Chapitre 15 : Sous le Sceau de Bronze


Hyoga

Cela faisait plusieurs minutes que j'avais senti que quelque chose de grave se passait. Pour moi évidemment, puisque j'étais à présent en train de livrer bataille contre Tmolos de la Privation, mais aussi et surtout pour mon maître.
Depuis qu'il était revenu au Sanctuaire, j'avais eu l'impression que le lien qui nous avait toujours uni était devenu encore plus puissant... et peut-être était-ce parce que je n'avais plus que lui. Et mes frères évidemment. Mais je savais que mon sixième sens ne me trompait actuellement pas. Il était arrivé quelque chose à Camus.
Non, il n'était pas mort, car j'aurais immédiatement senti la disparition totale de son cosmos, seulement, la flamme qui animait jusqu'alors toujours son esprit et son être s'était éteinte pour ne plus laisser que quelques braises qui menaçaient de disparaître à tout moment.
Tmolos me maintenait depuis quelques secondes par le cou et me traînait sur plusieurs mètres alors que j'arc-boutais mes jambes et mon dos pour desserrer la pression qu'il exerçait sur ma nuque. Si cela continuait comme cela, j'allais y laisser plus que les quelques cheveux blonds qu'il avait entre les doigts.
Je m'agitais en tout sens.
Jamais je n'avais encore rencontré des bras aussi durs, aussi puissants. Évidemment, les chevaliers d'or... mais eux, ne m'avaient jamais administré de tel corps à corps barbares. Je comprenais seulement à présent ce que signifiait le mot Berserker...
Alors que je subissais mon entraînement, Camus m'en avait quelques fois touché mot, mais sans vraiment insisté. Cela faisait des siècles et des siècles qu'Arès n'était pas revenu et personne au Sanctuaire ne s'était attendu à ce qu'il choisisse de refaire surface aussi soudainement. Surtout pas moi, qui croyait, après les combats dans l'Hadès, la paix enfin revenu.
Je tentais de faire trébucher Tmolos contre une des tombes devant lesquelles nous passions sans grand succès.
Depuis tout à l'heure, il ne disait pas un mot, rien, il n'émettait pas même un grognement et cela m'intriguait. J'aurais préféré qu'il me lance au visage quelque insanité, car cela, au moins, aurait signifié qu'il était vivant, et non pas une simple machine à tuer comme j'en avais pour l'instant, non sans un certain effroi, l'impression.
Je lâchais un hurlement alors que du sang me remontait dans la gorge soudainement, me coupant la respiration.
-Lâche-moi! tonnais-je en remuant dans tous les sens ce qui n'avait pour toute conséquence que d'accentuer ma douleur.
Je me ruais comme un animal prit d'une crise de fureur, mais cela ne servait strictement à rien. Ses bras étaient durs comme de l'acier et ma nuque ressemblait pour l'instant plus à un fétu de paille qu'à autre chose entre ses deux puissants membres. Je n'avais pas même eu le temps de lui parler ou de faire quoi que se soit, qu'il avait foncé sur moi, fendant les airs et la distance qui nous séparait et m'avait attrapé au collet, me laissant sans voix, d'abord de surprise, ensuite, parce qu'il m'était tout bonnement impossible de parler. Je ne poussais que des grognements rauques et pénibles et cherchais à tout prix mon souffle.
Toutes mes réflexions se cumulaient et s'embrouillaient dans mon esprit : Athéna, mes frères, les chevaliers d'or, mon maître, cette guerre sainte, les précédentes...
J'aurais aimé pouvoir reprendre mes esprits, comprendre ce qui se passait et qui était ce mystérieux guerrier qui m'entraînait je ne savais où pour son bon plaisir mais je ne le pouvais pas. Je devais admettre que pour l'instant, j'étais en position de faiblesse.
-Tmolos... dis-je, dans un souffle qui provenait du fin fond de mes poumons.
Mais que m'arrivait-il? Je n'allais pas me laisser abattre comme cela par une prise aussi simple. Je m'étais battu contre des chevaliers du Sanctuaire de la caste du bronze à celle de l'Or, j'avais risqué ma vie face aux guerriers divins, puis aux Généraux, j'avais du combattre des Spectres et enfin, Hadès lui-même. Hadès le dieu des morts. Alors, lui, ce Tmolos, ne pouvait guère m'impressionner, du moins pas aussi facilement, ni aussi rapidement.
J'intensifiais ma cosmo-énergie et la fit soudainement exploser alors que la température de l'air diminuait aussi subitement que je réussissais à faire lâcher prise au monstre qui me servait d'ennemi.
Je sentais peu à peu ses bras se desserrer alors que j'avais posé le bout de mes doigts de neige sur lui et que la glace prenait lentement possession de son être. Le Berserker poussa un cri étrange, et me laissa ainsi le temps de bondir en arrière pour lui faire face.
Je tapais rapidement mes pieds contre le sol en sautillant sur place et en remuant mon cou pour reprendre mes marques et pour mieux débuter ce combat qui ne commençait point sous de bons auspices.
-Alors, Tmolos, dis-je toujours aussi distant qu'à mon habitude... étonné?
Il regardait ses bras avec incrédulité, l'air un peu hébété et je fronçais les sourcils. Il ne m'avait pas l'air très vif... quel était donc ce déchet qu'Arès m'avait envoyé?
J'esquissais un sourire à ma propre phrase.
-C'est avec cela que tu comptes m'abattre?
Je sursautai. Je ne m'étais pas attendu à l'entendre si soudainement parler, lui qui depuis le début avait placé notre affrontement sous le signe du silence.
-Alors là, tu me fais bien rire... c'est pourtant toi le chevalier du cygne dont on chante les louanges dans le Domaine Sacré d'Athéna, je m'étais attendu à quelque chose de mieux, de grandiose devrais-je même dire, mais alors là, laisse moi te dire que je suis fichtrement déçu.
J'entendis un étrangement bruit de craquement et la glace sauta d'un seul coup, comme si cela n'avait été guère plus qu'une fine pellicule de verglas. Je claquais ma langue avec impatience contre mon palais. Et dire que pendant quelques secondes, je l'avais cru stupide... il n'y avait vraiment que moi pour songer à de pareilles choses. En fait, si Tmolos avait regardé ses bras de cet air dubitatif, c'était probablement car il se riait de mon attaque. Et bien, cela allait m'apprendre à me croire trop vite vainqueur.
Je repoussais une mèche de mes cheveux blonds en arrière et qui m'empêchait de voir de mon désormais unique oeil.
Cela ne me gênait pas tellement d'être borne. Cela me permettait d'emporter partout avec moi le souvenir d'Isaak. Etrange façon d'évoquer un ami évidemment, mais... je ne voulais pas penser à cela. Pas pendant que je combattais et que je ressentais de seconde en seconde la cosmo-énergie de mon maître s'affaiblir.
J'aurais d'ailleurs aimé pouvoir venir en aide à ce dernier, mais j'étais totalement impuissant et je savais fort bien que je n'en avais pas le droit.
Tmolos me dévisageait en face avec l'air d'un ogre prêt à dévorer l'enfant que je représentais à ses yeux. Je réprimais rapidement la moue dégoûtée qu'il m'inspirait et lui déclarais, pour me laisser le temps de reprendre un peu ma respiration, qui avait bien failli être définitivement coupée :
-Tu n'es pas très bavard, moi qui croyais les Berserkers explicitent quant à leurs exploits guerriers...
Silence.
Je le dévisageais, un soupçon d'incrédulité dans le regard. Il avait vraiment un comportement étrange que je ne m'expliquais pas. Il était pour l'instant parfaitement immobile, campé sur ses deux jambes, ses yeux, que j'aurais comparés sans peine à ceux d'un serpent tant la pilule semblait s'étendre dans le sens de la hauteur, fixer sur moi. Je frissonnais.
Il m'avait dit son nom et s'était rué sur moi... un combattant du dieu de la guerre dans toute sa splendeur.
-Tu ne parles jamais... avançais-je.
-Non, je ne parle pas aux morts.
Mon sang se glaça mais il était loin d'être le premier, et espérais-je le dernier, à formuler de telles menaces à mon encontre. Au début, alors que je n'étais qu'un chevalier sans expérience et qu'on me disait froidement cela, je restais souvent quelques secondes sans réaction. J'étais alors plus facilement impressionnable, même si je ne laissais pas mes émotions transparaître aisément. C'était étrange de dire cela à mon âge... comme si j'avais des siècles et des siècles de carrière de combattant à mon actif, ce qui ne finalement pas totalement faux tant j'avais traversé d'épreuves.
-Oh, je t'en prie, rétorquai-je, trouve autre chose!
Tmolos ne répondit pas. Visiblement, il n'était pas le genre d'homme à aimer faire traîner les combats en longueur, ce en quoi je l'approuvais totalement. Le plus vite pouvais-je me débarrasser de lui, le plus vite pouvais-je reprendre mon chemin pour arriver auprès d'Athéna.
Jusqu'à présent beaucoup de chevaliers d'or avaient déjà livré de sanglants affrontements qu'ils avaient remportés à un prix parfois très élevé.
L'image de mon maître s'imposa à cet instant dans mon esprit. Aucun d'entre eux n'avaient reculé ni hésiter à employer toutes les techniques qu'ils maîtrisaient pour venir à bout de leurs opposants. Shun et Seiya aussi, mes deux frères, s'étaient battus. Et maintenant c'était mon tour de faire mes preuves. Je devais faire exploser mon cosmos, me sublimer pour la gloire d'Athéna et pour celle des hommes.
Je m'inclinais légèrement en avant, prêt à fondre sur mon adversaire.
Il n'avait pas envie de parler, et bien soit, j'allais moi aussi aller à l'essentiel.
Je fonçais sur lui à une vitesse approchant celle de la lumière, le poing en avant et envoyant sur lui l'attaque que j'avais appris à maîtrise en premier, alors que je n'étais qu'un enfant encore innocent de l'art complexe des luttes :
-Diamond Dust!
Tmolos mit rapidement ses mains devant lui et je vis une aura d'un rouge écarlate l'entourer. J'envoyais, avais-je l'impression, des milliers de flocons à la seconde, qui auraient pu déchirer n'importe qui ou quoi sur leur passage et Tmolos n'avait guère l'air de ressentir plus qu'une légère brisé d'été.
Je récidivais mon coup, en serrant les dents de rage alors que de petites gouttes de sueur perlaient à mon front. Je devais tout mettre, tout donner dans cette dangereuse attaque que je maîtrisais parfaitement.
Je poussais un cri d'encouragement, que je me destinais ostensiblement, comme pour me permettre d'envoyer avec encore plus d'intensité la neige coupante comme du verre que Camus m'avait appris à diriger contre mes ennemis.
Tmolos recula de quelques pas, sous l'impact de mes coups cumulés alors que je sentais un bref éclair de joie monter en moi. Il cédait...
Tout autour de nous, la neige tombait en affale, si bien qu'il me suffisait de tourner à peine la tête pour me retrouver dans mon camp d'entraînement de Sibérie Orientale.
Il cédait... il recula encore d'un pas... pour mieux prendre appuie et... me renvoyer toute la décharge de mon cosmos.
Autrefois cela m'aurait projeté en arrière, mais maintenant, je savais parfaitement stopper mes propres coups, on avait trop de fois pratiqué avec moins l'effet du miroir et il n'était plus question que cela se reproduise!
Le tourbillon glacé qui avait envahi le paysage cessa soudainement au moment ou je brisais la glace que j'avais envoyé entre mes doigts.
-Et bien, Cygnus, essoufflé?
-Je ne parle pas aux morts, répondis-je.


Shiryu

Etiar riait des coups que je lui portais. Je n'avais que faire de ses moqueries de toute manière, car seule ma victoire finale comptait, peu importe ce que je devais faire pour cela.
Depuis le début de notre affrontement, j'avais pourtant l'impression qu'il voulait à peine me parler, qu'il lâchait quelques mots du bout des lèvres et je ne savais pas qu'en parallèle, l'adversaire de Hyoga adoptait, traits pour traits, le même comportement. Mais je sentais bien qu'après Seiya et Shun, un autre de mes frères devaient gérer l'arrivée d'un combattant d'Arès. J'espérais en tous les cas sincèrement qu'il y parvenait mieux que moi.
Etiar m'attrapa par la cheville et me propulsa en l'air alors que je tentais un salto pour retomber, comme un chat agile et souple, sur mes pieds.
Personnellement, je n'avais que peu de mal à deviner pourquoi ils agissaient de cette manière. D'habitude un berserker se montrait extrêmement explicite sur ses exploits guerriers, mais là... il semblait qu'Etiar faisait l'impasse sur ce sujet.
Je savais pourquoi. Arès avait peur.
L'empereur des guerres nous observait depuis le début sur Azura, s'amusait de ce que nous faisions, un demi-sourire aux lèvres, mais plus le temps passait, plus l'expression de son visage devait changer pour se muer en une grimace d'inquiétude ou se reflétait toutes ses anxiétés.
J'avais la nette impression que les temples des empereurs n'allaient pas tarder à être traverser... et Arès pouvait s'en mordre les doigts. Il nous avait, comme tous avant lui, mésestimés et en commettant cette fatale erreur, il avait lui-même décidé du jour de sa mort.
Je levais rapidement la tête vers les cieux et vis les sombres nuages qui s'amoncelaient depuis un long moment au-dessus d'Azura. Depuis combien de temps étais-je sur ce lieu éloigné de tout, des lois, des heures qui défilaient comme du monde? Nous étions partis en même temps que les premiers rayons du soleil arrivaient sur la Grèce et maintenant, nous devions nous trouver au milieu de l'après-midi, si ce n'était même plus. Le soleil n'allait plus tarder à se coucher... encore deux ou trois heures et nous pourrions peut-être sceller cette promesse que nous nous étions tous faits mentalement.
Cette pensée insuffla en moi une nouvelle vague écumante de courage et je me préparais à déclencher "La colère du Dragon".
Oui, j'allais observer le coucher de l'astre du jour et ensuite, à la nuit tombée, je rentrerais avec mes frères et mes aînés dans le Domaine Sacré. Je hochai la tête d'un geste décidé et vigoureux et criais à Etiar :
-Que la colère du Dragon t'emporte!
Je vis Etiar être soulevé par une colonne d'air qui prenait la forme de mon animal fétiche, des petites particules de terre s'arracher du sol et voler tout autour de se tourbillon que je formais. Le soldat que j'avais pour ennemi poussa un cri mais je sentais parfaitement que cela ne suffirait pas. Je me concentrais encore plus pour augmenter l'intensité de l'attaque que je déclenchais.
-Inutile de te fatiguer!
J'entendis le bruit de son corps retomber lentement à terre et compris qu'il ne s'était nullement abîmé au sol, mais qu'il avait fait cesser le déchaînement de mes forces par sa seule volonté.
-Écoute Dragon, je n'ai pas de temps à perdre avec un aveugle, est-ce clair?


Julian

Cela faisait des heures que je courrais et je me maudissais de ne pas pouvoir me téléporter, tout comme je maudissais Arès d'avoir déclenché cette stupide guerre sainte!
Je serrais les dents pour m'empêcher de jurer de façon inconvenante et levais les yeux au ciel d'exaspération.
Je n'allais pas assez vite, j'étais beaucoup trop lent... j'étais sur cette île depuis déjà plusieurs heures et voilà que je me retrouvais en train de franchir de gigantesques ravins dans lequel j'étais déjà tombé à deux reprises!
Je fermais les yeux quelques secondes, le temps de me donner le change et de me permettre de me composer une nouvelle attitude.
J'étais d'un naturel particulièrement calme et posé mais je sentais qu'Athéna se rapprochait inexorablement du temple d'Arès et qu'elle se jetait finalement en plein milieu du piège de son adversaire sans le savoir.
Mon pied, qui était jusqu'à alors appuyé au bord d'un rocher, que j'avais jugé assez solide pour supporter mon poids, dérapa, et j'entendis un craquement qui ne m'était pas inconnu.
Je me raccrochais de toutes mes forces à la paroi tout en essayant de garder le coffret que j'avais depuis le début dans la main.
Il fallait que je réussisse à lui remettre tout de même! J'étais le dieu des mers et je savais parfaitement que je ne risquais strictement rien et pendant ce temps-là...
Je me mordis les lèvres avant de me hisser au sommet. Si seulement j'avais pu bénéficier de l'extraordinaire pouvoir des chaînes nébulaires!
Je ne trouvais d'ailleurs plus depuis bien longtemps des traces du cosmos de Shun dans l'atmosphère, qui semblait s'être quasiment éteint. Mais je le ressentais plus que celui d'Aldébaran précédemment. Le chevalier du Taureau m'avait fait perdre un temps précieux, mais je pensais avoir réussi à le remettre sur le chemin de la vie.
C'était à lui à présent, et à lui seul de choisir s'il voulait se diriger dessus ou partir dans le sens opposé. La décision n'était plus de mon ressort.
Je hochais la tête. S'il était un chevalier d'Athéna, il ne faisait aucun doute qu'il partirait en courant dans un sens et qu'il rejoindrait celle qu'il devait servir et protéger.
Je plantais mon trident dans le sol quelques instants pour m'appuyer sur lui et reprendre ma respiration.
Ce terrain représentait un véritable entraînement sportif à quiconque voulait le traverser, et moi qui n'avait jamais reçu la moindre leçon de combat, j'étais quelque peu déstabilisé par ses efforts digne d'Héraclès, à mon goût du moins.
Toute à l'heure, j'avais eu le choix entre quatre domaines et j'avais mis plusieurs minutes à repérer dans lequel Saori s'était engagée.
Mais je n'avais pas désespéré et avait choisi de me fier à mon instinct... qui n'avait pas berné! J'étais sur la bonne voie, je le sentais, car plus je courrais en avant, plus l'intensité bénéfique du cosmos d'Athéna était présente.
Je pris une profonde inspiration et repartis en courant. Pas le temps de penser plus longtemps!


Ikki

Shura et moi étions à présent probablement l'un des derniers petits groupes existants sur l'île mais je savais parfaitement que nous n'allions pas tarder à être séparés car une ombre se dirigeait droit sur nous.
Je savais que mon adversaire m'attendait maintenant à quelques mètres de là et qu'il fallait que je laisse à Shura le temps de passer. Le chevalier du Capricorne était le seul de nous deux à pouvoir vaincre un empereur d'Arès, je m'en rendais bien compte en voyant tomber les uns à la suite des autres mes frères et mes aînés.
Shun... cela faisait un moment que son énergie ne faisait plus que stagner dans les airs. Il avait probablement des chances de mourir mais je savais que pour l'instant, il se battait pour s'accrocher et quitter ce lieu maudit ou aucun de nous n'avait envie de terminer. Et puis, je n'avais pas le droit d'y penser et de me laisser déconcentrer. J'étais ici pour me battre, et plus encore pour vaincre.
Je sursautai en sentant la main de Shura me donner une tape sur l'épaule.
-Bonne chance, Phénix, me dit-il simplement alors que son visage gardait sa froideur et son habituel orgueil. C'est à ton tour maintenant, chevalier de Bronze et n'oublie pas que je ne suis pas le seul à compter sur ta victoire. Athéna t'attend.
Il n'ajouta rien et commença à courir en avant. Je me demandais pourquoi il s'y prenait si longtemps à l'avance alors que mon ennemi n'était pas même encore là quand...
Une silhouette jaillie de nulle part, se mit à courser le gardien de la dixième maison du Zodiaque. Celui-ci esquiva un coup en bondissant en l'air, et je me précipitais vers l'inconnu qui se croyait visiblement dispensé d'un combat face à moi.
En m'entendant arriver, mes mouvements dans la boue étaient si bruyants que l'on ne pouvait les manquer, mon ennemi se retourna et esquissa un sourire carnassier qui ne m'impressionnait guère. Il n'était pas le premier à tenter de m'effrayer par une simple mimique, mais je n'étais pas de ceux-là.
J'avais maintes et maintes fois connu l'enfer. Et c'était à son tour d'aller y faire une petite visite... bien que je supposais qu'il serait probablement très à l'aise parmi les Spectres.
J'attrapais mon adversaire par le poignet et le tirait avec violence en avant, pour donner le change à Shura qui s'éloignait de plus en plus, pour finalement se fondre dans l'horizon.
J'administrais une volée de coups à mon ennemi. Il n'étais pas question que je fasse comme les autres et que je lui donne la possibilité de parler ou d'attaquer le premier. Je n'avais pas de temps à perdre. Et je me fichais de connaître son identité et son histoire. Il pouvait bien être un ancien empereur ou Dieu, cela n'avait pas la moindre importance. Tout ce qui comptait était ma victoire.
J'envoyais ce mystérieux berserker en l'air et lui dédiais une décharge de cosmos surpuissante.
Son corps retomba ensuite dans un bruit de fracas dans les marais et je m'approchais de lui à vive allure pour le reprendre par les cheveux. Il n'allait pas faire long feu, je pouvais le garantir! Généralement, mes frères avaient la mauvais habitude de laisser une possibilité, de les engager à s'expliquer sur leurs motivations mais avec moi, il n'était pas question de cela.
Athéna avait besoin de moi. Et ce vulgaire freluquet allait passer de vie à trépas qu'il le veuille ou non.
Je n'aurais peut-être pas été aussi dur, quoique, s'il s'était s'agi d'un autre combattant qu'un de ceux des troupes d'Arès. Mais ceux-ci étaient semblables, si ce n'était même pire, aux Spectres, et on ne pouvait plus rien faire pour eux.
Encore, avais-je compris alors que je combattais les ombres d'Hadès, ceux-ci croyaient-ils que l'empereur des morts allait ramener Élision sur terre - quelle naïveté tout de même!- et c'était sans doute pour cela qu'ils s'étaient mis à son service... mais les berserkers étaient tous parfaitement au courant de ce qui se passait et des plans de leur maître. Et c'est cela qui m'écœurait. Ils n'avaient strictement aucune excuse, de toute manière, je n'en aurais tolérer, pour justifier leur comportement barbare et sanguinaire.
Je haussais les épaules en attrapant par une touffe de cheveux mon opposant et lui appliquais un violent coup de poing sur les pommettes.
Celui-ci cracha du sang. Il ne s'attendait visiblement pas à être accueilli de cette façon, mais cela, je n'en avais que faire. C'était son problème, et le mien était d'en venir à bout. Je jetais un regard autour de moi.
Toujours des étendues de boue à perte de vue. C'était pour cela que le soldat que l'on m'avait envoyé ne devait pas prendre l'avantage au risque de se retrouver en position de force sur un terrain qu'il connaissait et dont j'ignorais tout.
Mon ennemi se courba en arrière alors que je l'attrapais par les épaules. Il riposta subitement à mes coups répétés en m'envoyant son poing dans l'abdomen, me faisant reculer à des mètres et des mètres de distance.
-Tu ne croyais pas que j'allais bien gentiment te laisser faire! hurla-t-il, probablement humilier par tout ce que je lui avais fait subir.
-En fait, j'y comptais un peu, répliquai-je, non sans une pointe d'arrogance qui fit blanchir les os de ses poings qu'il serrait convulsivement.
-Qui es-tu espèce de fou... tu n'es pas un chevalier d'Athéna?!
-C'est toi qui oses me traiter de fou, répondis-je dans un éclat de rire que je n'arrivais pas à contenir. Ou l'ironie ne va-t-elle pas se nicher? Pour ton information on m'appelle Ikki, le chevalier du Phénix.
-Ikki? C'est bien toi qui a été entraîné sur l'île de la mort et que l'on surnomme l'oiseau immortel?
J'acquiesçai d'un signe de tête.
-Je vois que tu es bien renseigné. Et à qui ai-je affaire?
-Je me nomme Aristos de l'Oubli.
-Et bien adieu Aristos de l'Oubli! Par les ailes du Phénix!
Des tourbillons de feu naquirent autour de nous alors que je projetais mon attaque sur mon opposant, qui n'allait pas vivre plus de quelques secondes après cela.


Hyoga

A dire vrai, je m'en sortais assez difficilement.
Je sentais que dans un autre domaine, Ikki, mon frère, menait une lutte qu'il remportait haut la main. Je sentais les flammes qui s'échappaient de son cosmos et qui venaient presque réchauffer le mien à distance. Tmolos me donnait du fil à retordre, mais il n'y avait aucune raison que je perde espoir car le combat était loin d'être terminé. Il suffisait juste que je m'accroche, que je me concentre pour gagner, je le savais. Rien ne m'avait encore jamais résisté. J'étais né pour être le gagnant, pour faire triompher le bien et je n'allais pas faillir à ma mission.
Et puis, Camus comptait sur moi. Je n'avais pas le droit de le décevoir et si jamais il devait lui arriver quelque chose, je voulais pouvoir venger son honneur. Je devinais qu'il avait eu affaire à un élément particulièrement coriace de la garde d'Arès, bien plus qu'un simple soldat comme moi-même.
-Très bien mon pauvre Hyoga, je vais abréger ce pénible moment d'attente et te permettre de rejoindre les enfers rapidement car je me sens dans un jour de bonté, mais quoi de plus normal alors que l'on s'apprête à assister au triomphe de son maître.
-Je ne le sais que trop bien, répliquai-je, car je me réjouis de la victoire d'Athéna!
Tmolos éclata de rire et un éclair de sauvagerie illumina soudainement ses yeux de serpent. Il rejeta d'une mains ses longs cheveux châtains virant au blanc et me fixa.
C'était maintenant ou jamais:
-Par la poussière de diamant! hurlais-je en recommençant mon attaque sur mon opposant.
Il n'était pas question que je me laisse faire, je devais le vaincre, comme Ikki était sans doute entrain de le faire en parallèle à moi et que Shiryu devait tenter de le faire. Il fallait que nous nous soutenions mutuellement pour nous permettre d'obtenir la victoire.
Les nuées de flocons de glaces et neige fonçaient sur mon adversaire, l'entouraient, le soulevaient de terre alors que le bruit de la bise soufflait tout autour de nous. De nouveau, je transportais Azura en Sibérie Orientale, du moins, en avais-je l'impression.
Mais le coup n'eut guère plus d'effet que la première fois et je vis Tmolos arrivé à toute allure des airs en ma direction. J'avalais difficilement la salive et essayais d'esquiver, mais il était trop rapide et il me saisit de nouveau par le coup, comme au début de notre opposition.
-Et si je te retirais ton autre oeil... comment ferais-tu aveugle chevalier?
En entendant cela je me débattis de toutes mes forces, remuant comme un bon diable. Il n'étais pas question que je perde la vue. Shiryu avait mis des mois à récupérer de son affrontement contre Argol et j'allais mourir s'il supprimait l'un de mes sens.
Je secouais ma tête en tout sens et je vis son doigt se rapprocher lentement de mon visage.
-Non, criais-je, non!
Je bougeais mon visage à la dernière seconde en me dégageant de son étreinte meurtrière et Tmolos ne put donc perforer que mon arcade sourcilière qui réagit immédiatement en saignant abondamment.
Et maintenant, j'étais contraint de fermer mon seconde oeil. L'une des pires choses qui pouvaient m'arriver venait de se produire.
"Oh, Isaak, songeais-je, face que tu me prêtes un peu de ta force d'où tu es... à nous deux nous pourrions vaincre n'importe qui, même un Berserker".
Je priais mon ami, celui que j'avais si longtemps considéré plus comme un compagnon de route que comme un simple condisciple et étrangement, un autre cosmos m'entoura. Mais ce n'était pas celui de mon comparse des glaces, non!
Cette aura était verte comme celle... de mon frère! De Shiryu!
-Hyoga! Hyoga!
Je n'en revenais pas. J'avais la sensation d'entendre Shiryu me parler comme s'il se trouvait à mes côtés. Pourtant... il était en train de combattre dans un autre domaine! Alors? Comment cela se faisait-il?
-Écoute-moi, Hyoga. Je ne sais que trop bien ce que cela fait lorsque l'on se retrouve aveugle et cela m'est arrivé plusieurs fois au court des combats que je t'ai racontés.
Je hochai la tête alors qu'en face de moi, Tmolos devait probablement adopté un air dubitatif. Mais étant aveugle, je ne pouvais guère affirmer cette impression.
-Comment faire Shiryu? demandais-je d'une voix calme pour essayer de comprendre le mieux possible les paroles qu'il allait prononcer.
-Tu dois te fier à ton sixième sens, voir par lui. Et guide tes gestes grâce à ton septième sens. Si tu combines tout cela, Hyoga, tu verras Athéna, et elle te guidera dans chacun de tes mouvements. Mais surtout, en aucun cas, tu ne dois paniquer. Reste calme, même si cela ne marche pas au début. La sérénité sera le secret de ta réussite.
La voix de Shiryu se tut.
-Merci mon frère, murmurais-je à son intention car j'étais persuadé qu'il pouvait m'entendre.
Il avait eu la force d'interrompre son combat pour me venir en aide, mon frère. Une fois de plus, je l'admirais, je les admirais tous. Et j'allais leur montrer que j'étais digne de me battre à leur côté!


Shiryu

Etiar ne me laissait décidément pas grande autre possibilité que de redoubler mes coups car, même si cela ne l'abattait pas, au moins cela avait-il le mérite de le tenir en respect.
Il était à plusieurs mètres de moi, mais je sentais que plus les secondes défilaient, plus il se rapprochait de ma personne. Il jouait avec mes nerfs avec habileté, sans se douter que j'étais l'une des personnes, et ce depuis mon enfance, les plus calme existantes.
Je venais juste de venir en aide à Hyoga et j'avais du tenter cela au péril de ma vie. J'avais senti que quelque chose de grave était en train de lui arriver et c'était sans doute parce qu'il dégageait des ondes d'appel à l'aide que j'avais pu voler à son secours.
J'étais toujours là quand l'un de mes frères avait besoin de moi et la terrible situation dans laquelle il se trouvait plongé ne pouvait pas me laisser indifférent puisque je l'avais moi-même vécu face à Argol, mais aussi à Fenrir et enfin à Krishna. Il était clair que mon sens de la vue m'avait apporté, depuis que j'étais chevalier, bon nombre de problèmes.
Hyoga ne savait plus quoi faire, il s'était retrouvé désemparé tout comme moi la première fois que ce drame m'était arrivé, mais contrairement à ce que j'avais enduré, j'allais lui offrir un soutien, une expérience, même si cela devait me déconcentrer de mon affrontement quelques secondes.
Mon frère et moi venions d'établir un contact télépathique que nous ne souhaitions pas encore couper. Étrangement, j'avais le pressentiment que bientôt, j'aurais besoin de lui...
-Tu ne me sembles pas très puissant Shiryu, serait-ce là toute la force de ceux dont on chante les louanges jusqu'au Mont Olympe?
Etiar effleura du regard tout ce qui l'entourait alors qu'il semblait observer le vague. Il avait un visage rêveur pendant quelques instants, il n'avait plus eu l'air d'un de ses barbares qu'Arès paraissait affectionner plus que tout. Le contraste avait été notable mais je n'avais pu que le deviner en raison de mon infirmité, que je ne percevais plus comme un handicape. Au contraire, à présent, j'arrivais presque à deviner les mimiques, voire même les coups de mes adversaires avant qu'ils ne me les envoyaient.
-Pourtant, quand l'empereur de ce domaine m'a envoyé à ta rencontre car j'étais l'un de ses derniers hommes, je me suis réjoui à l'idée de me retrouver opposer au célèbre Shiryu, le chevalier de Bronze du Dragon qui a maintenant valeur de légende et de mythe pour tous les guerriers désireux de combattre. Je te voyais...
Etiar chercha ses mots en claquant des doigts pour s'aider.
-...Comme un défi qu'il me fallait relever. Tu vois, je me suis toujours perçu comme surpuissant et je sais que j'ai absolument raison, car Shiryu, nous ne sommes, ni l'un ni l'autre, de simples êtres humains. Nous sommes meilleurs, nous maîtrisons le cosmos, la force, sommes capable de plier n'importe quoi ou qui à notre volonté et c'est cela le vrai pouvoir. Qu'étais-je donc entrain de t'expliquer...
Mon ennemi scruta pensivement le ciel et je comprenais qu'il était en train de se déconcentrer et que sans s'en rendre compte, il baissait alors inconsciemment sa garde. J'allais attendre encore un peu, et allait pouvoir le pulvériser en quelques coups. Il me suffisait juste de faire preuve d'un peu de patience.
-Ah oui! Je voulais tester ma puissance par rapport à la tienne. J'étais sûr de l'emporter, je suis un berserker après tout, ne l'oublions pas, mais tout de même, je m'attendais à... rencontrer une résistance plus farouche. Je suis franchement déçu.
Etiar eut une moue boudeuse et il donna un coup de pied dans un cailloux qu'il projeta en avant avec vigueur. Il paraissait réellement absorbé par ses propres songes et je trouvais incroyable qu'il puisse ainsi dévier de son objectif premier. Ne craignait-il donc pas que je profite de son inattention pour l'attaquer?
-Par la colère du Dragon! criais-je soudainement en faisant éclater le silence qui était brièvement tombé entre nous.
Mon adversaire sursauta vaguement et dévia mon coup d'un revers de la main.
-Merci, Shiryu mais cette attaque, tu me l'as déjà servi.
Il bondit en arrière, en rattérri en douceur sur ses pieds comme le chat habile qu'il était probablement.
Je n'en revenais pas! J'étais complètement abasourdi! La colère du Dragon n'arrivait pas même à le faire vaciller. Mais quel était son secret? Il n'était pourtant qu'un simple soldat!
-Et maintenant, c'est à mon tour de te faire goûter à mes talents. Prépares-toi, car tu vas recevoir...
Etiar leva ses mains en l'air avant de pointer ses mains vers moi, un sourire presque démoniaque étirant ses lèvres fines et fendant son visage.
-Le Death Whirl!!!
Le hurlement résonna dans la tempête qui m'entourait de tout part et qui semblait être née des profondeurs de la terre. C'était trop tard, je n'avais pas été assez rapide et lui avait laissé le temps de passer à l'attaque.
Mon corps était soulevé de terre et je m'élevais à présent dans les cieux en tournant sur moi-même comme une vulgaire girouette. Je n'avais plus de contrôle sur mon propre corps et devinais le sol venir à ma rencontre alors que je menaçais de m'écraser en bas. La présence de mon adversaire était à présent dissimulée par l'ouragan qui se chargeait de mon cas et je ne pouvais guère le localiser. Où était-il passé? Et surtout que me réservait-il?
Je tentais vainement de me débattre, me rappelant les conseils du vieux maître me disant de m'harmoniser avec la nature me revenant en tête. Mais cette fois-ci, j'avais conscience que cette technique ne marcherait pas. Et ce n'était pas avec cela que j'allais arrêter une véritable apocalypse.
Etiar me faisait tourbillonner, me forçant ainsi à perdre mon sens de l'orientation et amenant peu à peu l'évanouissement vers moi. Mais je savais que je devais résister, exactement de la même façon qu'il avait résisté au coup que je lui avais porté. Je n'étais pas le premier venu durant une guerre sainte, et c'était à moi de le prouver.
Le Death Whirl s'accélérait, me projetait à présent contre les immenses arbres qui parsemaient les bois squelettiques que j'avais traversé depuis le début de la journée. Je sentais mes os craqués sous les diverses impactes que je subissais et je sentais le goût du sang envahir ma bouche et m'humecter les lèvres.
C'est à cet instant que je réalisais que je ne devais pas tomber à terre car sinon, je ne pourrais probablement plus me relever. La douleur qui m'assaillait de tout part était trop violente, trop cuisante pour que je me relève de pareille chute. Il fallait que je trouve autre chose et surtout, que je le fasse rapidement car la terre sa rapprochait de moi inexorablement et...
Trop tard, j'allais rentré en contact avec elle.
C'est ma jambe qui fracassa la première le sol et...
De la glace! De la glace à perte de vue qui amortissait ma chute et me permettait de glisser en direction de mon ennemi. Je donnais à tout allure un coup de cheville pour me propulser en avant sur ce terrain de verglas provisoire et arrivait jusque devant Etiar.
J'étais à genoux devant lui et je devinais que sa surprise signerait probablement son arrêt de mort.
-Par la colère du Dragon! criais-je à tout allure, alors que les mots se bousculaient dans ma bouche et que mon poing partait déjà dans les airs pour propulser mon opposant dans ces cieux d'ou je venais de retomber.
J'entendis Etiar être projeté alors que je n'en revenais pour ma part pas. De la glace! Et qui s'étendait tout autour de moi!
Une explication logique s'imposa immédiatement à moi. Hyoga était là-dessous. Il avait du sentir que je me trouvais en danger et avait voulu intervenir comme je l'avais fait précédemment en le conseillant.
J'esquissais un sourire en pensant à mon frère et en songeant que nous avions pris la bonne décision en maintenant le contact télépathique. Je me le représentais, face à son ennemi et en train d'interrompre sa bataille pour moi et ne pus m'empêcher de souhaiter qu'il ne lui soit rien arrivé par ma faute.
Une fois de plus, nous avions prouvé que notre amitié comptait bien plus que notre propre vie. J'aurais aimé pouvoir m'étendre plus longtemps sur ce sujet, mais j'avais Etiar à aller abattre définitivement si je ne voulais pas qu'il se relève et qu'il me menace à nouveau.


Ikki

Je m'approchais en courant de l'endroit en Aristos venait de retomber et m'apprêtais à lui asséner encore bon nombre de coups si le besoin s'en faisant sentir.
Décidément, les berserkers me décevaient! Enfin, j'imaginais sans peine que les commandants et les empereurs devaient être bien meilleurs que cela car sinon, jamais ils n'auraient été capables de mettre en difficulté les chevaliers d'or.
Mais Arès avait tout simplement du me sous-estimé -ce ne serait après tout pas le premier à commettre cette erreur- et m'avait probablement envoyé un de ses éléments les plus faibles.
J'évoluais avec vivacité dans la boue, pour retrouver le lieu ou les ailes du Phénix avait projeté mon ennemi. Je tournais sur moi-même... j'aurais juré que ce n'était pas loin, pourtant. Je sursautais.
Aristos avait disparu. Enfin, j'espérais qu'il ne comptait pas me surprendre par cette antique ruse et je sondais l'eau d'un regard accusateur et aiguisé. Il était sans doute en-dessous et je devais me fixer sur mon sens de l'ouïe car je savais que je ne pouvais malheureusement pas évaporer l'eau... évaporer l'eau? Et pourquoi pas?
Je me demandais même pourquoi je n'avais pas eu cette brillante idée avant. C'était pourtant bien la technique que j'avais appliqué avec Shaka alors que nous nous battions dans son temple.
Je réfléchis quelques instants. Oui, la puissance des empereurs devaient être colossales, voire même divine pour mettre en difficulté une personne comme le chevalier de la Vierge. Cependant, malgré la disparition de son cosmos, l'éventualité de son décès n'arrivait pas à s'insinuer dans mon esprit.
Cet homme, qui tenait d'ailleurs plus de la divinité que d'autre chose, était à part, sa force sans commis mesure et nul n'était capable de venir à bout de lui. Je secouais la tête... quoi qu'on me dise, j'étais intimement persuadé que Shaka vivait encore.
Mon sixième sens me le soufflait et ce dernier ne m'avait jamais trahi.
Je devais rapidement me sortir de mes pensées et me fixer sur les eaux que j'allais projeter de tout part, avant que mon adversaire ne profite d'un moment d'inattention.
J'intensifiais ma cosmo-énergie à son paroxysme, car je savais qu'à ce stade, elle était brûlante comme les laves du volcan que j'avais autrefois bien connu.
Je sentais l'eau, si je pouvais désigner cet étrange liquide de cette manière, bouillonnée autour de moi et devenir plus fluide qu'auparavant. Je me concentrais, déjà prêt à récidiver mon coup contre Aristos que je m'attendais à voir surgir des entrailles des marais où il s'était tapi.
L'eau forma bientôt de petits tourbillons alors que je serrais les dents tout en l'observant diminuée de plus en plus vite. Il fallait usé d'une grande dose d'énergie pour parvenir à ce résultat et à aucun moment je n'avais songé qu'Aristos arriverait des cieux comme il le faisait à l'instant même où je relevais la tête.
Je sentis son pied percuter douloureusement et de plein fouet ma mâchoire alors qu'il éclatait de rire. Je me retrouvais quelques secondes dans cette boue putride que j'avais tenté de faire disparaître et fermais les yeux pour m'éviter de devenir aveugle... comme cela était arrivé à Hyoga.
J'avais senti son appel de détresse tout à l'heure, mais j'avais préféré ne pas y répondre Je connaissais le chevalier du cygne, mieux que beaucoup de personnes et je n'avais aucun mal à deviner qu'il remporterait, avec ou sans mon aide, la victoire. Nous étions tous gagnants de toute manière, car nous nous trouvions tous dans le camp d'Athéna.
Cette dernière phrase me fit jaillir des marécages et je me précipitais de nouveau vers Aristos. Nous n'avions pas le temps d'échanger le moindre mot mais je savais qu'il écumait de rage à cause de tout ce que je lui faisais subir. Mais je devais reconnaître qu'il fallait une endurance hors du commun pour se relever des "Ailes de Phénix". Peut-être qu'après tout, j'étais celui de nous deux qui avait sous-estimé l'autre; En ce cas, c'était une erreur à corriger rapidement, en redoublement ma vitesse, ma force et mon envie de vaincre.
Les coups fusaient de toute part et résonnaient dans le paysage alors que nos bras et nos jambes s'entrechoquaient et s'entremêlaient avec une rapidité désarmante. Je devais admettre qu'au corps à corps et quand il se sentait prêt, Aristos se défendait plutôt bien, mais pas assez pour moi.
Il me repoussa en arrière avec un violent coup qu'il m'assena dans la cheville. Je faillis perdre mon équilibre mais récupérais rapidement ma stabilité.
-Phénix, tu vas payer très chèrement l'affront que tu viens de me faire subir!
-De quoi parles-tu? répliquai-je acerbe. On a l'impression que ta défaite ou ta perte de terrain dans le combat t'étonne... pourtant avec ta force, cela ne devrait guère!
Je fronçais les sourcils avec impertinence alors qu'Aristos s'enfonçait ses ongles dans la paume de ses mains pour contenir la fureur qu'il éprouvait vis à vis de ma personne.
Je n'avais strictement rien à faire de ce qu'il pensait, je n'étais pas concerné. Seule ma victoire m'importait et je devais y concentrer toutes mes énergies. Je savais que l'on pourrait avoir besoin de moi dans le Temple d'Arès et que je ne devais plus laisser traîner ce combat.
Je pointais à toute allure mon doigt vers lui et il dut croire au début que je le menaçais simplement par ce signe. Un fil orangé s'échappa de mon index et vint percuté le front de mon ennemi, qui vacilla en arrière, sans comprendre de quoi était-il victime. Je venais de lancer ma macabre illusion et je n'avais donc plus rien à faire sur ce terrain de combat...
Je toisais de la tête au pied ce qui avait été mon opposant. Guère résistant à dire vrai, et j'étais presque déçu, enfin façon de parler. Au moins allais-je pouvoir être plus utile à Athéna lorsqu'elle se trouverait face à l'empereur de la guerre, ou alors à Shura, s'il avait besoin qu'on lui prête main forte durant son combat, même si je devinais que celui n'aurait jamais, orgueil obligeant, accepté le moindre secours.
Je haussais les épaules et me détournais de ma victime, imperturbable. Je m'éloignais ensuite de lui, évoluant dans ces marécages que je ne connaissais que trop et dont j'étais maintenant totalement dégoûté.
Je levais les yeux au ciel et remarquais que le soleil descendait peu à peu, pour nous signaler que la guerre sainte touchait vers sa fin, et que d'ici quelques heures, guère plus de deux ou trois, nous serions délivrés, soit par la victoire, soit par la mort, de cette épouvantable carnage dans lequel Arès nous avait plongé.
Comme il était étrange de se dire que d'ici peu de temps, on entendrait plus le bruit des fracas des combats, on ne verrait plus des colonnes lumineuses s'élevées dans les cieux, on entendrait plus des hurlements résonnés dans le calme paysage... comme si toute ceci n'avait jamais existé.
Notre passage sur Azura, car je ne doutais pas que nous allions vaincre le mal et une nouvelle fois faire triompher le bien, allait être considéré comme un instant hors du temps, hors du monde, qui n'aurait plus sa place dans nos existences et qui ferait figure de parenthèses.
Je secouais la tête car c'était ainsi depuis bien longtemps. On se battait, se déchirait, se meurtrissait pour une cause que l'on savait juste, on croyait mourir pour les hommes, pour défendre Athéna, et puis on revenait à la réalité, très affaibli, au bord du gouffre de l'enfer, mais on s'accrochait. Pour la prochaine fois où il y aurait à lutter. Ce n'était pas une fatalité, même si certains étaient parfois tenter de le prendre comme tel dans des moments d'affliction profonde, c'était ainsi et il fallait toujours se relever, continuer d'avancer encore et encore, car la vie devait reprendre ses droits et nul n'avait le droit de les lui arracher.
J'étais sans doute dur, je n'en savais rien, mais je saisissais que jamais je ne me laisserais abattre par quoi que se soit, même pas par le fait que peut-être, après qu'Arès ait été vaincu sur l'autel de la justice par Saori et nous autres, de nouveaux ennemis surgiraient.
S'il fallait se battre encore je me battrai, et mieux que jamais.
Tout à coup je sentis derrière moi quelques chose percuter mon crâne et je m'écroulais dans les eaux boueuses où j'évoluais depuis alors quelques temps.


Hyoga

A l'autre bout de l'île, non! Ikki!
Je venais de sentir mon frère s'affaler face à un ennemi qu'il menait jusqu'alors par une large longueur d'avance.
Je ne pouvais pas croire que l'oiseau de feu venait d'être aussi cruellement blessé.
-Cygnus, attrape ça!
Nouveau coup dans le nez, puis dans le menton.
Je les barrais tous à une vitesse incroyable alors que le fait de savoir mon aîné en danger décuplait soudainement mes pouvoirs. Je devais lui venir en aide, comme j'étais précédemment intervenu dans l'affrontement de Shiryu. Je ne voulais perdre aucun d'entre eux, même si je devinais que c'était peut-être déjà le cas.
D'abord Shun... ensuite Seiya... enfin Ikki? Non! Non! Je devais agir et ne pas laisser faire cela. Je savais pertinemment que ma priorité était Athéna et la guerre en elle-même et que jamais un chevalier d'or n'aurait envoyé ses forces à un autre alors qu'un combat en dépendait, mais je ne pouvais pas m'empêcher. Ils étaient mes frères et je n'avais pas le droit de ne pas intervenir dans leur combat... car si je leur permettais de vivre, ce n'était pas seulement pour moi, mais pour toute l'humanité qui avait besoin d'eux; sans même le savoir.
Je levais mes bras aux cieux avec une grâce de cygne, comme me l'avait un jour fait remarquer mon maître, et concentrais la colère que j'éprouvais vis à vis de ce qui arrivait à mes frères dans mes poings. Tmolos allait le sentir passer, je pouvais le garantir.
Je crispais mes mâchoires en un mouvement convulsif alors que je me fiais à tous mes autres sens, celui de la vue m'handicapant plus qu'autre chose.
Je sentais mon ennemi, comme si mes yeux avaient pu l'apercevoir. J'allais venir à bout de lui en jouant le tout à pour le tout et ensuite, j'interviendrais immédiatement dans le combat d'Ikki, si j'en avais encore la force évidemment.
-Aurora Thunder Attack! hurlais-je.
-Eternal Deprivation! répliqua une voix tonitruante et guttural en face de moi.
Son attaque faisait presque écho à la mienne et leurs forces se croisèrent dans les airs, ne s'arrêtant mais se contentant de s'éviter pour venir nous frapper l'un et l'autre de plein fouet.
Le choc nous projeta en arrière chacun de notre côté alors que dans ma chute, j'essayais de reprendre mon souffle. J'avais l'impression que mes poumons étaient inexistants et que mes sens se brouillaient. Déjà que je ne voyais guère plus...
Je sentis un vent de panique souffler en ma direction car je ne savais plus où me trouvais-je. Peut-être tombais-je encore ou bien avais-je déjà touché le sol? Et surtout, pourquoi n'arrivais-je plus à identifier l'endroit dans lequel j'évoluais?
Non... non... je refusais d'y croire car cela aurait signifié croire en sa propre mort, en sa défaite. Je ne pouvais pas avoir perdu mes cinq sens! Je ne pouvais pas combattre dans cet état et pourtant... Tmolos de la Privation!
Son nom, qui jusqu'alors n'avait point éveillé en moi de grands soupçons me sauta presque aux yeux alors que mon sang, ou ce qu'il en restait car il était probablement en train de se répandre autour de moi, se glaça.
J'essayais de bouger le menton sans y parvenir. Je n'étais pas mort, c'était déjà ça!
Ma chance, contre toute attente il existait bien un point lumineux dans ce sombre moment de mon existence, était que mon adversaire me pensait déjà dans le Royaume d'Hadès, que je connaissais d'ailleurs trop bien pour vouloir y retourner de si tôt.
Alors que je réfléchissais, je songeais que Tmolos était peut-être au-dessus de mon corps, entrain de l'observer ou de le frapper, je n'en savais rien puisqu'en un instant, mon cœur avait perdu toute possibilité de souffrance puisque toutes ses facultés avaient été annihilés.
Je songeais soudainement que le Tonnerre de l'Aube n'avait pas du laisser mon opposant de marbre et que celui-ci agonisait probablement de la même façon que moi, sous une couche de glace qu'il ne pouvait plus faire sauter tant l'énergie que j'avais dégagé dans mon dernier coup avait été incroyable.
Maintenant, il fallait que je me concentre pour me sortir du pétrin dans lequel j'étais plongé et ou je n'avais nullement la permission de rester... mais comment faire?
Évidemment, j'avais déjà été privé de mes sens et j'avais toujours trouvé le moyen de me surpasser, j'avais découvert qu'au-delà de la souffrance, de l'épuisement, il existait une force surhumaine que seule les justes pouvaient découvrir et celle s'appelait la Force du Désespoir.
-Hyoga...
Une voix.
-Hyoga?
Cette voix qui m'appelait.
-Mon frère? Hyoga? Réponds-moi...
Seiya!
Mon cœur me parut faire un bond dans ma poitrine, me prouvant que j'étais décidément bien en vie malgré ce que le destin me faisait subir.
-Comme tu viens de le penser, Hyoga, il existe cette puissance secrète qui nous a toujours permis de gagner... parce que nous savions que nous ne pouvions pas faire autrement.
"Regarde-moi, Hyoga, je viens juste de me relever, et ceci c'est grâce à toi, à Shiryu et à Ikki qui combattiez d'un même poing, d'un même cosmos. Vous venez de me rappeler que je n'avais pas le droit de rester à terre, inerte, sans rien faire alors qu'Athéna à besoin de moi, de nous.
"Depuis toujours nous ne sommes qu'un, nous nous opposons au mal côte à côte, joue contre joue, cœur contre cœur et ce n'est pas le moment d'abandonner. Pas maintenant, pas alors que nous sommes si près du but, si près de l'objectif que nous nous étions fixés.
"Le soleil Hyoga, nous nous sommes battus de toutes nos forces pour qu'il puisse briller chaque jour, pour que les hommes du monde en profite et nous n'allons pas manquer le spectacle de son coucher ce soir, Hyoga. Alors relèves-toi! N'entends-tu pas Saga et Saori qui courent vers notre ennemi juré? N'entends-tu pas Milo et Aiolia qui se dirigent vers le temple de l'empereur? N'entends-tu pas Shura qui poursuit courageusement sa destinée, Mu et Aphrodite se soutenir pour parvenir à atteindre le bout du domaine, Dohko et Nikè avancer inlassablement dans leur quête? Je suis certain que si...
"Moi même j'étais il y a de cela quelques instants près à plonger dans les limbes de l'oubli, trop désireux de me reposer enfin... mais j'ai senti leur force, j'ai senti leur espoir qui ne diminuait pas, j'ai senti comme un appel car je faisais parti d'entre eux... et toi aussi, Hyoga. Nous sommes des chevaliers d'Athéna. Nous sommes des chevaliers de l'espoir.
"Alors relève toi et bats toi. Ton ennemi ne peut rien contre toi car ton cœur est pur et c'est la plus puissante des armes. Relève toi mon frère, pour moi, pour toi, pour Athéna et pour les hommes.
La voix de mon frère, de la personne la plus optimiste que je connaissais se tut soudainement car il devait probablement continuer sa route. J'avais l'impression de le voir marcher en titubant, portant un autre corps contre lui qui devait être Kanon d'après ce que mon sixième sens me faisait discerner. Il allait rejoindre Saori alors que son état était catastrophique et moi...
Une larme roula sur ma joue et je sentis sa chaleur contre ma peau. Je sursautai... comment pouvais-je... sentir?


Shun

Je n'étais pas mort.
C'était pour le moment la seule chose que j'avais besoin de savoir. Je serai probablement parti dans l'autre monde si je n'avais pas senti cette déchirante, cette épouvantable douleur... j'avais cru perdre mon frère et cela m'avait sorti du coma dans lequel j'étais plongé.
Je me rappelais de tout... La guerre, les berserkers, mes frères, Phaéton, Aioros...
Je secouais la tête car tous ces souvenirs qui m'assaillaient en même temps me martelaient le crâne et ne faisaient que me rendre plus difficile mon pénible éveil à la vie.
Nissan! Il n'était tout de même pas...?
Non, non. Je sentais encore la flamme incandescente de son cosmos prête à exploser ce qui signifiait qu'il n'était pas encore prêt d'abandonner. Je n'en avais finalement jamais douté même si j'entendais mon cœur battre la chamade en pensant qu'il pouvait perdre la vie durant son affrontement. Mais j'avais assez confiance en lui pour savoir qu'il ressortirait vainqueur et indemne de son combat tout comme j'avais réussi à le faire auparavant. Il avait prouver maintes et maintes fois sa surprenante valeur de guerrier, et même si ma nature torturée me poussait à douter, je savais que je n'en avais pas le droit.
Je me relevais péniblement en m'appuyant sur mes avant-bras alors que je m'asseyais doucement, la tête penchée en avant et le dos courbé.
J'étais totalement épuisé et si je me souvenais bien, je m'étais fait explosé moi-même pour venir à bout du demi-dieu qui s'était mis en travers de ma route. Je hochais la tête pour approuver mes propres propos.
Ikki m'avait sorti de mon sommeil qui s'apprêtait à devenir éternel mais il y avait eu autre chose, songeais-je alors que je me remettais debout tout en étant secouer de tremblements de la tête aux pieds.
Que s'était-il passé?
J'essayais de retrouver des bribes de souvenir alors que le noir envahissait mon esprit pour le faire sien. J'avais beau réfléchir de plus bel, je n'entrevoyais guère... Hyoga, Shiryu, j'avais senti qu'ils étaient en danger et je m'étais dit que je ne pouvais pas rester affalé par terre, je me devais de les aider, d'apporter ma contribution, aussi infime soit-elle.
Et puis, il y avait eu une dernière chose, une ultime chose qui m'avait forcé à me remettre debout et à marcher de nouveau, à me remettre à marcher pour rejoindre Aioros qui devait avoir prit plusieurs kilomètres d'avance si bien-sûr il n'avait pas succombé à ses blessures. Et cette chose, non, ce quelqu'un... c'était... Seiya!
Seiya était entré en communication télépathique avec Hyoga mais nous avions tous entendu son discours. J'étais persuadé qu'il avait résonné dans toute l'île d'Azura et même dans le cœur des hommes qui se détruisaient entre eux. J'étais sûr que grâce aux paroles de Pégase, ceux qui comme moi précédemment ne croyaient plus en la victoire de la justice avaient senti leur foi se raviver pour devenir encore plus solide qu'avant.
Seiya avait prononcé ces mots avec une telle force, avec une telle justesse que je m'en étais senti bouleversé. Et j'avais compris que je n'avais pas le droit de m'écrouler, que même si l'envie m'en prenait je devais lutter et rejoindre ma déesse.
Coûte que coûte.


Shiryu

Seiya avait raison.
Nous n'avions pas le droit de nous laisser aller et le message porteur d'espoir qu'il nous avait fait parvenir m'avait aidé à le saisir.
J'avais regardé après cela Etiar qui avait reçu de plein fouet la Colère du Dragon tout en songeant à la véracité des mots de Seiya et à l'amour que je portais à ce dernier.
Je m'étais ensuite penché vers mon ennemi, et avait déchaîné sur sa personne toutes les forces de mon cosmos, ou du moins ce qu'il en restait après le Death Whirl que j'avais du subir.
J'entendais d'ailleurs encore mes os craqués et je sentais que du sang stagnait dans ma gorge et dans ma bouche tant le coup avait été violent.
Et puis, il s'était relevé. Et il avait recommencé.
Une seconde fois, j'avais du encaisser sa redoutable attaque et à présent que je sentais que mon corps ne pourrait plus supporter bien longtemps ses assauts répétés je comprenais que cela ne se jouait plus qu'à quelques secondes. Cela allait être lui ou bien ce serait moi.
La situation était claire et ma nature tempérée et sage me permettait de la voir avec une inquiétante lucidité dont j'aurais pour une fois ne pas voulu être pourvu.
Mais je n'avais pas le choix, je devais donner tout ce qui me restait de cosmos dans cette lutte acharnée que je menais tambour battant depuis tout à l'heure.
Je secouais la tête alors que je sentais mes tempes prêtes à exploser d'une seconde à l'autre. Mon mal de tête provoquée par le fracas de mon crâne contre la sol était insupportable mais je me savais capable d'y résister, au moins jusqu'à la fin de ce combat.
Etiar me regarda, complètement essoufflé. Il ne s'attendait probablement pas à tomber sur un ennemi de ma trempe. De mon côté, j'avais toujours su que l'opposition serait farouche et difficile et je ne m'étonnais donc guère de la situation dans laquelle je me retrouvais actuellement plongée.
Mais c'était maintenant où jamais.


A présent, Hyoga et Shiryu se tenaient debout, le corps raidi autant par la douleur que par l'approche de la fin et à leur excitation de combattant, se mêlait une indicible force, celle de l'amitié. Ils se sentaient envahis par cette dernière, comme si dans leurs veines coulaient les souvenirs qu'ils avaient en commun avec leurs frères. Sous leurs yeux, et alors qu'ils serraient identiquement leurs poings et que leurs cosmos se sublimaient, des images d'autrefois défilaient, comme si le vent que déclenchaient leurs forces balayaient les maux de leur mémoire.
Ils avaient aimé, souffert, ri, pleuré, tout enduré avec Seiya, Shun et Ikki... et ce n'était pas ce jour d'hui, alors qu'ils se trouvaient face à deux Berserkers d'une force impressionnante qu'ils allaient soudainement tout abandonner. Si l'existence leur avait appris quelque chose, c'était bien à ne jamais lâcher prise, et à s'accrocher à ce qu'ils avaient de plus précieux en cas de besoin : l'amitié.
Et c'est ce qu'ils ressentaient l'un et l'autre, tandis que tous les nerfs de leur corps étaient tendus au maximum, que malgré leur aveuglement ils avaient l'un et l'autre l'impression de voir, mais pas n'importe quoi, les visage de leurs frères, de ceux qui les avaient accompagnés de la vie à la mort, et bien souvent de la mort à la vie.
Seiya, le volontaire leader, celui dont l'optimisme faisait grandir la flamme de la foi, Shun, le doux et sincère chevalier, celui dont la patience rehaussait d'éclat sa pureté d'âme et enfin, Ikki, le solitaire, l'insoumis Phœnix immortel... ces garçons, ces frères étaient pour toujours incrustés dans leurs âmes, dans leurs peaux car, alors qu'ils levaient les bras aux cieux en invoquant leur puissance, ils ne faisaient, tous cinq, plus qu'un seul et même homme.
Oui, un même homme. Un même cri. Un même coup.
-Death...
-Par la colère...
-Whirl
-Du Dragon!
-Eternal...
-Aurora...
-Deprivation!
-Execution!
Une vague de cosmos, mêlant vert, blanc, bleu, orange et rose envahit le territoire d'Azura, soulevant un nuage de poussières avec la force d'une tornade... et sous les yeux aveugles de Shiryu et de Hyoga, Etiar et Tmolos, à des kilomètres de différence, étaient soulevés comme des fétus de paille, comme les vulgaires brindilles qu'ils représentaient.
Leurs cris de douleur résonna encore longtemps après que ceux-ci fracassèrent le sol, ou peut-être était-ce le dernier son qui sortit de la gorge des chevaliers de Bronze à la fin de l'affrontement et qui résonna indéfiniment dans ce paysage silencieux et où régnait la mort. Car ils avaient l'un et l'autre du baisser leur garde pour toucher leurs résistants opposants... et ce au prix de leurs vies.
De leur côté, Seiya et Shun s'étaient relevés, et malgré la décharge qu'ils avaient ressenti et qui les avaient secoué avec une violence extrême, ils continuaient d'avancer, tout en priant pour leurs frères d'éternité.
Ikki, pour sa part, flottait toujours à la surface des marécages, à côté de la dépouille d'Aristos, qu'il avait facilement tué. Le Phœnix n'avait pas réellement compris ce qui s'était produit, il avait simplement ressenti un foudroiement venu du lointain s'abattre sur lui... et de là à citer le nom de l'empereur, le pas était allègrement franchi.
Pourtant, aucun n'était mort. Ils avaient tous autant qu'ils étaient survécus à la traversée des Douze Maisons, à la course dans l'Asgard, à la destruction des sept piliers des Mers et enfin au passage dans les enfers... et ce n'était pas sur Azura qu'ils comptaient rendre leur dernier souffle.
Ils étaient arrivés ensemble sur cette île maudite et avaient juré de repartir de la même manière, et jamais encore, ils n'avaient trahi l'une de leur promesse, toujours placée sous le sceau de la fraternité. Le Sceau de Bronze.

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Cette fiction est copyright Caroline Mongas.
Les personnages de Saint Seiya sont copyright Masami Kurumada.