tranchant l'épaisse couche de ses vêtements. Son autre main entre en action, pourvue des mêmes griffes. Il déchiquette complètement sa victime dont la tête s'est détachée du reste du corps. En quelques secondes, le corps du malheureux n'est plus que lambeaux de chair, morceaux de cuir et flaques de sang répandus à travers toute la pièce. Le Chasseur s'est délecté de plaisir à mutiler et détruire sa victime, il n'a cessé de rire, un rire satanique ! Tout n'a duré que quelques secondes mais pour Néo, cela a duré une éternité. Les autres enfants n'ont pas pu voir la scène, masquée par les autres hommes en noir, mais tous ont compris que quelque chose de terrible vient de se produire. Enfin le maître se retourne vers le Chevalier.

- Darius, qu'ils soient sous bonne garde, cette fois-ci ! Je viendrai les chercher ce soir. Que les blessures du petit blond soient soignées !

Les enfants sont alors enfermés tous ensemble dans une autre cellule, deux hommes restant avec eux à l'intérieur. Néo ne les rejoint qu'un peu plus tard, de nombreux pansements sur ses plaies. Prostré, tremblant, il se recroqueville dans un coin de la geôle, se remémorant sans cesse l'atroce scène à laquelle il vient d'assister. Personne ne dit plus mot. Le regard de Kemri est empli d'une colère calme. Shin pleure, sombrant à nouveau dans le désespoir. Issa se remet à prier. Sandra a la même idée que lui.




La réserve. Le Chasseur observe les caisses de poudre, elles ne serviront plus à présent. Il est fâché. Il lui faut apaiser sa colère. Seul dans la pièce, il se concentre. Une douce aura de lumière bleue émane dès lors de lui et un murmure traverse son masque.

- Enflamme-toi, Cosmos ! Apaise ma colère !

C'est alors qu'une gigantesque explosion de lumière se produit. L'instant suivant, le Chasseur a disparu. Les caisses en bois se sont enflammées, le feu va gagner la poudre.
A quelques kilomètres de là, au sommet d'une colline, le Chasseur observe de loin la bâtisse où il se trouvait encore il y a moins d'une seconde. Il sourit sous son masque. Puis c'est l'explosion. Le bâtiment, ou ce qu'il en reste, est maintenant la proie des flammes.

- Je sacrifie un cavalier, mais je te prends tous tes pions, Valkhan !




Valkhan court à travers les bois, suivant les traces à peine visibles de ceux qui ont enlevé ses deux enfants. Puis tout à coup plus rien, plus de traces, ils ont dû passer par les arbres. Par où aller ? Valkhan se concentre, puis son regard surpris se tourne vers une direction.

- Un Chevalier !

Il se remet alors à courir. Quelques minutes plus tard, le bruit d'une explosion toute proche stoppe sa course. Une gerbe de flammes jaillit au-dessus des arbres. Une appréhension. La peur. La colère même. Il reprend rapidement tout son calme, et imperturbable s'élance vers les flammes, une aura dorée émanant maintenant de son corps, alors que ces mots résonnent dans sa tête : " Sept âmes dans la tourmente, sept âmes confrontées à la folie de celui qui est né le mauvais jour au mauvais endroit, sept âmes dans le feu de la désolation des hommes qui attendront leur père, sept âmes, enfants du destin et des étoiles attendront la venue du sauveur prophétique. Ce seront les premières retrouvailles avec l'ennemi, des retrouvailles manquées avant la suivante, la dernière… si toutefois tu en as compris le sens et l'essence même de ton existence. " et de répéter à son tour :

- Le feu de la désolation des hommes ! Ta prophétie s'accomplira, Cassandra, je te le jure !




Un choc violent. Un bruit sourd et terrifiant. Puis tout est couvert d'une épaisse couche de gravats, comme si le plafond leur était tombé sur la tête. Néo ouvre les yeux : il est couvert de poussière mais il n'est pas blessé. Un miracle à en juger l'étendue des dégâts. Il regarde autour de lui. Un gardien, grièvement atteint, essaie de se relever, mais il lui manque une jambe : le spectacle est effrayant. Le deuxième garde est étendu sur le ventre, immobile. A-t-il perdu connaissance ? Est-il mort ? Néo n'en sait rien et ce n'est pas ce qui le préoccupe pour l'instant, il cherche ses nouveaux amis, la peur au ventre, car ils ont sûrement subi le même sort que les deux hommes. Debout devant lui, Shin, le regard hébété, ne comprend pas ce qui se passe, il ne pleure même plus. Néo accourt vers lui, il lui prend la main. Aussitôt Shin le serre dans ses bras.

- Ca va, rien de cassé ?

C'est la voix de Vicky, il s'adresse à quelqu'un d'autre.

- Non, je crois que ça va. Mais où sont les autres ? demande la voix de Sven
- Je suis ici, avec Shin, on va bien.
- On y voit que dalle avec toute cette poussière. Où vous êtes ? crie la voix forte de Kemri
- Aïe ! Tu m'as marché sur le pied !
- Oh ! Excuse.

Cette fois c'était la voix d'Issa que Néo avait reconnu. Mais Sandra, où est-elle ? Néo l'appelle, il crie son nom, quand il sent une main se poser sur son épaule.

- Tout va bien, je suis là !

Un miracle, se dit-il, qu'ils soient en vie tous les sept, alors que leurs deux gardes, eux, gisent dans un piteux état, l'un mort, l'autre gravement blessé et incapable de bouger. Un miracle, oui !
La porte s'ouvre. Son armure recouverte d'une fine couche de poussière a perdu tout son éclat ; Darius pénètre dans la geôle, suivi d'un de ses hommes apparemment indemne, tandis que les flammes progressent rapidement.

- Que fait-on, Chevalier Darius ? On a six hommes morts là-haut, et les autres ne valent guère mieux.
- Il faut sortir les gosses d'ici. Pourvu que l'un d'eux au moins ait survécu. Mon armure m'a protégé mais elle ne pourra rien contre la colère du maître… Incroyable !

Darius fait un pas à l'intérieur, il sourit lorsqu'il voit les sept enfants, debout, sans accorder le moindre regard à ses deux hommes ni prêter la moindre attention à celui qui vit encore et qui le supplie de l'aider. Darius s'élance dans la pièce.

- Aide-moi à les assommer pour que nous puissions les livrer au maître, hurle-t-il à l'intention de son subalterne.

Envahis à nouveau par la peur de ce nouvel adversaire, les enfants sont désemparés. Quand tout à coup… La paroi du fond de la geôle s'effondre, laissant place à un rayon de lumière dorée étincelante. Au centre de l'éclat éblouissant, une silhouette se dessine. Darius et son sbire ont cessé leur course pour regarder celui qui vient d'arriver.
Grand, imposant, ses longs cheveux blond cendré posé sur ses épaules, quelques mèches disparates retombant sur ses yeux marron et son visage austère. Sur son front plissé, on voit peints deux petits disques oranges. Il porte un épais chandail brun, un pantalon fourré de la même teinte et de hautes bottes de cuir. Fixée sur des épaulières en cuivre abîmées, une longue cape grise et usée vole au vent. Son regard se pose sur chacun des enfants : un regard dur mais pourtant… rassurant. Sans savoir pourquoi, chaque enfant ressent alors une douce chaleur au contact de l'aura de cet homme. Leur esprit s'apaise, le doute disparaît. Tous savent à présent qu'il vient pour les sauver. La peur quitte l'esprit de Néo, il retrouve tous ses moyens. Alors, la voix du sauveur, solennelle, résonne.

- Viktor ! Guide-les !
- Oui papa, réponds Vicky. Suivez-moi !

Valkhan s'avance dans la pièce, il tend son bras, la paume de sa main ouverte en direction de l'homme en noir sur le point de saisir Néo. Aussitôt celui-là est projeté à plusieurs mètres en arrière. Darius se jette à terre pour éviter son homme de main. Dans le même temps, Vicky s'est précipité vers la brèche dans le mur. A l'extérieur, c'est un cratère qui a creusé le sol. Quand on en sort, on rentre dans la forêt. Shin s'engage derrière Vicky : lui aussi a rapidement retrouvé tous ses moyens en présence de l'aura de Valkhan.
Darius se relève, tout en fixant Valkhan, une aura argentée émane à présent de tout son corps.

- Une aura d'une telle puissance ! Se pourrait-il que tu sois… ? Non, ce n'est pas possible !

Darius affiche un visage empreint d'effroi à ce moment précis, alors qu'il se met à charger Valkhan tout en psalmodiant quelques mots. Il n'a pas le temps de terminer, son adversaire est plus rapide, il a encore levé son bras, tendant sa main ouverte. L'instant d'après, Darius est projeté contre une paroi. Dans le même temps, Sandra puis Issa emboîtent le pas de Shin.
A genoux près de Valkhan, Néo reste admiratif devant les prouesses de cet homme qui envoie valser ses adversaires sans même les toucher. Il se relève et entend des mots sortir de la bouche de ce héros, sans les comprendre. Sven passe par la brèche au même instant.
Darius se relève, il charge à nouveau. Tandis que Kemri franchit le passage à son tour, Valkhan attrape Néo sous un bras et lui emboîte le pas, sans se soucier de l'assaut du Chevalier. La dernière chose que voit Néo avant d'être sorti de la geôle, c'est Darius s'écrasant contre un mur transparent et à peine perceptible !
Vicky en tête, les enfants courent dans la forêt, Valkhan couvrant leurs arrières. Ils entendent ensuite une nouvelle explosion derrière eux. Cette fois, il ne reste sûrement plus rien de la bâtisse.




Une île dans le Pacifique sud. Une tour d'acier. Une femme plongée dans une profonde méditation. Elle ouvre ses yeux : ils sont blancs. Elle est aveugle. Elle se lève puis s'adresse à un jeune homme âgé d'à peine quinze ans, assis dans la pénombre de la grande salle circulaire.

- Le destin est en marche Hassadan, les sept étoiles sont à présent réunies. Valkhan a accompli la prophétie. Va le rejoindre au monastère de Nasheen. C'est là qu'il va se rendre à présent. Il faut agir dans les temps que nous nous sommes fixés, tout doit être prêt avant que le soleil n'entre à nouveau dans le signe du Sagittaire.
- Cela nous laisse presque un an, c'est largement suffisant, Cassandra. Ne t'inquiète pas.
- Je n'ai peut-être pas tout prévu, Hassadan, on ne peut pas accorder de confiance aveugle et irréfléchie à mes prédictions. Lui aussi peut prédire l'avenir, mon enfant.
- Mais de qui diable parles-tu ?
- Diable… oui, c'est le mot juste, Hassadan… je parle du Chasseur bien sûr.

Un instant figé, le jeune Polynésien se lève, puis sort de la pièce. Il se dirige alors dans sa chambre pour y prendre son bagage, un imposant coffre de bronze gravé de la tête d'un lion qu'il met sur son dos. Restée seule, Cassandra referme ses yeux aveugles et joint ses mains en prière.

- Merci, Déesse Athéna, d'avoir protégé les enfants. Sans ton intervention, nous aurions échoué.




Sous des braises encore fumantes, un bras surgit du sol. Gravement blessé, son armure en partie détruite, Darius émerge des décombres. Devant lui, se tient son maître. Il se relève, effrayé.

- Qu'as-tu vu, Darius ? Raconte.

Le Chasseur s'accroupit, il ramasse des éclats de cristal éparpillés sur le sol tandis que Darius, après un moment d'hésitation, entame son récit.

- La poudrière s'est enflammée, je ne sais pourquoi…
- Peu importe pourquoi, c'est moi qui y ai mis le feu, lui répond calmement le Chasseur.
- Quoi ? Vous ? Mais pour quelle raison ? Vous vouliez bien les enfants vivants ?
- Je vais te le dire, Darius, si tu y tiens tellement. Ces enfants, je devais en faire des soldats parmi les meilleurs, ou bien les faire disparaître, car ils sont promis à un destin exceptionnel, tu n'as pas besoin de savoir lequel. Mais j'ai été contrarié, l'un d'eux a été maltraité par tes hommes, je ne voulais pas qu'un seul d'entre eux soit abîmé…
- Ce n'était rien, quelques ecchymoses…
- TAIS-TOI ! C'était déjà trop ! Alors j'ai préféré tout faire sauter, pour les détruire et pour vous punir en même temps. Ai-je réussi ? Ai-je tué tous tes hommes ? Ai-je détruit les enfants ? Réponds, Darius !
- Mes hommes sont tous morts, maître, mais…
- Mais quoi ? Et les enfants ? Et qui a détruit ton Armure Sacrée ? Tu devais être le seul survivant, je savais que ton Armure d'Argent te protégerait.
- Un homme est venu pour essayer de sauver les enfants. Il s'est battu contre moi. Son Cosmos était d'une puissance considérable…
- Comment un Chevalier d'Argent peut-il trouver un adversaire plus fort que lui ? Darius ! Tu vois ces éclats de cristal, ils sont signés ! Je sais qui t'a fait cela, tu ne l'as pas reconnu ?
- Vous êtes en train de me faire comprendre que celui qui a voulu sauver les gosses était un…
- Non, il n'a pas seulement essayé, Darius, il a réussi à les sauver ! Ton adversaire, c'était Valkhan !

Darius laisse tomber ses bras, il vient de comprendre contre qui il avait combattu.

- Valkhan, l'ancien…

Les griffes du Chasseur se plantent alors dans la gorge de Darius, l'empêchant de finir sa phrase.

- Jamais plus on ne dira devant moi qui était Valkhan autrefois, tu entends ! Darius ! Chevalier d'Argent de la constellation du Grand Chien, tu as échoué dans ta mission. Tu mérites ton châtiment ! Meurs !

En une fraction de seconde, il a lacéré sa victime, il l'a mise en pièces et réduite à néant. Darius mort, le Chasseur disparaît. Il se téléporte un peu plus loin, sur une colline et observe l'horizon.

- Il s'en est fallu de peu, Valkhan ! La prochaine fois, je mettrai un terme à notre chasse ! Bientôt… très bientôt !

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Cette fiction est copyright Laurent Habault.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.