Chapitre 5 : Mais alors, pourquoi lutter ?


Shaka rentrait lentement à l'hôtel, Cybèle dans ses bras. Il aurait pu se déplacer à la vitesse de la lumière, mais il voulait que tout le monde voit ce qui était arrivé.
Une jeune fille, une amie, était morte sous ses yeux et il ne l'avait pas sauvé. Sciemment. Au nom d'une éthique obsolète depuis 150 ans.
Aussi quand un homme l'arrêta pour lui dire qu'il avait vu ce qui s'était passé et qu'il connaissait un groupe de personne qui se battait pour détruire les Jeux, il l'écouta.
Lorsque cet homme (qui s'appelait Christian) lui proposa de venir avec lui pour les rencontrer, il le suivit.
Il l'emmena dans un immeuble situé dans un quartier habité par les classes moyennes. Ils descendirent au sous-sol.
Shaka pénétra dans ce qui avait dû être un parking. Des bureaux, des lits, des canapés et même un coin cuisine y avait été installés. Une vingtaine de personnes y discutaient, travaillaient, se reposaient. Au moment où il déposa Cybèle sur une table, tous les regards se tournèrent vers lui.
Christian le présenta.
Le chef du groupe, qui se prénommait Julien, lui expliqua qu'ils se battaient depuis des années pour faire interdire les Jeux. Ils avaient d'abord voulu alerter la population et le gouvernement par des actions pacifistes mais sans résultat. Peu à peu, ils s'étaient tournés vers la lutte armée. Il y avait eu des attentats contre les organisateurs et les studios, des sabotages de relais de transmission et de lieux publics de diffusion. Nombre des membres du groupe avaient été arrêtés ou tués mais jamais leur réseau n'avait été démantelé. Et aujourd'hui, ils touchaient au but. Pour la première fois, ils avaient des contacts à l'intérieur des studios. Ils étaient en train de mettre au point une opération qui leur permettrait d'éradiquer complètement les studios. Il y aurait des morts, assurément, mais après tout, candidats et spectateurs étaient aussi responsables que les organisateurs des horreurs des Jeux. Le seul problème était les Extérieurs. Ils tentaient de trouver un plan pour les sauver mais ce n'était pas évident.

-Et une fois que vous aurez tout détruit que se passera-t-il ? demanda Shaka.
-Nous avons des appuis politiques. Une fois que les studios auront disparus, ils empêcheront les Jeux de reprendre.
-Ils ne peuvent pas agir maintenant ?
-Pour le moment, les Jeux sont une institution qui ramène beaucoup d'argent à la ville Mais le coût de la reconstruction sera énorme et difficile à financer puisque, justement, ils auront perdu leur plus grosse entrée d'argent. Si on leur propose d'autres solutions, ils seront plus enclins à les examiner.
-Et vous me racontez tout cela tranquillement, alors que vous me connaissez à peine ? Qui vous dit que je ne suis pas envoyé par la police pour vous espionner ?
-Vous savez Christian n'était pas là par hasard. Nous observons souvent ce qui se passe aux abords des studios. Regardez ce qu'il a filmé.

Julien lui tendit un petit écran qui repassait la mort de Cybèle. Après les coups de feu, la caméra avait zoomé sur le visage de Shaka. Il était impossible de ne pas remarquer le masque de haine qu'il portait.

-Je pourrais être un très bon comédien, dit Shaka
-Peut-être. Mais je prends le risque de croire que vous étiez sincère par ce que nous avons des personnes comme vous.
-Comme moi ?
-Oui. Vous n'avez pas paniqué, vous ne vous êtes pas jeté sur les gardes dans un excès de rage. Mais vous ne vous êtes pas laissé intimider non plus. C'était vraiment impressionnant la façon dont vous êtes allé prendre le corps de votre amie.
-Je n'aime pas les Jeux et je pense qu'ils doivent disparaître, mais pas au prix de la mort de tant de personnes
-Croyez-moi, nous ferons moins de morts que les Jeux n'en ont déjà fait et continuerons à en faire ! Et ceux qui participent de leur plein gré et ceux qui ont tellement envie de les regarder en live qu'ils peuvent faire la queue pendant des jours pour entrer dans les studios sont des monstres.
-Mais dans ce cas là, toute la population de Paris est à punir.
-Non. Les fanatiques des Jeux ne représentent pas la majorité. Beaucoup les regardent par ce qu'il n'y a que ça à voir. Mais si on leur propose des divertissements plus humains ils se rendront facilement compte de leur erreur et ils deviendront de meilleures personnes.

Shaka voyait les faiblesses du raisonnement de Julien. Mais il était tenté d'accepter la proposition. Car avait-il vraiment le droit de ne rien faire ? Il avait la possibilité de rendre une société meilleure. N'était-ce pas pour cela qu'il s'était battu en tant que chevalier ? Ne serait- ce pas la pire des trahisons envers lui-même que d'assister à la mort de gens comme Cybèle alors qu'il pouvait l'empêcher ?

-Je pense que je vais accepter, mais avant je dois parler à quelqu'un.
-Je ne suis pas certain que ce soit très prudent, dit Julien. Pouvez-vous être sur que cette personne ne vous trahira pas ?
-Plus que vous pouvez être sur que je ne vous trahirais pas.
-C'est d'accord si nous allons chercher cette personne et que la discussion à lieu ici. Et si j'estime que cette personne représente un risque pour le groupe, nous la garderons ici jusqu'au moment de l'opération.
-Ca me convient
-Donnez-moi son nom et son adresse.

Shaka inscrivit ces renseignements sur un bout de papier.
Une heure plus tard Shun entrait dans l'ancien parking. La première chose qu'il vit fut le corps de Cybèle.

-Elle aussi…
-Yorgos est mort, n'est-ce pas ? demanda Shaka qui s'était approché
-Oui. Il n'a même pas tenu une demi-heure. Qu'est-ce qui se passe Shaka ? Pourquoi m'a-t-on emmené ici ?

Shaka lui expliqua les intentions du groupe.

-Et tu veux les aider ? demanda Shun incrédule
-Je crois oui.
-Tu te rends compte du nombre de personne qu'ils vont tuer ? Et pour rien en plus.
-Détruire les Jeux n'est pas rien.
-Les détruire comme ça, si. Pour que ça serve à quelque chose, il faut que ce soit la population de Paris qui abolisse les Jeux, et non pas un petit groupe armé. Ce groupe veut remplacer un système par un autre certainement meilleur, mais le problème c'est qu'ils vont l'imposer. Les gens subiront au lieu de choisir. Ils ne comprendront pas forcément pourquoi les Jeux étaient mauvais. Et à partir de là, qu'est-ce qui les empêchera plus tard de recommencer où de créer quelque chose de pire.
-Ils ont mené des actions pacifiques pour essayer de faire changer d'opinion la population mais ça n'a pas marché.
-Evidemment. Les mentalités mettent du temps à changer.
-Et en attendant, on regarde des innocents se faire tuer en restant les bras croisés alors qu'on pourrait faire cesser le massacre ? Non. Je pense qu'il vaut mieux stopper les Jeux puis changer les mentalités. Honnêtement, peux-tu me dire qu'il était juste de laisser Cybèle et Yorgos mourir ?
-Juste, je ne sais pas. Je sais seulement qu'on les a laissés libre de choisir. Je sais qu'il était juste de ne pas leur imposer notre volonté.
-Et était-ce juste ou lâche de ne pas les aider dans la voie qu'ils avaient choisi ? Shun, nous ne pouvons pas faire comme si nous étions des êtres normaux. Nous avons des capacités extraordinaires. Te rends-tu compte du crime que l'on commet si l'on reste simple spectateur ?
-Mais c'est justement à cause de ces capacités que nous devons être prudents dans nos interventions. Ne vois-tu pas à quel point, sous couvert de bonnes intentions, il nous serait facile de devenir des tyrans. Nous sommes assez puissants pour imposer notre point de vue au monde entier. Mais tu l'as dis toi-même, nous pouvons commettre des erreurs. Et alors qui serait en mesure de se dresser contre nous ?
-Je comprends tes doutes Shun. Oui nous pouvons faire du mal à l'humanité en voulant l'aider. Et c'est valable pour toute personne qui se bat pour changer le monde. Mais si ces personnes n'avaient pas mis leurs peurs de coté alors l'humanité n'aurait jamais évolué. Je veux œuvrer pour un monde meilleur. Et si je me trompe dans mes jugements alors j'en accepterais les conséquences et j'essaierais de réparer mes erreurs. Shun, ne me demande pas de rester de marbre face à la souffrance, face à toutes ces morts inutiles alors que je sais que je peux agir.
-Ne me demande pas d'accepter la mort de centaines de gens même si c'est pour en sauver d'autres.
-Nous ne serons pas ensemble alors cette fois.
-Il faut croire que… Shun n'eut pas le courage d'achever sa phrase.

Il s'absorba dans la contemplation du corps de Cybèle. Un véritable gâchis dont Shaka et lui étaient seuls responsables. Pourtant changerait-il sa décision s'il pouvait revenir en arrière ?

-Ecoute, repris Shun, laisse-moi un peu de temps. J'ai besoin de réfléchir.
-Bien sûr, répondit Shaka en lui caressant doucement la joue. Et quel que soit ton choix je le comprendrais, ajouta-t-il en s'éloignant.

Shaka alla rejoindre Julien qui était resté à portée de voix pour suivre la conversation. D'ailleurs tous les membres du groupe avaient fait pareil.

-Quelle sera sa décision à votre avis, murmura Julien à l'adresse de Shaka
-Celle qui sera la bonne pour lui.
-Il est si jeune…Il a toute la vie devant lui pour choisir de se battre.

Cette réflexion surpris Shaka. Il pensait que rarement à l'âge de Shun. A vrai dire, on vieillit vite à être chevalier. Combien de fois déjà avait-il pris des décisions qui pouvaient changer le visage de la terre ? Et maintenant Shaka lui demandait d'en prendre une autre. Ne le poussait-il pas trop loin, trop vite ? Shaka ne le pensait pas.

-Physiquement il n'a que 17 ans, certes. Mais ne le considérez pas comme un adolescent normal. Cela fait bien longtemps qu'il a une maturité d'homme.
-A causes des capacités dont vous parliez ?
-Oui.
-Quelles sont-elles exactement ?
-Trop grandes, en vérité. Il me faudrait moins d'une seconde pour réduire cet immeuble en miettes.

Julien en resta bouche bée.

-Allons, exposez-moi votre plan en détails, dit Shaka. J'aurais peut-être une idée pour sauver les Extérieurs.

Trois heures plus tard ils avaient tous besoin de faire une pause. Julien alla faire du café et en apporta une tasse à Shun qui était toujours près de Cybèle.

-Nos actions peuvent vous sembler cruelles, dit Julien, mais tuer se révèle une nécessité dans le cas présent.
-Pas forcément. Surtout si je me joins à vous. Avec l'aide de Shaka, je pense que je pourrais trouver un moyen de sauver toutes les personnes présentes tout en vous permettant de détruire les studios. Vous ne seriez pas contre cette modification du plan, n'est-ce pas ?
-Si c'est vraiment réalisable, je serai ravi de changer cette partie du plan. Mais alors pourquoi hésites-tu à joindre le groupe ?
-Ce qui me gêne le plus c'est ce que vous comptez faire après la destruction. Je crois vraiment qu'il faut donner aux Parisiens la possibilité de décider par eux-mêmes.
-Comment ?
-Et bien par exemple vous pourriez proposer d'autres divertissements pendant quelques années, tout en menant une campagne expliquant pourquoi vous croyez que les Jeux sont mauvais, puis vous organiseriez un vote pour savoir si la population souhaite le retour des Jeux.
-Et s'ils disent oui ?
-Alors c'est que vous avez échoué et que Paris a besoin des Jeux.
-Et nous les rétablirions comme ça ?
-Pas tout à fait. A mon avis il serait judicieux d'interdire la participation des Extérieurs. Les seuls candidats seront ceux qui l'on vraiment désiré. Ce qui serait déjà une nette amélioration par rapport à maintenant.
-Je ne promets rien mais je vais essayer de convaincre nos appuis politiques, répondit Julien après un temps.

Shun était un peu étonné d'avoir convaincu Julien si facilement. Evidemment il n'avait aucun moyen de savoir que ce n'était pas vraiment son argumentation qui avait décidé Julien. Mais ce dernier avait eu un fils mort à la naissance. Il aurait eu le même âge que Shun s'il avait vécu. Et Julien aurait tant aimé voir le regard, rempli d'espoir que lui avait lancé Shun, dans les yeux de son enfant. Et il aurait tant aimé être capable de ne pas le décevoir…
Dans les jours qui suivirent un nouveau plan fut mis au point. Shun et Shaka s'étaient vite aperçus que malgré leur vitesse de déplacement il serait dur de sauver plus de 4000 personnes en moins de trois minutes (le seul délai qu'ils pouvaient se permettre s'il ne voulait pas que les organisateurs aient une chance d'entraver l'opération en s'apercevant que quelque chose n'allait pas). Ils décidèrent alors de se servir du déplacement par transmission. Il leur suffirait de se procurer les boîtiers qui permettaient ces déplacements. Après que les premières personnes auraient été transportées, la chaîne nébulaire récupérerait les boîtiers et les transmettrait de façon quasi instantanée à Shun et à Shaka qui recommencerait l'opération autant que nécessaire. Une soixantaine de boîtiers devraient suffire puisqu'un appareil pouvait transporter jusqu'à cinq personnes en même temps. Le vrai problème était de trouver soixante boîtiers. C'était une technologie très coûteuse donc pas très répandue dans la population. Une unité de dix gardes des Jeux en était équipée. Les récupérer présenterait en plus l'avantage d'affaiblir la défense des studios. Les recruteurs en possédaient vingt mais il serait moins évident de s'en emparer puisqu'une grande partie des recruteurs seraient loin de Paris. La préfecture en gardait une trentaine en cas de crise. Pour être certain d'avoir le nombre nécessaire il faudrait en subtiliser au compte goutte à de riches particuliers. En plus ces vols devraient avoir lieu très peu de temps avant le début de l'opération car avec les VII les disparitions seraient vite signalées.
Une fois tout le monde en sécurité le grand feu d'artifice pourra commencer. Des bombes auront été mises en place par le groupe une heure avant. Les membres du groupe seront entrés pour les placer grâce à leurs contacts qu'ils leur avaient déjà permis d'avoir les plans détaillés des studios avec tous les points stratégiques à détruire.
Julien n'oublia pas sa promesse et pendant que le plan se mettait en place, il allait voir tous les politiciens qui le soutenaient, avec Shun. S'ils finissaient toujours par accepter les propositions du jeune homme, ce dernier ne se faisait pas d'illusions pour autant. Il allait devoir être très vigilant après la disparition des studios.
Le plan marcha plutôt bien. Un ou deux petits accrocs mais rien de dramatique. En un quart d'heure les studios avaient été endommagés au-delà du réparable.
Ce qu'ils n'avaient pas prévu par contre c'était la riposte du gouvernement qui ne se fit pas attendre et qui fut diablement efficace.
Apparemment ils avaient été mal renseignés sur le nombre de transmetteurs car une centaine de soldats surgirent de nul part et encerclèrent les membres du groupe. Mis à part Shun et Shaka ils disparurent tous.

-Nous venons de transporter tous vos amis dans différents endroits du globe, leur dit un officier resté sur place. Ils sont tous reliés entre eux par un système visuel. Si l'un d'entre eux disparaît de ce champ visuel les autres seront tués. Le système est complètement automatique. Vous n'aurez même pas le temps d'une réaction humaine pour agir. Suivez-nous sans faire d'histoires et ils auront la vie sauve.

Comme ils n'avaient pas vraiment le choix les chevaliers obéirent. Ils ne savaient pas à quoi s'attendre mais certainement pas à être amené au palais de l'Elysée. Pourtant c'était bien là qu'ils se retrouvèrent.
Et ce furent auprès de la Présidente elle-même qu'ils furent introduits.
La Présidente avait une cinquantaine d'année. Elle n'était pas belle au sens classique du terme mais elle dégageait une force et une intelligence incroyable. Son regard disait qu'elle avait déjà fait plier des montagnes et ce ne serait certainement pas deux jeunes hommes qui pourraient lui résister.

-Alors c'est à vous qu'on doit cet acte terroriste ? remarqua-t-elle d'un ton mordant. Je suppose que vous êtes fiers de vous. Vous venez de priver des centaines de gens de leur maison, de leur repas, de leurs soins médicaux et de leur droit à l'éducation.
-Nous avons détruit un divertissement pas une partie de la ville, répondit Shaka
-Savez-vous que Paris possède un dispositif très performant d'aide sociale ? demanda la Présidente en changeant apparemment de sujet.
-Oui, notre VII nous en a parlé.
-Je vois, dit la Présidente. Elle a dû oublier de vous préciser que tout ce système était financé par les Jeux. Sans Jeux, plus d'aide sociale.
-Mais vous pourrez récupérer de l'argent différemment, dit Shun. La disparition des Jeux va créer un vide et les gens devront trouver d'autres moyens d'occuper leurs loisirs. Vous n'aurez qu'à prélever les bénéfices de ces nouveaux passe-temps. Les politiciens que j'ai rencontrés ont des idées très intéressantes et nettement moins meurtrières qui peuvent marcher aussi bien que les Jeux.
-Vous voulez parler de ces moralisateurs intégristes qui croient que nous devons être récompensés selon notre utilité pour la société et que les plus pauvres ne sont que des parasites que l'on devrait laisser crever dans leur coin ?
-Pardon ?
-Et oui. Vos politiciens, vos sauveurs de sociétés décadentes (d'ailleurs sous bonne garde actuellement) se sont servis de vous pour essayer de revenir à la loi des plus riches et faire un bon de 150 ans en arrière.
-Ce n'est pas parce que nous sommes idéalistes que nous sommes naïfs, dit Shaka. Nous n'avons pas détruit les Jeux pour des histoires politiques mais parce qu'il nous était insupportable de voir autant d'êtres perdre leur vie. Rien ne peut justifier le bain de sang et les humiliations que ces Jeux proposaient même pas la survie d'autres personnes. Bien sur un tel acte peut empirer les choses plus que les améliorer. C'est pour cela que nous avions prévu de surveiller de très près la mise en place des nouveaux loisirs.
-Et comment comptiez-vous faire ça ? Vous n'êtes arrivés qu'il y a quelques semaines. Vous n'avez aucune influence sur ces politiciens.
-Je suis sûr qu'ils auraient trouvé un moyen, dit une nouvelle voix. Ces jeunes gens sont pleins de ressources insoupçonnées. Si je n'avais pas transmis les renseignements nécessaires au chef de ton armée, Présidente, tu n'aurais jamais pu les arrêter.
-Je me demandais si tu allais finir par te manifester Tempus. Après tout, c'est toi qui as voulu les rencontrer. Moi j'ai mieux à faire que perdre mon temps avec eux.
-Tu as tort, chère Présidente. Ils sont certainement les seuls à pouvoir régler ton petit problème d'astéroïde.
-Ce n'est pas le moment de faire de l'humour Tempus.
-Je n'en faisais pas.
-C'est ridicule.
-Vous pourriez peut-être nous dire de quoi il retourne ? dit Shaka
-A toi l'honneur, Tempus, dit la Présidente.
-Voyons voir. Pour tout expliquer, il va falloir remonter 150 ans en arrière. Mais commençons par les présentations. Nous avons donc ici présent Shaka chevalier d'or de la Vierge, Shun chevalier divin d'Andromède, Madame la Présidente en place depuis 6 ans et votre dévouée VII répondant au nom de Tempus. Cependant vous me connaissez sans doute mieux sous le nom de Chronos.
-Mais c'est impossible, dit Shun. Tous les dieux sont morts.
-On pourrait débattre longtemps pour déterminer si je vis vraiment et si je suis encore un dieu mais de toute évidence j'existe encore.
-Comment avez-vous échappé à la destruction de l'Olympe ?
-En faisant un petit saut dans le futur. En fait c'est assez simple quand tu maîtrises le temps. Mais je n'ai pas pu échapper totalement aux conséquences de cette guerre stupide. Quelque chose de fondamental à disparu avec l'Olympe. Je pense que c'est le concept même de la déité qui à été ébranlé. Quand je suis arrivé dans le futur j'ai senti mes forces décliner subitement. Et ma grande surprise je n'avais plus d'emprise sur le temps. J'ai cherché alors un moyen de survivre et j'ai fusionné avec un ordinateur très puissant créant ainsi la première intelligence artificielle. Et depuis je maudis Arès et sa cervelle de pois chiche.
-Vous êtes pourtant autant responsable que lui de cette guerre, dit Shun. Vous auriez pu refuser de vous associer à Arès.
-Franchement j'avais le choix entre m'associer à Arès et provoquer une crise majeure dans le petit monde des dieux (il fallait pas être grand clerc pour deviner ce qui allait se passer à mon retour) ou me faire réenchaîner illico presto par Zeus. J'ai préféré tenter ma chance avec Arès. Mais le pire dans tout ça c'est que mon arrogant de fils commençait à avoir un peu de bon sens et qu'il envisageait sérieusement de me relâcher. Ce n'était plus qu'une question d'années. J'aurais pu avoir une vie décente au lieu de me retrouver dans une nouvelle prison. Cette poule mouillée qui avait peur de se faire égratigner par deux mortels a tout gâché. Je me demande vraiment comment j'ai pu engendrer une telle descendance. J'avais bien raison de vouloir tous les dévorer.
-Ne prenez pas au sérieux ce qu'il vous raconte, dit la Présidente. Il a souvent ce genre de délire mystique. Etre le coordinateur de toutes les VII lui monte à la tête de temps en temps.
-Je préférais ton prédécesseur. Au moins lui il me croyait. Et puis au cas où tu ne l'aurais pas remarqué Shun et Shaka m'ont tout de suite reconnu.
-Tu sais, après les avoir vus faire exploser les jeux je me doute bien qu'ils n'ont pas toute leur raison, dit la présidente. Et si on en venait au cœur du problème ? demanda la Présidente.
-Votre façon de parler de nous démontre un manque de respect et une suffisance plutôt désagréable, dit Shaka. Mais sachant qu'en six ans vous n'avez rien fait pour interdire ou seulement modifier les Jeux, ce n'est pas une surprise.
-Depuis quand traite-t-on avec égard des criminels ?
-Depuis quand détruire un bâtiment est pire que de permettre la mort de centaines de gens et l'endoctrinement de millier d'autres ?
-Il me semble avoir déjà répondu à cette question. Mais de toute manière je ne m'attendais pas à ce que vous ayez assez de finesse pour comprendre les impératifs qu'a un chef d'état.
-Je ne m'attendais pas à ce que vous ayez assez de cœur pour comprendre les impératifs de personnes possédant un minimum d'humanité.
-Ce n'est pas en vous lançant des phrases assassines que vous réussirez à comprendre les positions de l'autre, dit Shun. Il me semble que nous sommes là pour une raison et j'aimerais bien la connaître.
-Moi je trouvais cette petite joute très intéressante, dit Chronos. Pourquoi les réincarnations d'Hadès sont-ils toujours des rabat-joie ?
-Pourquoi sommes-nous là ? demanda patiemment Shun
-Bon d'accord, j'explique, dit Chronos. Selon des calculs qui ont été refaits plusieurs fois, nous avons deux astéroïdes qui nous foncent dessus et qui risquent de réduire la durée de vie de la terre de quelques millions d'années. Il faut trouver une solution pour les anéantir.
-Avec toute votre technologie vous ne pouvez pas vous en charger ?
-Nous n'avons aucune arme de destruction massive, dit la Présidente. Après l'Effondrement nous avons éliminé celles qui restaient et nous n'avons jamais cherché à en recréer. Depuis trois mois on fouille dans les archives qui nous restent pour voir si l'on pourra en mettre une au point. La bombe atomique semble une piste sérieuse mais nous risquons de manquer de temps pour refaire toutes les recherches puis la fabriquer.
-Je ne suis pas certain qu'on puisse y arriver, dit Shaka en s'adressant surtout à Shun et Chronos. A trois on aurait pu déclencher l'Athéna Exclamation mais nous ne sommes que deux.
-J'oubliais que vous ne savez vous servir de votre cosmos qu'au travers des techniques, ce qui l'affaiblit considérablement, dit Chronos. Si vous voulez arrêter ces astéroïdes il va falloir que vous appreniez à lâcher toute la puissance de votre cosmos sans essayer de la contenir mais simplement de la diriger vers un point précis. Ce n'est que comme ça que vous pourrez l'augmenter de façon significative.
-Et nous avons combien de temps pour nous y préparer ? demanda Shaka.
-Six semaines selon les estimations les plus pessimistes.
-Vous pourrez nous aider ?
-Non je vais attendre la fin du monde et la mienne par la même occasion en me tournant les pouces, dit Chronos sarcastique. Evidemment que je vais vous aider, reprit-il plus sérieusement. De toute manière vous n'y arriverez pas sans moi.

La présidente éclata de rire. Tout ceci est complètement absurde. Comment deux hommes sans armes pourraient détruire des astéroïdes ?

-Madame la Présidente, dit Shun, je sais que c'est un peu difficile à croire mais nous pouvons en être capable. Connaissez-vous la mythologie grecque ?
-Oui.
-Et bien ce ne sont pas des mythes. Jusqu'à cette guerre il y 150 ans les dieux existaient vraiment. Les dieux ont passé beaucoup de temps à se battre. Ils ont donc créé des armés de mortels. Ces Guerriers avaient des capacités bien au-dessus de la normale. Ils pouvaient porter des coups à la vitesse de la lumière, invoquer des tempêtes, ouvrir des dimensions parallèles, provoquer un big-bang. Puis ils se sont livrés la guerre de trop et ils ont tous disparu sauf Chronos qui s'est intégré à un système informatique et nous deux qui avons été projetés dans ce présent. Chronos a perdu ses pouvoirs de dieu. Etrangement nous n'avons pas perdu nos pouvoirs de guerrier. Je sais, c'est dur à croire. Venez, nous allons vous montrer. Vous pouvez nous suivre Chronos ? On va à l'extérieur de la ville.
-Si vous prenez cette montre, oui.

Après un voyage à la vitesse de la lumière, la présidente était à moitié convaincue. Après une séance d'entraînement, elle n'eut plus de doute. Elle fit néanmoins continuer les recherches pour plus de sûreté.

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Cette fiction est copyright Elise Moreau.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.