Chapitre 2 : Mission divine


La demeure de maître Ezéchiel apparut soudain à l'horizon et j'accélérai légèrement, craignant qu'il ne remarque mon absence. Je vis qu'un peu partout, les Novices s'entraînaient avec leurs mentors. A droite, l'Archange Callisto et son disciple Dar échangeaient des coups proches de la vitesse de la lumière, plus loin Loralyne méditait sous la vigilance de Gabriel et ailleurs encore Nayan s'échauffait en attendant l'Archange Pharel. Les arènes devaient être pleines à présent, les Chérubins organisaient souvent des combats entre eux pour se perfectionner. Les Anges de Zeus s'entraînaient sans répit, rien n'était laissé au hasard.
Lorsque je me posai enfin devant l'entrée de la demeure de mon maître, il apparut sur le seuil, l'air préoccupé.

- Où étais-tu ?

Je réfléchis à toute vitesse, légèrement inquiète.

- Euh... avec Aaron, fis-je sans grande conviction. Il voulait... qu'on s'entraîne ensembles.

Ezéchiel n'eut aucune réaction, il ne semblait pas m'écouter. Pensait-il à cette mission que Zeus lui avait demandé de nous confier ? Peut-être ne savait-il pas comment me l'annoncer. J'aurais tant voulu lui dire que je savais déjà tout... mais Jonas avait raison, c'était de la folie. On pourrait me punir sévèrement... ou pire, me retirer la mission ! Plutôt mourir ! Je décidai donc de feindre l'ignorance.

- Commençons-nous l'entraînement tout de suite, maître ? demandai-je innocemment.

Cela l'obligerait forcément à avouer qu'il y avait un changement de programme. Mais il hocha doucement la tête, deux doigts posés sur son menton comme chaque fois qu'il réfléchissait profondément.

- Oui, lança-t-il. Commence à t'échauffer, nous allons reprendre là où nous nous étions arrêtés.

J'en ouvris la bouche de saisissement. N'allait-il donc rien me dire ? Pourquoi...

- Mais... lâchai-je, m'apercevant trop tard de ma gaffe.

Mon maître me regarda d'un air étonné.

- Quoi ? Qu'y a-t-il ?

J'aurais pu me gifler pour ma stupidité.

- Euh... non rien, assurai-je. Allons-y.

Je me détournai aussitôt pour qu'il ne voie pas mon embarras. Bien sûr je savais que ses yeux violets étaient toujours braqués sur moi mais je m'efforçai de faire comme si de rien était.
Mon échauffement consistait en quelques mouvements machinaux que j'exécutai sans même m'en rendre compte. Les muscles de mes membres se contractaient puis se détendaient sans arrêts tandis que j'observai discrètement Ezéchiel du coin de l'oeil. Il paraissait tout à fait normal malgré le pli soucieux sur son front. Je pestai intérieurement : mais pourquoi ne disait-il rien, par Zeus ? Soudain, il vint vers moi.

- Parfait, dit-il en prenant une position de défense. Maintenant il n'est plus temps de plaisanter. Allons, attaque-moi ! Et concentre-toi !

Facile à dire, songeai-je en me mettant en position. Maître Ezéchiel n'attaquerait pas en premier, je le savais. Il aurait pu tenir des heures comme ça, immobile face à son adversaire, sans que la pression n'ait de prises sur lui. Non, il attendrait patiemment que je vienne à lui et il me cueillerait selon l'usage, comme d'habitude. Mais cette fois, j'étais bien décidée à ne pas me laisser faire. En quelques secondes je me concentrai et augmentai la force de mon cosmos. L'effet fut immédiat et je le vis tressaillir. Il était prêt. Moi aussi. Tout à coup je m'élançai, prête à libérer ma puissance.

- Angel's Justice ! hurlai-je.

Mon cosmos se mit à briller au point de prendre feu, je sentais sa chaleur inonder mes veines comme de la lave en fusion. Mes mouvements se coordonnèrent. Ma vitesse augmenta et mon coup partit à une vitesse fulgurante. Ezéchiel réagit presque aussi vite. Comme je l'avais prévu, il ne prépara qu'une parade. Brusquement mon poing s'écrasa dans sa main et il me coupa dans mon élan. Mon maître s'énerva alors.

- Ce n'est pas comme ça que tu m'auras Sara ! cria-t-il. Applique-toi un peu plus que ça !

Soudain son bras fondit sur moi comme un rayon de lumière et me faucha en plein dans l'estomac. La douleur me scia en deux. L'air cessa de pénétrer dans mes poumons, mon sang se figea dans mon corps et mon esprit s'engourdit. Pourtant Ezéchiel me balança au sol d'un coup violent. Il fulminait et sa colère me fit peur.

- Relèves-toi ! Tu ne gagneras pas si tu n'y mets pas un peu du tien ! Est-ce donc tout ce que tu as retenu de mes enseignements ? Combien de temps comptes-tu survivre ?

J'étais mortifiée. Dès que ce fut possible, je me remis sur mes jambes. Alors je fonçai sur lui. Mon attaque se dessina dans ma tête, je vis chaque mouvement, chaque enchaînement et la puissance afflua à nouveau dans mes muscles. Il se prépara. Cependant je ne lui laissai pas le loisir de me porter un deuxième coup de cette ampleur. Je pris appui sur mes jambes, vis sa position, ramenai mon poing et fusai en avant. Sa défense brassa le vide, il eut une demi seconde de surprise et j'étais déjà derrière lui. Mon coup partit. Au dernier moment un reflet glissa sur l'air devant moi, comme un petit éclair argenté et je sus que j'avais commis une grossière erreur. Trop tard. Tout à coup mon poing parut exploser et s'encastra dans son bouclier de défense invisible. L'énergie de mon attaque provoqua des étincelles et l'onde de choc me propulsa contre un mur. Je tombai au sol, souffle coupé. Malheureusement ce n'était pas fini. Mon maître me saisit par le col et me souleva de terre à bout de bras. J'étais incapable de réagir.

- Ressaisis-toi Sara ! Ce n'est pas une attaque ça !

Il me posa sèchement sur mes pieds et je vis à son expression très dure qu'il avait décidé de faire bouger les choses. Cette fois, il attaquerait lui-même. Il bondit sur moi et j'eus tout juste le temps d'organiser un semblant de défense. Sa boule électrique m'atteignis de plein fouet, je ne pus la contenir bien longtemps. Soudain je fus expulsée et sentis que mes dernières forces se consumaient. Il fallait que je fasse quelque chose sinon c'était fini. Pourquoi était-il si violent aujourd'hui ? Il me traitait comme une incapable, se défoulait sur moi et refusait de me confier cette mission officiellement par dessus le marché ! C'en était trop ! Avant qu'il n'ait pu déverser à nouveau tout son fiel sur moi, je me hissai péniblement sur mes jambes flageolantes. Et j'attaquai avec la force que cette colère me donnait. Il arrêta mon coup, évita, renvoya et je ne pris même pas le risque de m'arrêter. Les rayons de lumière fusèrent dans tous les sens pour entrer en collision et j'essayai d'accélérer encore. Je voyais les mouvements d'Ezéchiel, plus rapides, plus fluides, infiniment mieux maîtrisés que les miens mais je continuai. Subitement, mon attaque le frôla et il fit un bond de côté, brûlé au flanc. Aussitôt j'en profitai et enchaînai avec un autre coup. Seul le feu de mon cosmos réussissait à me maintenir sur mes jambes. Tout à coup je vis la faille dans sa posture. Mon poing fila comme une flèche. L'aura d'Ezéchiel flamboya soudain.

- Tu n'as rien compris ! entendis-je crier.

Avant même que j'aie pu réaliser quoi que ce fût, il avait stoppé mon coup et avalé ma puissance.

- Zeus Hand !

Le trait de feu s'enfonça dans mon épaule gauche et la douleur transperça tous mes nerfs comme des millions de couteaux chauffés au fer. Un hurlement fendit l'air jusqu'à en déchirer le ciel et je mis un moment à me rendre compte que c'était le mien. Je m'écroulai au sol, des points lumineux dansant devant mes yeux comme une myriade de lucioles multicolores. Je ne pouvais plus bouger un muscle et restai dans une sorte d'équilibre étrange, suspendue entre ciel et terre. Le visage de maître Ezéchiel apparut, venant de nulle part.

- Je t'ordonne de te relever et de recommencer tant que tu n'auras pas parfaitement réussi !

Alors je sentis mon esprit flotter sur un courant qui l'emportait de plus en plus loin. Ma vision devint floue. Le monde autour de moi disparut complètement.

En m'éveillant, la première chose que je vis fut le regard violet lumineux de maître Ezéchiel. Il était penché sur moi, l'air terriblement angoissé. Sa longue frange brune frôlait ses sourcils fins. Pour la première fois, je remarquai son âge. De petites rides d'inquiétude s'étaient formées au coin de ses yeux et sur son front. Soudain je l'entendis pousser un soupir de soulagement.

- Ah... tu te réveilles enfin, dit-il. Je ne crois pas que tes blessures soient graves. Un peu de repos et tu seras de nouveau en pleine forme.

Je m'aperçus alors qu'il me tenait dans ses bras. Il m'aida à me redresser. Je n'arrivais pas à dire un mot. Ma tête tournait et le monde tanguait autour de moi jusqu'à me donner la nausée. Mon maître me passa une main sur le front avec douceur.

- Pardonne-moi Sara, murmura-t-il. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris, je crois que je me suis laissé emporter.

Je tournai faiblement la tête vers lui et esquissai un sourire.

- Il n'y a... pas de mal, assurai-je faiblement.
- Je suis désolé. Je suis très inquiet, expliqua-t-il. Je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose... Mais j'ai confiance en toi, tu t'en sortiras très bien.

Mon coeur accéléra. Allait-il enfin me dire... ?

- Pourquoi me dites-vous cela maître ? demandai-je.

Il ne répondit pas tout de suite et m'aida à me lever. Je n'étais pas sûre que mes jambes arrivent à me soutenir totalement. Alors Ezéchiel passa un bras autour de mes épaules et me soutint. Je me sentais faible et fragile, aussi molle que si je n'avais jamais eu d'os. Toutefois, ce n'était pas le pire. Quand je voulus la bouger, mon épaule gauche s'enflamma et mon muscle se déchira de part en part. Je ne pus retenir un gémissement de douleur.

- Tu souffres, constata Ezéchiel plein de remords.

Je n'avais pas prononcé un mot que mon maître se baissait, glissait une main sous mes genoux et me soulevait dans ses bras pour me porter. La frustration me torturait bien plus que mes contusions mais bien sûr, il ne s'en serait jamais douté. Soudain, je n'y tins plus :

- De quoi parlez-vous maître ? insistai-je.

Il m'amena tranquillement jusqu'à ma chambre et me déposa délicatement sur ma couchette. Je n'essayai même pas de résister. Ezéchiel s'assit ensuite à mon chevet et me regarda de cet air triste et navré que je n'aimais pas beaucoup.

- J'ai une nouvelle à t'annoncer Sara, déclara-t-il pour ma plus grande joie.
- Une nouvelle ? répétai-je, faisant mine de ne pas comprendre.

J'avais tout de même quelques scrupules de jouer une comédie aussi grossière. S'il savait...

- Oui, reprit-il. C'est en rapport avec ma convocation de ce matin au palais. J'avoue que je ne m'attendais pas à ça. Enfin... pas si tôt. J'ai fait ce que j'ai pu, pardonne-moi Sara mais ce n'était pas suffisant.

Il marqua un temps d'arrêt qui me coupa le souffle. Puis il continua, tête baissée.

- Zeus te confie une mission, mon enfant, lâcha-t-il. Tu vas être envoyée sur Terre.

Enfin ! Je crus un instant que mon coeur allait exploser. Mon sourire fendit mon visage d'une oreille à l'autre.

- Une mission ! A moi ? C'est incroyable ! m'exclamai-je.

Mon maître ne partageait visiblement pas ma joie.

- Pas toute seule, bien entendu, fit-il. Tu iras avec les deux apprentis de Zacharie et Hébé, Aaron et Jonas. On vous envoie tous les trois en bas.

Peut-être aurais-je bondi dans tous les sens si mon corps me l'avait permis. Mais ma joie n'en était pas moins grande.

- C'est fabuleux, maître ! m'extasiai-je. C'était mon rêve d'aller sur Terre un jour, je n'arrive pas à y croire. Enfin, je suis digne d'une vraie mission... c'est le plus beau jour de ma vie !

Ezéchiel m'offrit un sourire indulgent comme si je n'étais qu'une toute petite fille qui ne sait encore rien de la vie.

- Ne t'emballe pas Sara, dit-il. Une mission, c'est bien plus difficile et dangereux que tu ne le crois. Tu ne te rends pas bien compte encore... Tu es si jeune. Il faut que vous soyez prudents, toi et tes amis. Tu m'entends ? Non, je n'entendais plus rien, j'étais trop heureuse pour cela. Quand partions-nous ? Pour combien de temps ? Je ne tenais plus en place. Je riais sans cesse.

- Sara, tu m'écoutes ?

Quand je pensais à toutes ces aventures qui nous attendaient je...

- Sara !
- Hein ? Quoi ? bégayai-je.

Maître Ezéchiel me jeta un regard sévère.

- Tu prends cela bien trop à la légère, me reprocha-t-il. On ne plaisante pas avec les missions de Zeus !

Je tentai aussitôt de ma calmer pour ne pas être insolente.

- Pardonnez-moi mon maître, dis-je.
- Il n'y a pas matière à rire.
- Mais maître, comprenez-moi, depuis le temps que je rêvais d'aller sur Terre et de la visiter ! C'est merveilleux pour moi ! Je ne suis qu'une apprentie et j'ai enfin une mission !

Il hocha la tête.

- Oui, peut-être, admit-il. Et crois bien que je suis très fier de toi. Mais j'essaie simplement de te mettre en garde pour que tu réussisses cette mission parfaitement. Tu ne dois commettre aucune erreur.

Il me vint alors à l'esprit que je ne savais même pas en quoi consistait cette mission. Nous y allions tout de même à trois ! Que devrions-nous faire sur Terre ?

- Maître Ezéchiel, quelle est la nature de cette mission exactement ? Est-ce que vous le savez ?

Il soupira.

- Toi et tes amis êtes chargés d'un message de Zeus, confia-t-il. Il vous faudra le mener à son destinataire sans faute.
- Qui est-ce ? demandai-je.
- Le plus haut représentant de la déesse Athéna, le Grand Pope. Il vit au Sanctuaire, dans un endroit appelé Grèce.

Je n'en croyais pas mes oreilles. Avais-je seulement bien entendu ? Mon maître avait bien dit le "Sanctuaire d'Athéna" ? Une vague surpuissante submergea brusquement mes poumons et remonta dans ma gorge sous forme de millions de petites bulles de joie.

- Oh grand Zeus ! soufflai-je. Le Sanctuaire d'Athéna !

Soudain j'éclatai d'un rire hystérique.

- Merci ! Oh merci ! Merci beaucoup ! criai-je.
- Sara, allons, calme-toi ! gronda mon maître.

Je forçai ma gorge au silence mais ne pouvais contenir les fourmillements qui électrisaient mes membres.

- Les choses sont un peu délicates en ce moment au Sanctuaire. Il vous faudra agir avec calme et réflexion. Ce n'est plus un conseil c'est un ordre, Sara ! La demeure du Grand Pope est gardée par douze maisons. Chacune d'entre elles abrite l'un des puissants Chevaliers d'Or. Ce sont les plus grands de tous les chevaliers du Zodiaque d'Athéna. On raconte que personne n'a encore pu passer les douze maisons, il te faudra être très prudente. Je ne pourrai pas t'aider cette fois. Ces hommes sont quasiment des demi-dieux, ils ne te laisseront passer que s'ils t'en jugent digne.
- Je réussirai maître, ne vous inquiétez pas pour moi, affirmai-je vivement.

Je trépignais d'impatience.

- Les chevaliers d'Athéna ! murmurai-je transportée. Je vais rencontrer les chevaliers d'Athéna !

Mon maître semblait désespéré de mon attitude.

- Quand partons-nous ? lançai-je.
- Dans deux jours Sara. Vous devez être prêts d'ici là.
- Vous croyez que je ne suis pas prête pour ça ?

Il croisa les bras sur sa poitrine et fixa attentivement un point devant lui.

- Ce n'est pas ça, dit-il. Tu es une apprentie Archange, il ne faut pas l'oublier. Et tu as prouvé plusieurs fois que tu n'étais pas sans ressources. Mais tu es jeune, c'est ta première mission et ton enthousiasme m'inquiète. Tu manques d'expérience et j'ai peur que tu ne te laisses aveugler par cet émerveillement sans bornes. Le monde n'est pas aussi rose que tu le crois. J'espère simplement que tu t'en rendras compte assez tôt.

Je ne trouvai rien à répondre à cela. Pourtant je ne pouvais m'empêcher d'être plus heureuse que je ne l'avais jamais été. Mon maître avait beau enchaîner les mises en garde et les conseils menaçants, pour moi cette mission était un vrai cadeau. Après tout, je n'avais qu'à porter un message. Et en plus, cela me permettrait d'aller sur Terre et de rencontrer les plus puissants de tous les chevaliers d'Athéna.

- Ce sont à peu près les seules indications que j'avais à te donner, fit soudain Ezéchiel. Remets le message au Grand Pope et reviens aussitôt ici.
- Pourquoi ne pas le remettre directement à Athéna ? interrogeai-je.
- Athéna n'est pas encore réincarnée. Le Grand Pope du Sanctuaire la représente en son absence.
- Ah...

Maître Ezéchiel se leva et me lança un dernier regard bienveillant avant de se diriger vers la sortie. Au moment où il allait passer le seuil, il se retourna le temps de quelques mots :

- Une dernière chose... tu n'auras pas tes ailes.
- Oh... d'accord.
- Repose-toi à présent, dit-il.

Et il disparut. Je gardai les yeux rivés sur l'endroit où il se tenait deux secondes auparavant puis me détournai. Aaron et Jonas devaient être au courant eux aussi à présent. Je me demandais si leurs maîtres avaient été aussi sévères avec eux. De quoi Ezéchiel avait-il peur ? Si Zeus nous confiait cette mission après tout c'est que nous en étions parfaitement capables... Il me tardait déjà d'être à ce soir pour en parler avec mes deux compagnons d'aventure.

A la nuit tombée, je fis mon possible pour sortir discrètement. Il me semblait que maître Ezéchiel dormait dans sa chambre et je me dirigeai vers la sortie à pas de loup. Une fois à l'air libre, je m'envolai vers le palais de Zeus, l'air frais du crépuscule me caressant doucement le visage.
Je fus à destination en quelques minutes seulement. Aaron était déjà là, assis contre le mur en nous attendant. Il se leva pour m'accueillir.

- Ah, Sara, dit-il. Je croyais que tu ne viendrais pas. Jonas va bientôt arriver, il attend que Hébé s'endorme. Tout va bien ?

Je souris. Aaron n'avait pas besoin que je lui dise pour savoir quand je n'allais pas bien. Il avait du remarquer quelque chose. De fait, je me sentais un peu lasse et je volais moins facilement que d'habitude.

- Je vais bien Aaron, merci, répondis-je. Alors raconte-moi, Zacharie t'a tout dit ?

Il acquiesça.

- Oui... On nous envoie au Sanctuaire d'Athéna ! Tu te rends compte ?
- J'ai eu du mal à y croire moi aussi, expliquai-je. Mais Ezéchiel me l'a confirmé : nous devons remettre un message de Zeus au Grand Pope ! C'est presque trop beau pour être vrai !
- Ce n'est pas mon avis, lança une vois derrière nous.

Nous nous retournâmes d'un bond pour découvrir Jonas qui arrivait, sa lyre à la main comme toujours. Apparemment tout cela n'était pas une bonne nouvelle pour lui.

- Pourquoi dis-tu ça Jonas ? fis Aaron dès que notre troisième compagnon nous eut rejoints. Ce n'est qu'un message, où est le problème ?
- Savez-vous que Athéna n'est pas encore réincarnée ?
- Oui, répondis-je. Mon maître me l'a dit, c'est pour cela que nous devons remettre le message au Grand Pope.

Jonas devait savoir autre chose.

- Il y a une raison à cela, avoua-t-il. Le Sanctuaire était en guerre il y a seulement quelques mois.

J'ouvris des yeux ronds.

- En guerre ? Contre qui ? m'exclamai-je.
- Hadès et son armée de Spectres, répliqua-t-il. Les batailles furent terribles à ce qu'il paraît. Il y a eu beaucoup de morts, même chez les chevaliers d'or, pourtant le plus haut grade de tout le Sanctuaire. C'est pour cela que Athéna n'est plus sur Terre, elle a été tuée au cour des combats. Ce n'est qu'à ce prix que ses chevaliers ont remporté la victoire.

Aaron et moi étouffâmes un hoquet d'horreur. Jonas baissa respectueusement la tête à la mémoire de ces valeureux guerriers.

- C'est pour cela que le Sanctuaire ne va pas très bien en ce moment, reprit-il. Il se redresse doucement de toutes ses pertes et les chevaliers sont très méfiants et très austères. Maître Hébé m'a bien recommandé d'être prudent là-bas.
- C'est terrible, murmurai-je mortifiée.
- Ils doivent être dans un bel état, renchérit Aaron.
- Peut-être qu'on pourrait leur venir en aide ? proposai-je à tout hasard. Ils ont peut-être...
- Tu sais, Sara, intervint Jonas, dans des cas comme ça, on ne peut pas faire grand chose. On ne leur serait d'aucune utilité, on ne peut pas ressusciter les morts. Tout ce qui est en notre pouvoir c'est d'apporter ce message au Pope. Zeus doit avoir quelque chose d'important à lui communiquer.

Ma gorge était nouée par une boule de chagrin. Si j'avais pu imaginer tout ça... Ce doit être terrible une guerre. Et moi je n'en avais jamais connu. Maître Ezéchiel avait peut-être raison, j'étais trop naïve, je manquais d'expérience. Aaron posa soudain une main sur mon épaule pour me réconforter et je lui adressai un triste sourire.

- Allez Sara, fit-il. On va remplir cette mission à la perfection et si on peut, en même temps, on aidera les chevaliers du Sanctuaire. Tu es d'accord ?

Je lui étais infiniment reconnaissante d'essayer de me remonter le moral. Je fis oui de la tête et posai ma joue sur son épaule.

- Zeus sera fier de nous, lança-t-il.
- Nous partons dans deux jours, déclara Jonas.

Il frôla doucement les cordes de sa lyre d'un air songeur.

- Je suis tout de même curieux de rencontrer ces fameux chevaliers du Zodiaque, dit-il. Pas vous ?

Je souris.

- Si, bien sûr, répliquai-je. Il n'est absolument pas question d'aller au Sanctuaire sans apprendre quelques uns de leurs secrets. Ils ont la réputation d'être aussi forts que les Archanges de Zeus...

Aaron me regarda comme si j'avais dit la dernière des énormités.

- Tu ne crois pas sérieusement ce que tu dis ?! Aucun chevalier d'aucun dieu quel qu'il soit ne peut rivaliser avec les Archanges de Zeus !
- C'est ce que nous vérifierons dans deux jours...

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